"Cher Mr. Ral", ou quand Levi tente d'écrire une lettre [OS]

"Cher Mr. Ral", ou quand Levi tente d'écrire une lettre

J'ai perdu mon escouade il y a quelques jours. Ils n'étaient pas sous mes ordres depuis longtemps et j'avais beau rester froid et distant, je m'étais vraiment attaché à eux. Ils étaient tous courageux, motivés, loyaux, agréables et talentueux. Mais j'ai encore perdu à ceux à qui je tenais. Le moment où j'ai découvert le corps me revient encore à l'esprit...

Cela faisait des années que je n'ai pas ressenti autant de tristesse. Je ne m'attendais pas à leur mort, vu qu'ils étaient des combattants exceptionnels que j'avais moi-même choisis et formés. Pourtant, ces cadavres sanglants étaient bien les leurs. Et bien que la tristesse et la colère me rongeaient, j'ai su, comme toujours, garder un air indifférent en public. Le reste de la journée avait été tout aussi merdique. Eren ayant été battu - et avalé - par le titan féminin, moi et l'autre gamine au talent exceptionnel, Mikasa, sommes partis le sauver. Ce qui était frustrant, c'était de savoir qu'on ne pouvait pas la tuer, alors qu'elle avait causé la mort de dizaines de soldat, dont mon escouade. Sauf que l'autre gamine ne m'a pas écouté et a essayé de tuer ce titan. À cause de ça, je me suis fait une entorse, ce qui m'avait ensuite empêcher de participer à la capture d'Annie Leonart. Mais on a tout de même pu récupérer Eren - dégueulasse et couvert de bave, certes, mais vivant -. Heureusement d'ailleurs, sinon mon escouade aurait été anéantie pour rien, et il n'a rien que je déteste plus que les morts vaines.

Ensuite, lorsqu'on récupérait les corps ou ce qu'il en restait - et merde, même si on perd beaucoup de soldats à chaque expédition, là, c'était autre chose, saloperie de titan féminin - , deux jeunes soldats voulaient aller chercher le cadavre de leur ami d'enfance... qui se trouvait dans une zone infestée de titans. Bien évidemment, moi et Erwin avons refusé catégoriquement, ils nous ont donc traité de monstre déshumanisé à cause à notre manque d'émotion face à tous ces sacrifices. Ce n'est pas la première fois, et je sais qu'à peu près tous les soldats le pensent également, cela ne nous a donc pas atteint. Sauf que ces deux idiots ont décidé de quand même aller le chercher, résultat : on s'est retrouvés avec des titans collés aux fesses. Pour pas qu'ils nous rattrapent, j'ai ordonné qu'on jette les cadavres que l'on transportait. Encore une fois, on m'a obéi en me regardant comme si j'étais un monstre. Bien que les derniers cadavres étaient couverts de draps, le visage du dernier a été dévoilé durant sa chute : c'était celui de Petra. Elle est morte, qu'on puisse incinérer son corps correctement ou non n'y changerait rien, mais cela m'avait tout de même foutu un coup.

Lorsqu'on est rentrés, on s'est fait hués. Faut dire que l'expédition était loin d'être un succès et qu'on n'a atteint aucun de nos objectifs. Mais je ne m'attendais pas à ce que le père de Petra vienne me dire que dans une de ces lettres, elle avait écrit qu'elle m'aimait et était « prête à se dévouer corps et âme », mais qu'il l'estimait trop jeune pour se marier. Je n'ai rien répondu. Que pouvais-je dire ? Que vu qu'elle est morte, ça ne risquait pas d'arriver? J'ai donc continué mon chemin. Cela faisait un petit moment que j'avais remarqué ses sentiments, mais je m'étais dit que je devais me tromper vu que je ne m'y connais pas du tout en amour. Je l'appréciais beaucoup, bien sûr, mais autant que Erd, Gunther et Auruo, je n'éprouvais aucun sentiment amoureux envers elle, et mes responsabilités ne m'autorisaient pas ce genre de relations.

Je ne sais pas si on lui a déjà dit que sa fille est morte, mais je sais que je dois le lui annoncer et m'excuser. Je sais que ce n'est pas ma faute, mais il ne doit pas voir ça de la même façon. Il me voit sûrement comme le héros de l'humanité et pense que comme elle est dans mon équipe d'élite, elle ne risquait rien, que je serais toujours là pour protéger Petra. Sauf que ce n'est pas comme ça que ça marche. L'intérêt de l'humanité passe avant tout, et personne, même moi, n'est à l'abri du danger ou du sacrifice.

Je trempe donc ma plume dans mon encrier, je prends une feuille et je commence à écrire. Bon sang... J'espère ne pas faire de faute d'orthographe et écrire quelque chose d'à peu près correcte. Ayant grandi dans les bas-fonds, je ne suis jamais allé à l'école et j'ai appris à lire et à écrire qu'après avoir rejoint le bataillon d'exploration.