Abubakr, 7 ans, brûlé vif.

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L'histoire d'Abubakr -
« Comment peut-on un jour respecter et traiter avec dignité l'homme noir si ce dernier ne se respecte pas ? »

Samedi 12 novembre 2016, nidon-ville du Lagos, Nigéria.

O M N I S C I E N T

Lagos, capitale économique du Nigéria, et pourtant, bien au-delà des apparences. Derrière les immeubles, grands, beaux et modernes, se cachent les bidons-ville, Makoko.

Dans celui-ci, près de deux cents milles personnes y vivraient, et la moitié y vit sans eau courante, ni électricité. Pour couronné le tout, la croissance fulgurante de Boko Haram ne facilite pas la chose.

C'est là où vit Abubakr Sidibé, âgé de sept ans, avec sa mère qui, elle, est enceinte.

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- « Maman ? J'entends ton ventre gargouiller ! » dit Abubakr en riant aux éclats.

La mère de l'enfant lui sourit, effectivement, elle avait très faim, elle qui devait se nourrir, elle, et l'enfant qui habite en elle. Ce qui l'a rassurait était simplement le fait que notre jeune nigérian prenne leur situation désastreuse à la rigolade.

- « Ça veut dire que tu as faim ! » rit-il en levant son poing vers le ciel. « Mais ce n'est pas grave ! » ajouta Abubakr en voyant la mine désemparé de sa mère. « Moi aussi ! » finit-il en caressant son ventre.

Il est midi trente-cinq, les petits commerces venaient d'ouvrir. C'est le moment où les commerçants peuvent gagner de quoi vivre et les plus aisés, acheter de quoi manger un peu plus.

Abubakr a quitté sa « maison » pendant que sa mère dormait. Il parcourait les commerces d'Orile à la recherche de nourriture pour sa mère et son futur petit frère ou petite sœur.

Les prix n'excédaient pas cinq cents nairas – devise du Nigéria – et bien évidemment Abubakr ne pouvait pas se permettre d'acheter quoi que ce soit à ce prix.

– « Bonjour ! Je m'appelle Abubakr ! Je suis vraiment désolé, je n'ai pas assez de quoi vous payez mais si je vous tout ce que j'ai, c'est suffisant pour avoir un peu de farine ? » dit-Abubakr en additionnant le peu de nairas qu'il avait.

— « Dix nairas et cinquante kobos ?! Déguerpis ! » cria le marchand.

– « Mais avec ça je ne pourrais pas avoir ne serait-ce que dix grammes ? »

— « Non tu peux aller crever ! Vas t'en vagabond ! »

Le marchand poussa Abubakr, qui, tomba à terre. Mais alors qu'il allait s'en aller, il eu un élan de courage et attrapa un sachet de farine de manioc en courant de toutes ses forces. Ce n'était pas voulu, non, il n'avait jamais volé et il ne savait même pas ce qui lui avait pris. Il voulait simplement nourrir sa mère..

Mais vous savez lorsque vous n'avez ni chaussures, ni de quoi vous protégez les pieds c'est plus ou moins difficile de courir sur le bitume.

– « AU VOLEUR ! AU VOLEUR ! » cria le marchand de farine de manioc.

Manque de peau pour Abubakr, il marcha sur un bout de verre ce qui l'arrêta de suite. L'enfant criait de douleur alors que le marchand arrivait accompagné d'une énorme foule.

— « Venez ! Venez ! Venez voir comment faut-il punir les voleurs ! » dit-le marchand en commençant à le frapper.

Les gens criaient et frappaient Abubakr de plus en plus, soudain, ils ont commencé à s'en prendre à lui en utilisant des couteaux et d'autres armes. Dans la foule, certains ont essayé d'arrêter les hommes, mais d'autres les ont aidés. Ensuite,il a été attaché et déshabiller, laissant pour seul vêtement, son T-Shirt. Ses paupières sont tellement gonflées qu'il peut à peine ouvrir les yeux. Son visage est recouvert de sang.

À bout de forces, Abubakr à cesser de se défendre, c'est alors qu'ils ont utilisé un pneu et de l'essence pour le brûler vif. Il n'y avait pas de policier dans la zone pour le sauver.

Abubakr hurlait, il allait mourrir, il le sentait.  On l'avait brûlé vif pour un vol qui n'avait pas un but mauvais, non, il voulait juste aider sa mère et jouer le héros.

Le corps inerte d'Abubakr gisait sur le sol, l'odeur de la mort empestait. La mère de l'enfant recherchait son fils en vain, elle ne savait même pas que son fils était décédé depuis bientôt cinq jours et que personne n'avait osé enterré le corps ou ne serait-ce qu'appeler les policiers.

La triste histoire d'un enfant qui ne demandait qu'à nourrir sa famille et lui même.

Inspiré de faits réels.

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« L'Humain ne l'est plus. »

Je tiens juste à dire que je ne connais pas la culture nigériane par cœur, que je ne cherchais pas à « humilier » le pays, au contraire, juste à dénoncer ces crimes. L'histoire est bien réel et les faits rapportés ne sont pas inventés sauf pour les noms. Je n'ai pas mis l'image de son supplice car ça pourrait choquer certaines. Qu'Allah protège et bénisse ce pauvre petit bonhomme, Allah Y Rahmo.

@MentalStoique

L'humain ne l'est plus.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant