Chapitre 3

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Sa chute parut très longue à Forêt, et celle-ci envisagea soudainement ne pas se faire prendre comme une possibilité: elle pensa d'abord à, touchant à peine le sol, se retourner et frapper son adversaire, le prenant par surprise, mais l'idée même de devoir faire preuve de force lui semblait impossible, certainement car elle en était complètement vidée. Puis, une deuxième solution lui vînt en tête...

La jeune femme toucha le sol et s'y laissa choir, réprimant un cri de douleur pour feindre l'inconscience. Son poursuivant s'arrêta immédiatement et se pencha sur elle.

L'adolescente sentit son souffle au-dessus d'elle et, tout en s'appliquant à garder le sien lent et calme, tenta d'imaginer la scène: son poursuivant devait à peine entré être dans la vingtaine, incompétent mais plein de bon vouloir et, à ce moment précis, désemparé.

-Qu'est-ce que je vais faire de toi?, se murmura-t-il, il a fallu qu'ils ne me donnent pas de moyen de communication, évidement si je n'avais pas cassé les deux dernières oreillettes qu'ils m'ont donné...

Forêt se retînt de justesse de rire et lutta pour garder son image d'évanouie.

-...et je ne peux pas la laisser là, si elle se réveille et s'enfuit je vais me faire tuer par mes supérieurs, mais en même temps, je ne peux pas la transporter, elle me ralentirait trop et je n'ai rien pour l'attacher. Bon, elle a l'air profondément évanouie, je vais essayer de faire vite.

Forêt manqua de peu d'hurler de douleur quand il la frappa, elle ne s'attendait pas du tout à ce genre de choses. Heureusement, par un réflexe inespéré, elle parvînt à rester stoïque, et la jeune, après quelques minutes passées à surveiller que l'adolescente ne se réveillait pas, partit sans plus de cérémonies, craignant certainement qu'elle se ne réveille.

Après quelques minutes de plus d'inertie pour s'assurer que son ex-poursuivant ne revenait pas, Forêt se redressa vacillante et peinant à croire la chance qu'elle avait d'être tombée sur quelqu'un d'aussi incompétent.

"En même temps si tu avais été plus discrète, rien de tout cela ne serait arrivé!"

Elle décida donc de marcher assez rapidement jusqu'au levé du jour pour mettre le plus de distance possible entre elle et ses poursuivants, mais cette fois-ci en évitant de laisser des traces et en prenant des précautions. Puis elle trouverait à manger, et enfin dormirait, dans un arbre si elle le pouvait.

Forêt se réveilla en sursaut, une douleur vive se répandant dans tout son corps. Le soleil était haut dans le ciel, ainsi que la branche sur laquelle elle dormais jusqu'à présent. Évidemment. Elle jura.

Ce n'était plus là peine pour elle d'essayer de dormir, elle n'y arriverait pas, autant se mettre en marche et essayer de trouver des gens qui pourraient l'aider avec sa mémoire et ces gens qui la poursuivent. Et puis, elle commençait vraiment à avoir besoin de sommeil réellement réparateur et de nourriture suffisante et autre que de graines.

La forêt dans laquelle elle se trouvait laissa bientôt place à une colline d'où l'adolescente apercevait une vallée découpée en champs en contrebas. Au fond de celle-ci, une rivière serpentait paisiblement et une autre colline lui faisait face. Le paysage était idyllique mais Forêt n'y prêtait pas attention: elle ne voyait aucune trace de vie et au-dessus d'elle, les nuages s'amoncelaient, menaçants. En plus de cela, la vallée était complètement à découvert, ce qui signifiait qu'elle serait immédiatement repérée si ses mystérieux poursuivants la retrouvaient.

Elle n'avait aucune idée d'où elle se trouvait.

La jeune femme entama donc la traversée de la vallée, espérant trouver une trace de vie sur l'autre versant de la colline qui lui faisait face.

Après une montée longue et rendue encore plus pénible par la pluie qui tombait maintenant à par gouttelettes fines mais pénétrantes, Forêt se trouva enfin sur l'autre versant.

Son visage s'illumina: en bas il y avait un hameau niché aux pieds de la colline! L'adolescente commença à courir mais se ravisa vite après avoir manqué de tomber trois fois en une dizaine de mètres et dut se résoudre à réfréner son impatience.

Arrivée dans le hameau, elle aurait pu chercher des gens, se rendre à l'unique bar -qui faisait aussi épicerie- ou encore observer la dizaine des maisons et ses habitants, mais elle ne fit rien de tout ça.

Non, peut-être était-ce par empressement, par fatigue ou dû à instinct indéterminé, mais Forêt frappa à la première maison devant laquelle elle passa et, sans attendre de réponse, entra par la porte de derrière, ouverte.

EnfuieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant