Let me dream (VF)

Chapitre 2

Assis dans un fameux restaurant de Tokyo autour de délicieux mets, Finn et moi nous apprêtons à dîner après une longue journée.

- "Bon appétit" dit-il en singeant un accent français.

- Merci Finn, fis-je avec l'esquisse d'un sourire. Mange bien.

Et ce fut les derniers mots que l'on s'était dit avant que, au milieu du repas, Finn reprit la conversation:

- Ah, Sub', ça va faire combien de temps qu'on est ensemble?

Les gens autour nous regardent bizarrement. Il parle trop fort, et tout le monde pense à présent qu'on sort ensemble. J'ai horreur des préjugés.

- Quinze ans.

- Tu comptes même les... deux ans?

Je repose mes baguettes sur le coin de la table. Finn me fixe, il attend ma réponse.

- Pourquoi ne les compterai-je pas?

- Puisque nos chemins se sont écartés pendant ces deux ans, ba~ka!

Il éclata d'un rire tonitruant. Je pouffe et je prend une gorgée d'eau, mais la boisson rafraîchissante n'apaise pas cette sensation, cette question qui me brûle les lèvres depuis toujours, depuis que l'on s'était retrouvés après ces deux années de séparation.

- Qu'as-tu fait, durant ces deux années, Finn?

Mon ami cesse de rire. Il baisse la tête, et soupire, ce qui pour être honnête m'avait intrigué.

- J'étais ce Finn que tu connais aujourd'hui et depuis toujours, tu sais. Et toi?

- J'ai survécu, je réponds simplement avant de reprendre mes baguettes.

On quitta le restaurant une dizaine de minutes après, le ventre plein. Finn était silencieux.

Ce qu'il y avait de particulier dans notre amitié, c'était surtout ce silence qui s'installait de temps en temps, quand Finn était à court de blagues ou quand on avait bien mangé. On se comprenait malgré ça, et le silence n'était pas gênant ou pesant. Finn avait sû s'y faire. Je l'admirais pour ça; aucune autre personne n'a su s'habituer à ma taciturnité.

Finn alla directement se coucher après m'avoir souhaité une bonne nuit. Je me suis glissé dans mon lit après m'être changé puis j'ai dégainé une planche d'en bas de mon lit, des feuilles et ma trousse. J'ai longtemps visualisé cette image avant de me mettre au travail.

Son image me collait à l'esprit depuis que je l'ai vu ce matin. Elle avait un charme, une spécialité, un calme inouï. Et elle était très jolie. À un certain moment, quand j'ai tourné la tête vers elle, elle avait la joue écrasée contre son poing fermé, son coude calé contre une page de son cahier, et elle ouvrait à peine les yeux. Les cours semblaient l'ennuyer. Elle m'avait tellement amusée que j'ai fais des croquis, et je les avais caché dans ma trousse.

Finn, une fois, m'avait fait remarquer ça.

- Sub, m'a-t-il dit après avoir vu des esquisses dans ma trousse, c'est flippant, tu dessines tes futures victimes que tu caches avec tes crayons ou quoi?

Il m'a donné une tape amicale à l'épaule et il a ri. J'ai souri après qu'il ait commenté ça de "spécial".

- J'ai une certaine passion pour les plus infimes détails, j'ai répondu.

Il a fait une blague sur les "détails infimes" juste après. Une blague du genre qui m'aurait choqué si je ne savais pas que c'était juste Finn...

Je prends donc mon plus beau crayon, et je commence à reproduire son nez court, ses délicates lèvres, ses yeux mi-ouverts, sa mâchoire, ses pommettes et sa joue écrabouillée contre de longs doigts fins, rabattus sur la paume et le poignet angulé comme celui d'un violoniste.

Je finis par m'endormir sur ce début, trop fatigué pour continuer.