III.

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Les cygnes ondulent sur l'eau claire.

Dans le cimetière qui touche la façade ouest de l'église, il se promène. Il caresse du bout du doigt le marbre brisé des tombes les plus anciennes, effleure les prénoms et s'arrête pour observer les portraits indéchiffrables.

Il marche au hasard dans ces allées qu'il connaît bien, quand une silhouette penchée l'immobilise à quelques mètres du grand chêne.

Les branches cachent le soleil de fin d'après-midi et leurs ombres s'étendent
en filaments gigantesques
sur les graviers.

Au dessus d'une dalle récente encore propre
se tient un autre homme accroupi.
La poussière tâche ses genoux
et ses mains courent
le long des veines
du marbre.

Toujours immobile, il entend un reniflement étouffé et voit un soubresaut sur ses épaules.

Alors ses pieds crissent sur les pierres, il soulève le vent et défit le ciel ; sa main se pose à côté de celle de l'homme, sur le marbre froid.

Il sent la fraîcheur traverser ses doigts et remonter dans son coude ; puis un regard de braise brûle sa nuque et la peau de ses joues. 

Alors, il parle, en usant du pouvoir des mots.

« elle s'appelait JiHoo.»

L'autre détourne le regard pour lever la tete vers les nuages bas et leur procession de cargo.
Puis il répond, les yeux toujours perdus dans les étoiles invisibles.

« je l'appelais maman.»

La peau de leurs paumes se touchent sur les côtés.

L'arbre se balance.

Les oiseaux tombent.

Le Ciel se noie.

Et respire, grand dieu,

respire.


Il est celui qui croyait pouvoir voler.

Les Oiseaux Voleront | TaeKookOù les histoires vivent. Découvrez maintenant