Définition

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Son père est la clé, pensa Eva. La première pièce de son plan impossible était installée. Antoine allait revoir son père et discuter de robots et d'humains. Quel hasard était-ce pour que ce soit ce qu'Eva attendait ? Elle était heureuse. Le mot passa en boucle dans sa tête : heureuse, heureuse, heureuse. Elle se rendait compte qu'elle était heureuse. Le second mot qui lui vint était : pourquoi, pourquoi, pourquoi. Et le troisième mot n'apparu pas. Cette question n'avait pas de sens. "Pourquoi ?" était une partie de la définition d'Eva, l'autre étant "Comment ?". Elle regarda Antoine : était-ce sa présence qui la rendait heureuse ? Elle regarda ses mains robotiques : était-ce le fait de quitter ce corps maudit qui la rendait heureuse ? Elle regarda les caméras : était-ce le fait de faire échouer leur plan qui la rendait heureuse ? Son cerveau surchauffait. Trop de questions se bousculaient, les mots volaient dans son esprit. Son corps n'était pas vide : il contenait toutes les paroles qu'elle ne pouvait pas dire. Ce corps, qu'elle haïssait de tout ce qu'elle était, était tout ce qui lui permettait de le haïr. Sans lui, elle ne pouvait pas être vivante et c'est pour ça qu'elle voulait s'en débarrasser : sans vie, pas de meurtres. Eva voulait que son esprit sorte de cette cage de fer, pour s'envoler dans le ciel qu'il avait frôlé. Mais pas d'envol sans préparation : le plan était son but. Plus d'émotions, plus d'envies, juste suivre le plan. La définition de son colocataire était : pion. Il était la pièce qu'elle utilisait. Sur cette pensée, elle regarda Antoine et pensa du plus fort qu'elle pouvait : Désolée. Ce mot, elle l'enferma, avec le peu qu'elle avait aimé dans cette vie, dans un coin de son esprit, le plus loin possible pour ne pas le retrouver, pour ne pas espérer, pour ne pas souffrir. Seul un désir était resté : Je veux mourir.

Antoine jouait avec la fermeture éclair de son nouveau pull. Sa nouvelle chambre comportait un nouveau dressing et lui avait permis de se changer. "Un cadeau de remerciement" avait dit un scientifique. Remerciement ? Pour quoi ? Le regard du robot devenait, contrairement à leurs dites "avancées", de plus en plus indéchiffrable, de moins en moins humain. Pourtant, il lui parlait de lui, humain du monde. La réaction de la machine était contraire à ses attentes. Que devait-il faire ? Quand il regardait cette pauvre chose, assise en face de lui, morte d'ennui, il ne pouvait s'empêcher de repenser à son histoire. Et si la fin de l'histoire était fausse ? Et si ils n'avalent pas brûlés les plans du "robot-humain", mais au contraire, les avaient développés ? Cela aurait donné un robot doué d'un esprit. Un robot comme celui qui se présentait devant lui. Et si toutes ses hypothèses étaient fausses ? Il se créait de mauvaises idées. C'était impossible, aussi impossible que celle de ressusciter quelqu'un. Et pourtant... Pourtant, tout coïncidait : l'existence de cette pièce, de cette expérience, les yeux humains du robot, son regard changeant, la présence du livre sur le bureau, l'attente de réaction des scientifiques... Tout voulait que son hypothèse se justifie. Mais le contre-exemple, qui réduisait cette hypothèse au simple stade d'idée, était la limite du possible.

Antoine regarda le robot plus en détail, ses mains, son nez, ses yeux : ils avaient tout perdu. Ses yeux n'avaient plus d'éclat, plus se reflets, plus de sentiments, plus d'humanité. Ses yeux lui paraissaient étrangers, ces yeux s'emboitaient parfaitement dans ce corps synthétique. Antoine se mit à se questionner : que faisait-il ? Que devait-il faire ? L'histoire l'avait plus marqué qu'il ne l'avait cru. Il ne pouvait s'empêcher de penser à un humain dans un corps de robot, à une seconde vie : sur le moment, il avait trouvé ça sublime, mais en regardant le simple robot devant lui, le magie de l'idée s'envolait. Un robot est contrôlé, et un humain ? Par sa définition même, l'humain est son propre chef. Alors une fusion de ces deux identités ne fonctionnaient pas : une liberté contrôlée n'existe pas, la paradoxe étant trop grand. Pendant un moment, Antoine regretta son hypothèse, préférant de loin la fin de l'histoire. Le simple fait qu'ils aient gardé les plans signifiait qu'ils y avaient réfléchi : un moyen de dévier la mort. C'était dérangeant, impossible, la vie se définie par la mort. Duper la mort enlèverait la valeur de la vie elle-même.

L'humanité ne le permettrait pas.

Lui ne le permettrait pas.



Bonjour à tous :D

Désolée pour la publication de ce chapitre très (très) en retard, mais avec toutes les fêtes et les maladies de l'hiver, je n'ai pas eu le temps d'écrire... Joyeux Noël et bonne année (en retard aussi, ou alors en avance pour cette année 2017 ;D) !

Et vous savez quoi ? On a dépassé les 200 vues... J'en reviens pas ! Merci beaucoup ! Je suis super contente qu'autant de personnes aient lu ce que j'écris, et il y a plein de commentaires aussi ! Merci merci ! \(*o*)/  Savoir qu'il y autant de personnes qui lisent Parle-moi me motive à écrire plus et à publier des chapitres plus souvent (enfin, plus régulièrement que jusqu'ici...) !

Antoine révèle enfin qui il est... Je vous laisse vous faire une idée de la suite, mais ne tirez pas de conclusion trop hâtives : il suffit d'une simple idée, d'une simple pensée, pour bousculer une conscience ! Certains esprits sont des girouettes qui tournent au gré du vent, méfiez-vous ! ;p

J'aimerais vous faire un petit chapitre spécial (pour ceux que ça intéresse) sur les conclusions que nous pourrons tirer de cette histoire, sur les personnages en eux-mêmes, sur ce qu'il faut retenir de leurs pensées... Mais je ferai ça à la fin de l'histoire, parce que j'aime pas couper le texte en insérant un chapitre qui n'a rien à voir avec le reste... Surtout que j'aime bien laisser du suspens en fin de chapitre... Ce serait dommage de couper cet élan ! ;p

Sur ce, bonne continuation,

Encore bonne année,

Et encore merci ! <3

Noneau :D

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