Vérité

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Elle le rendait fou, il l'amusait beaucoup. Elle ne cèderait pas, et lui non plus. Une guerre muette, qu'aucun être vivant ne pouvait comprendre. Une guerre, qui s'était déclenchée par une simple question. "Qu'est-ce que t'es". Une guerre déclenchée par l'existence d'une chose vivante et morte à la fois, une guerre déclenchée par l'impossible. Eva menait plutôt une triple guerre : contre Eux, contre Antoine et contre elle. Se battre pour bouger, en voilà une étrange chose. Elle se bat pour se posséder, pour être libre. 

Pour Eva, se battre signifie ne rien faire. Pour Antoine, se battre signifie en faire le plus possible.

Pour Antoine, vivre signifie avoir un coeur qui bat et un cerveau qui fonctionne. Pour Eva, vivre signifie mourir.

La porte s'ouvrit et les jambes d'Eva s'actionnèrent. Antoine n'en revenait pas. Elle ne titubait même pas, même après être restée aussi longtemps sans bouger ses jambes. Alors que lui avait du mal à se lever. Eva s'éloignait de lui et savait très bien où elle allait. Depuis combien de temps était-elle ici ? Depuis aussi longtemps que lui ? Et si c'était le cas, pourquoi ne s'étaient-ils jamais croisés ? Il sortit aussi. Il ne comprenait pas que la société lui permette de se promener librement en pleine journée, et qu'il se fasse attraper le soir pout qu'on l'emmène avec cette Fille. Avant, il dormait où il voulait, et personne ne venait l'embêter. Personne ne le dérangeait et il était aussi heureux qu'il pouvait l'être à passer sa vie à traîner dans un laboratoire. Eva entra dans une pièce emplie de personne et de machines. Le mur sur lequel était la porte de la pièce était vitré et permettait de voir ce qui se tramait à l'intérieur. Tout le monde lui tournait le dos, et était penché sur une table. 

Les moniteurs centraux avaient des câbles reliés à la table, mais Antoine ne voyait pas où ils débouchaient, à causes des scientifiques. Il reconnu quelques visages, des collègues de son père. L'un d'eux se déplaça, et il l'aperçu : la Fille allongée sur la table, toujours cette même expression de neutralité sur le visage, des câbles partant de sa nuque. Un robot. Une femme lui parlait. A quoi cela sert-il de parler à un robot ? La scientifique paraissait exaspérée et énervée. Elle abandonna, et un autre prit sa place. Il bidouilla quelques interrupteurs dans la nuque de la Fille : son expression changeait, passant de sourire à colère. Puis l'expression habituelle revint.

A ce moment, des gardes armés, alertés par la présence d'Antoine sur la caméra de surveillance lui dirent de partir, et Antoine n'eut d'autre choix que de s'exécuter tout en gardant en mémoire ces images de la Fille, les images de son identité. 

Il fit le tour du bâtiment, qu'il connaissait par cœur, pour tenter de reprendre ses esprits. La Fille était un robot. Un robot. Quel intérêt de l'enfermer avec un robot ? Pour voir si leur invention  n'était pas dangereuse envers les humains ? Pour voir si le système "tuer" marchait bien ? Il allait devoir se méfier, mais se cacher ne servirait à rien, ils le retrouvaient tout le temps, et aucun moyen de sortir, son père lui avait coupé toute communication extérieure. Il devait prendre ses distances avec cette machine, tout en l'observant pour découvrir les points faibles. La nuque est un bon début, et peut-être la seule zone sensible du robot.

Le fait de se dire que cette Fille à l'apparence humaine était un robot suffisait a semer Antoine dans le doute, mais les images qu'il avait vues lui suffisaient pour chasser l'idée d'humanité en cette chose. Il devait découvrir son but, et si besoin est, la détruire.

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