prologue

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Il est quatre heures, et je me surprends encore à rêver pendant le cours de math... cette matière m'ennuie tellement. Je martèle doucement la table de mon ongle quand d'un coup, une boule de papier atterrit sur mon bureau. Je regarde autour de moi et vois Mey me faire signe. Je le déplie doucement et lis "tu verrais la tête que tu fais ! Qu'est ce qu'il y a? tu sais que tu peux tout me dire !" je soupire, prends mon stylo surmonté d'une tête de chat, lui réponds "je te le dirais à la sortie des cours...", et lui renvoie le papier froissé. Décidément, on ne pouvait rien lui cacher. Je la vois ouvrir le mot puis se tourner discrètement vers moi en acquiesçant. Le cours passe normalement, puis la sonnerie retentit. 

-Bien ! Nous finirons le chapitre demain ! N'oubliez pas de réviser vos leçons et bonne soirée à tous ! Je range mes affaires le plus vite possible et me précipite en dehors de la classe, pour essayer d'échapper à mon amie, mais elle est plus rapide que moi et me coince dans le couloir:

-Alors ! Ne me dis pas que tu voulais t'en aller ? Mais qu'est-ce qu'il se passe à la fin !

-Et bien... je ... suit-moi. Je la prends par le poignet, l'entraîne en dehors du collège et me dirige vers l'arrière du gymnase. 

-Bon. écoute-moi. Je sens ma gorge se serrer, j-je ne peux pas te le dire ... je ... elle me coupe d'un coup sec et me dit froidement:

-Tu te fiches de moi ? On est amie ! Tu peux tout me dire !

- C'est plus compliqué que tu ne le penses... Je préfère ne pas te mêler à ça...

Elle continue d'un ton plus doux :

-Ça a l'air important.... dis le moi... je te promets que je ne le répéterai pas . Elle me prend doucement par les épaules. Elle insiste encore, je proteste en lui disant que je ne peux vraiment pas, mais elle s'acharne. Je n'en peux plus et finis par crier :

-Lâche-moi ! Je la pousse violemment et continue, je ne suis pas obligée de tout te dire non ? maintenant laisse-moi ! Elle recule, étonnée de me voir réagir ainsi et finit par dire:

-D'accord. Je voulais t'aider mais apparemment tu vas très bien . Excuse-moi d'avoir voulu être gentille avec toi. Salut. 

Ne pouvant plus dire un mot, je la laisse partir, furieuse contre moi-même. Soudain, une voix résonne dans ma tête: 

"C'est la dernière personne qui tenait à toi, et tu l'as fait partir. Bravo." 

 Je plaque mes mains sur mes oreilles pour ne plus l'entendre mais la voix continue: 

"tu es seule maintenant" 

 Je sens mes jambes se dérober et tombe à genoux sur le sol. Je sens les larmes me monter aux yeux .

-TAIS-TOI ! Désespérée,  je me frappe le front comme pour la faire sortir de ma tête.  Après un dernier rire amer, la voix disparaît. Je ne me retiens plus. D'innombrables larmes coulent sur mes joues rougies par le froid, et un étrange sentiment d'angoisse grandit en moi. Je relève la tête et me rends vite compte qu'une vingtaine de personnes se trouvent autour de moi, se bousculant pour me voir et se moquer. Ne pouvant plus supporter toute ces rires , je me relève péniblement, pousse violemment  quelques personnes qui referment le cercle et cours le plus loin possible de cet endroit. Je ne vois pas la route. Mes yeux sont brouillés de larmes et ma tête tourne. Je sens mon corps s'alourdir de plus en plus, mais malgré mon état de faiblesse, j'arrive devant chez moi. Je traverse la cour et une fois sur le pas de la porte,  je me recoiffe, essuie le maquillage qui a coulé et je me regarde sur l'écran de mon portable: "Mince... Mes yeux sont tout rouges... Je ne pourrai jamais cacher ça... Tant pis. J'inventerai une autre excuse..."  Je prends une grande inspiration et ouvre la porte. Je prends ma voix la plus convaincante et crie : 

-Je suis rentrée ! Désolée du retard... J'ai raté mon car et je devais passer chez une amie pour récupérer mon livre de physique ! Je me déchausse et enlève ma veste, avant de pénétrer dans le salon où mon père, mon frère et ma sœur m'attendent . Ils me regardent tous bizarrement. Un silence pesant s'installe dans la pièce. 

- Il est dix-neuf heures Yui ! Et tu vas me dire que tu étais chez une amie ? Tu ne te ficherais pas un peu de nous ? 

Ma mère qui venait de sortir de la cuisine, me lance un regard à la fois rassuré et plein de reproches. Je tente :

-Désolée... Je vous promets que ça ne recommencera pas. Je... Mon père me coupa et dit d'un ton agacé :

- C'est la troisième fois cette semaine ! La prochaine fois tu seras punie. N'en parlons plus. Viens manger. 

- Non merci, je n'ai pas faim... Je... Bonne nuit... Je monte les escaliers et pénètre dans ma chambre avant de m'écrouler sur mon lit. J'entends du bruit en bas. Par réflexe je regarde si ma porte est bien fermée et enfonce ma tête dans mon oreiller. Je ne peux me retenir plus longtemps et laisse  couler mes larmes, le plus silencieusement possible. Les images de cette fin d'après-midi me reviennent en tête.  Je revois le message envoyé par Mey en cours de math, son air inquiet puis sa déception, sa peine et sa colère quand je l'ai repoussée. Je revois aussi toutes ces personnes  autour de moi, rigolant, comme si j'étais une vulgaire bête de cirque. D'un coup, les souvenirs de mes années passées à cacher mon mal-être me reviennent en tête : mes parents encore en train de se disputer, ces faux amis, qui ne perdaient pas une seconde pour se moquer de mes cheveux roux, ou encore de ma peau très pâle... De ces soirées que je passais à pleurer enfermée dans ma chambre, sous prétexte que j'avais trop de devoirs... "J'en ai marre de tout ça... Je voudrais que tout s'arrête... Vivre dans un monde parfait... "  Je repense à mon carnet ou un monde y est décrit dans chaque détail. Du plus petit brin d'herbe à la plus grande montagne, j'ai imaginé un monde entier. Soudainement, je me lève et prends la petite clé qui ferme mon tiroir secret, comme j'aime l'appeler, et le tire vers moi. A l'intérieur, il y a des histoires, des dessins, des citations, des textes écrits par moi-même, et ce fameux cahier. Je le prends délicatement et caresse sa couverture, sur laquelle on peut voir le dessin d'un livre ouvert, d'où sort une lumière dorée.

J'ouvre mon carnet et commence a relire les pages de descriptions, toutes plus merveilleuses les unes que les autres. Il y a là, le détail de chaque jardin, de chaque fleur, de chaque rue... " Je  crois que...  Oui. Je veux vivre dans cette univers". Cette pensée  résonne dans mon esprit. Je ne peux penser à rien d'autre. Subitement, un horrible mal de crâne s'empare de moi. Je lâche précipitamment le cahier et me prends la tête entre les mains. La douleur est tellement vive que je n'arrive plus à bouger. D'un coup, elle devient beaucoup plus forte. Je laisse échapper un hurlement. Je commence à voir trouble. Je n'entends presque plus rien. Je vois ma porte s'ouvrir et se fracasser contre le mur, mon frère entrer en trombe dans ma chambre, puis plus rien. Le noir total.

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⏰ Dernière mise à jour : Jun 12, 2017 ⏰

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