Deux.

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Étendu sur ce lit, je meurs à petit feu. Je ne ressentirai bientôt plus la sensation de dureté du matelas à cause de la rigidité de mon corps. Je ressemble à un mort et j'en serai un dans peu de temps. Je sais que ce sont mes derniers instants ici, et je les passerai seul. Je pourrais prévenir une infirmière mais je ne veux pas de leur fausse compagnie. Ma famille aurait pu être à mes côtés, mais voilà deux semaines déjà que je ne les ai pas vus. Mais je ne leur en veux pas. Mon corps épuisé par la vie a connu des jours plus radieux et je les ai partagés avec eux. Je veux demeurer dans leurs esprits comme l'homme que j'étais avant que la vieillesse ne me ronge lentement. Cette période où mon quotidien se constituait de balades estivales avec ma femme, de sorties culturelles avec mes petits-enfants et de randonnées avec mes enfants. Aujourd'hui, mes pieds ne me répondent plus et les médicaments me contraignent à rester sur place. La vieillesse est plus effrayante que dans les livres. Nos amis tombent un par un et je sais d'avance que peu d'entre les survivants seront capables de se rendre à mon enterrement. Nous sommes lassés de la souffrance et de l'ennui quotidien. Les gens nous oublient et nous demeurons seuls jusqu'à ce que la mort ne vienne nous délivrer. Nous sommes fatigués de nous faire utiliser alors nous restons silencieux et nous sourions car nous savons que c'est bientôt la fin. Et moi je patiente. J'attends d'être cueilli. J'ai des remords et j'aimerais les écrire pour les évacuer mais je n'en ai pas la force. Mes regrets m'accompagneront pour l'éternité car ce n'est qu'au seuil de la vie que l'on comprend que l'on n'a jamais vécu.

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