Elle était.

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Note d'auteur : C'est un texte peu joyeux et parfois dur dans les paroles. Ne vous sentez pas obligé de le lire.
Ça change de ce que j'écris d'habitude mais j'avais besoin de partager ça avec vous. C'est un petit bout de ma vie, qui a fait de moi ce que je suis aujourd'hui.
Ce texte est destiné à être dit à voix haute (lors d'une journée de sensibilisation dans mon ancien collège), ce qui explique probablement des incohérences de français. Bonne lecture 😘

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J'ai toujours été la gentille fille sage, celle que personne ne remarquait. Celle qui avait toujours des bonnes notes et celle qui avait toujours la main levée en classe. Je faisais partie de celles qu'on pouvait détester parce que leurs connaissances étaient à envier. J'ai toujours tout réussi, tout ce que j'entreprenais. J'avais pas beaucoup d'amis, mais le peu que j'avais me suffisait. J'aimais l'école. Ouais, j'étais folle me dirait-on. Mais c'était un moyen de me sentir unique, de rendre fiers mes parents. Je m'investissais corps et âme juste pour voir ce sourire satisfait sur leur visage. Jusqu'au jour où tout à basculé. La petite fille parfaite s'est refermée sur elle même. Elle a cessé de lever la main en classe et elle a cessé de sourire. Une douleur immense à commencé à se propager en elle et depuis, elle ne l'a plus jamais quitté. Mais pour mieux comprendre, laissez moi vous raconter l'histoire de cette fille si parfaite.

Elle avait 14 ans et elle était en troisième. Elle détestait son collège, du moins, ce qu'il était devenu. Ses amis se resumaient à sa meilleure amie et son meilleur ami. Elle en avait peu, mais cela lui suffisait. Le jour de la rentrée, elle était heureuse de se retrouver dans la même classe que sa meilleure amie, parmi tout un tas de gens dont elle ne connaissait même pas les trois quarts. Tout allait bien, elle travaillait bien, continuait de participer en classe, faisant la fierté de sa famille et de ses professeurs. Puis, la petite île paradisiaque sur laquelle elle était à disparue. Au début c'était innocent, du moins c'est ce qu'elle croyait. C'était des moqueries, de simples remarques pas bien méchantes au fond. Puis, les remarques ont commencé à changer de ton. Les insultes ont commencé à apparaître, les moqueries étaient de plus en plus importante. Mais la jeune fille ne voulait pas y croire. "Il n'y a que dans les films que ça arrive, se persuadait-elle. C'est innocent, ca va passer". Mais rien à changer. Ça s'est même empiré. Petit à petit, les insultes se sont transformés en coups. Des coups de coude au début, suivis de "j'ai pas fais expres". Elle répondait par un simple sourire, avant d'oublier. Mais les coups se sont transformés en bousculade. Bousculade dans les couloirs, bousculade dans les escaliers. Elle avait arrêté de compter le nombre de fois où elle s'était retrouvée en bas des escaliers, essayant de ne pas craquer, étalée de tout son long.
Durant tout ce temps, elle gardait le sourire. Mais au fond, elle était dévastée. Elle cessait de lever la main en classe, elle cessait de s'investir dans la vie du collège. Mais elle travaillait. Elle se jetait corps et âme dans le travail pour oublier mais aussi pour ne pas alarmer les adultes. Alors elle subissait. Elle prenait des coups, des insultes. Elle était brisée aussi bien mentalement que physiquement. Elle ne pensait pas que ses bourreaux pouvaient lui faire encore plus mal mais elle se trompait. Un soir, alors qu'elle rentrait chez elle, ils lui ont mis le coup de grâce. Ils l'ont coincé dans un coin, à l'abri des regards. Elle pensait qu'ils allaient la frapper mais ils ne l'ont pas fait. Non, ils ont fait bien pire. Un cigarette, sa peau dénudée... il a fallut une seule fraction de secondes pour qu'elle comprenne ce qu'ils allaient faire. Et elle avait raison. La clope s'est écrasée sur son bras, lui brûlant la peau, lui arrachant des larmes de douleur. Mais elle ne voulait pas craquer, pas devant eux. Alors jour après jour, la cigarette est devenue un rituel. Mais elle ne disait toujours rien. Elle se renfermait de plus en plus sur elle même mais personne ne voyait rien car le jour elle souriait, mais la nuit elle pleurait.
Et puis un soir, elle prit son compas. Son regard passa de l'instrument à son bras. "Après tout, s'est juste pour se défouler, se dit-elle". Alors elle fit une entaille. Une simple petite entaille, hésitante et peu profonde. Mais bientôt, d'autres suivirent, de plus en plus nombreuses, de plus en plus douloureuses, de plus en plus profondes. Et elle continuait parce qu'elle avait trouvé en ça un refuge, un moyen de la faire tenir. Elle était consciente qu'un jour, ça pouvait être l'entaille de trop mais elle s'en foutait. Elle n'était pas suicidaire, nan. Mais juste que si un jour, ça tournait mal, alors elle s'en fichait.
C'était la décadence, la douce descente aux enfers. Chaque jour était plus dur que le précédent. Elle tentait de garder la tête hors de l'eau mais ses bourreaux s'efforçait de la noyer. Mais un jour, ça été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Il a suffit d'une remarque, une seule et elle a dérapé. Avec toute la force physique qui lui restait, elle en encastré un de ces bourreaux dans le mur. Mais bien évidement, quand elle, elle faisait un truc, tout le monde le remarquait. La convocation n'a pas tardé à arriver ainsi que la confrontation avec les parents. Et la, pour la première fois depuis ces longs mois, elle a fondu en larmes devant eux. Depuis ce jour, le lent processus de guérison s'est enclenché.

La fille parfaite a bel et bien disparu, brisée à jamais. Mais elle en est ressorti plus forte. J'en suis ressortie plus forte. Dans mon malheur, j'ai eu la chance de ne pas être seule face à ça. J'ai eu la chance que ma meilleure amie subisse la même chose que moi. Et j'avouerai bien que sans ça, je ne serai pas la aujourd'hui. Meme aujourd'hui, je ne peux m'empêcher de pleurer. Ces souvenirs que je pensais disparu sont encore trop bien ancrés, malheureusement. Je suis devenue une autre personne, plus forte. Je suis devenue timide et je n'ai aucune confiance en moi mais je sais que la guérison est lente. Mais je garde espoir. Il faut toujours garder espoir.

J'écris pour survivre.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant