seule

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Comment...? Quoi...? Je n'ai pas bien compris. Ce déséquilibré me dit que je vivais dans un monde hologramachinchose.
-Holograquoi? Demandais-je. C'est très égoïste je sais et je me déteste pour cela je ne demande rien sur ma famille ou mes amis. Mais je n'en ai pas le courage.
-Ah! Oui! J'oubliais que tu ne connais pas cela. Ton monde n'était pas assez avancé pour connaître ce genre de choses. Ce sont des images en 3D qui se meuvent de façon contrôlée, sans vie et qui peuvent représenter tout ce qui existe au monde.
Je suis perdue.
-Donc. Tentais-je d'une voix mal assurée. Si je résume: durant les seize annees auxquelles se résume ma vie, je n'ai fait que vivre dans un mensonge créé de toutes pièces, en fonctions du caprice d'un nourrisson.
-Si on veut. Me repondit le troisième scientifique le plus naturellement possible.
Une idée horrible me traverse l'esprit. Non ce n'est pas possible. J'ai peur de formuler la question fatidique, de peur que ce cauchemar ne se concrétise et ne devienne réalité...
-Est-ce que cela implique que... Hésitais-je. Les scientifiques me regardent, m'encourageant à poser ma question.
-Est-ce que cela implique que toutes les personnes que j'aime soit aussi... aussi des... des hologrammes?
C'est horrible, rien que formuler ces mots, penser une seule seconde que ce soit vrai. Cela me tue. Ça me fait mal. Je souffre. Je regrette déjà de ne pas être morte durant le cauchemar.
-Tu as tout compris. Me dit le second scientifique, je le regarde avec horreur. Il me sourit, un sourire horrible, celui de quelqu'un qui prend plaisir à dire des choses comme ça, il se délecte de ma détresse, je le vois. Tous les souvenirs heureux passé avec mes amis et ma famille me reviennent en mémoire. Ils sont inexistants, je ne veux pas y croire mais au fond de moi quelque chose se romp. Je baisse la tète, ferme les yeux, et murmure:
-Allez y, faites de moi ce que vous voulez.
Les deux scientifiques me regardent stupéfaits et sortent precipitemment de la salle. Ils reviennent avec le premier scientifique, je ne réagis pas. Tous trois s'affèrent autour de moi. Ils m'installent des capteurs (Si j'ai bien compris) sur tout le corps. Me disent des choses, je ne les entends pas, je ne les entends plus. Tout tourne autour de moi, la phrase passe en boucle dans ma tète " Tu as tout compris..." cette phrase qui a confirmé mes craintes. Ils sont morts... Non! Ils n'existaient pas. Une petite décharge électrique me ramène à la réalité. Les scientifiques sortent, je sens le courant passer dans les câbles et entrer dans mon corps. J'ai l'impression que je vais éclater, je suis secouée de violents spasmes tandis qu'une dose colossale d'électricité est injectée dans mon être. J'ai mal, chaque particule de mon métabolisme est à la torture. Je me cambre sur le sol, pendant que j'etais dans mes pensées ils ont dû me descendre du siège. Mon corps se secoue dans tous les sens.
D'un coup le décharge s' arrête, je me fige, mes larmes coulent, j'ai mal. Ils n'existaient pas! Mon cri s' est stoppé net en même temps que mes spasmes et que l'électricité, comme suspendue dans le temps. J'ai mal. Je souffre. Si seulement j'etais morte durant mon cauchemar... Les scientifiques me ramènent dans ma cellule, je n'ai même pas la force de me lever, chaque parcelle de mon corps me fait souffrir le martyr. Mais ce n'est rien par rapport à mon état mental. Je suis déchirée, brisée, seule ; je suis morte. Mes amis ne sont plus là, mes parents ne vont pas venir me chercher... Les jours se suivent et se succèdent. Rythmés par les tests et les moments où je peux me reposer. Je suis seule, éternellement seule. Je ne me nourris plus, à quoi cela sert? A rien, ils n'existent pas, ils n'existent plus. Plus rien ne me retient dans ce monde.

***********

Encore un fois, je me fait à nouveau électrocuter, une fois de plus. Apparemment ça sert à enregistrer des données sur les émotions ou je ne sais pas trop. Je ne suis plus que une coquille vide. Mon esprit tente en vain de se détacher de mon corps, s'enfuir de cette réalité plus que horrible. Mettre un terme à cette vie vide de sens. Ah! Enfin! Je la vois! Cette fin tant attendue. Je veux mourir. Mes amis, papa, maman, ils n'existaient pas, même dans la mort je ne les retrouverai pas, mais je trouverai peut-être le calme, la paix. J'ai du mal à croire à une existance autre. Sans douleur. Sans souffrance. Mais hélas seule à jamais. Il n'y a aucun échappatoire je m'en rend compte maintenant. La mort n'est qu'un baume sur ce cœur en lambeaux qui bat encore. Je le sens lâcher. Enfin il daigne me laisser en paix. Je sens, malgré l'électrochoc, mon corps se refroidir, la vie le quitter. Je laisse échapper une larme. Je ne suis pas triste au contraire. J'acceuil cette nouvelle arrivante avec un soulagement et une joie démesurée. Je sens l'électricité lâcher mon corps. C'est la fin, mes membres s'arrêtent de bouger. Mes muscles se détendent, ma vue se brouille. J'entends au loin les scientifiques accourir mais je ne m'en préoccupe plus. Je meurs. Ma conscience s'efface,et je sombre dans le gouffre de la délivrance sans opposer de résistance à la mort qui m'emmène. Je pense une dernière fois ancêtres qui vivent au fond de mon coeur. Je me dis que eux n'étaient pas humain mais qu'ils avaint plus d'humanité que les trois scientifiques que j'ai connus, les trois seuls humains avec qui je suis entrée en contact.

Voilà bien longtemps que les êtres chers à mes yeux ont disparus. Voilà bien longtemps que je subis les experiences et endure une souffrance telle que j'en suis parvenue à vivre dans l'espoir de mourrir. Durant ce lap de temps j'ai vécu comme une poupée entre leurs mains. Mais je suis heureuse, c'est la première fois depuis un an. Je suis heureuse car je meurs. Adieu monde, vis ta vie et oublie moi, moi cette jeune fille qui suis née seule, qui ai vécu seule, et qui suis morte seule. Mais ai-je seulement vécu? Suis-je vraiment morte? Est ça l'éternité?

J'ai 16 ans et 365 jours, demain j'aurais 17 ans et aujourd'hui je meurt.

Le chant du corbeauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant