Louise

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Il n'entend presque plus les vagues. Sa voix, douce, grave, vibre à travers le vent, cette chanson qu'elle fredonne les pieds dans le sable s'élève jusque loin autour d'elle. C'est encore Louise qui se perd sur la plage, son habituelle robe azuré à volants blancs, ses longues mèches cannelles qui valsent sous le mistral, cette touche parme sur ses lèvres qu'il parvient toujours à discerner malgré la distance.
Il est 18 heures, et cette fois encore, il est sur son banc. La brise a dissuadé les baigneurs, découragé les promeneurs, il n'y a plus que sa Louise et sa chanson.

Aujourd'hui encore, il la regarde animer le coucher de soleil de ses va-et-vient, son ombre donnant vie aux vagues qui viennent mourir à ses pieds. Silencieux, discret, il se croit invisible, spectateur d'un film au cinéma, incapable de contrôler les scènes qui défilent sous ses yeux. Sa place n'est pas dans ce tableau, car c'est celui de Louise. Celle elle qui sous ses airs taquins donne du caractère à l'oeuvre, ses soudains regards pleins de malice ravivant brusquement l'orange vif du ciel qui se couche. La colombe de sa robe tourne et s'envole, ses cheveux balayent le temps, sa bouche embrasse la nuit, ses murmures font rougir la lune.

Et bientôt, sur une longue et dernière note, Louise finira la toile.
On n'entendra alors plus que le bruit régulier des vagues, les faibles cris du vent, et ces mêmes mots prononcés depuis ce banc.

— Un chef-d'œuvre, souffle-t-il. Un chef-d'œuvre...

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