Mort en l'île

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Sujet : Je vais faire court, cette fois-ci je ne peux pas marquer le sujet exact. Donc, pour cette rédaction il fallait écrire la suite de la nouvelle "Mort en l'île" de Didier Daeninckx il me semble.

Nouvelle donnée de base :

"Il ne fait pas beau. Le professeur Schwartzenberg ne peut pas dire quand on arrivera à soigner le site. La Marie-Pervenche est repartie à vide pour Amsterdam avec l'un des petits de mon épagneul. En ce moment des ouvriers plantent des panneaux blancs à l'entrée du chemin. L'homme à vélo, le rouquin, est revenu dans les buissons faire ses saloperies. Cette nuit un camion a déchargé des gravats et du matériel près de l' ancien ponton d'avitaillement. J'ai récupéré un ventilateur de bureau presque neuf... "
   Mireille posa son crayon sur le cahier humide et leva la tête. Le deux-tons strident de la voiture de police couvrait la rumeur de l'île. Elle tira la toile cirée au-dessus du trouble et attendit, dans le noir.
  Le camion traversait le pont de Saint-Denis, traînant dans son sillage une épouvantable odeur de charogne. Il vira vers la gauche, sur le quai, et dépassa la centrale béton. Les portes métalliques de la fabrique de produits de beauté étaient grandes ouvertes. Le chauffeur manœuvra pour placer son bahut à cul, près de la fosse. Le piston de la benne scintilla au soleil. La cargaison d'os, de viandes pourries, de vermine glissa sans bruit tandis que s'abattait le vol de mouette affamées. La voiture des flics fit un écart pour éviter le museau du camion qui mordait sur l'ancien chemin de halage. Elle reprit de la vitesse et fila le long des entrepôts du Printemps. Les arches inclinées du palais des Sports de l'île des Vannes bornaient l'horizon.
  Dix minutes plus tôt un pêcheur avait découvert un corps, à cinq cents mètres de là, au bas du quai opposé qui donnait sur les chantiers navals Van den Broucke de Villeneuve-la-Garenne. Il descendait sur les amas de terre, de pierres, de goudron qui subsistaient à fleur d'eau après l'effondrement de la berge, pour trouver un coin tranquille. Il était occupé à disperser les ordures flottantes, les bouteilles, les couches, les cartons quand soudain son bâton s'était pris dans un vêtement. Tout d'abord il avait cru qu'il s'agissait d'une chemise, d'une veste gorgée d'eau... Il avait insisté, saisissant le bout de bois à deux mains. Le profil de l'homme, sombre, visqueux, était apparu à la surface, crevant la pellicule huileuse, puis la nuque, une épaule...
Le pêcheur se tenait debout devant le porche de l'ancien garage à bateaux, son matériel posé contre le mur, en compagnie d'un marinier qui l'avait aidé à tirer le cadavre au sec. L'arrière des entrepôts projetait son ombre sur les lambeaux de route. Plus loin, à l'amorce du chemin, une énorme pancarte, lettres rouges sur fond blanc, annonçait l'avenir :

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Société d'aménagement
Des berges de la Seine

Construction d'un terrain de golf
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  Les flics se garèrent au travers de la route pour en interdire l'accès aux curieux. Le conducteur, un jeune type assez gras au visage poupon, se dirigea droit sur les deux hommes, les apostrophant d'une voix mal assurée.
_C'est vous, qui nous avez téléphoné ?
  Son collègue, un vieux flic au front plissé comme un soufflet d'accordéon, descendait déjà vers le fleuve, plantant avec précaution ses chaussures dans la terre meuble, se raccrochant aux herbes, aux branches. Il atteignit le cadavre.
  Les deux hommes s'étaient contenté de le tirer à eux, et il conservait la même position que dans l'eau, allongé sur le ventre, les bras levés de chaque côté de la tête, les jambes écartées. Les os du policier craquèrent quand il s'agenouilla. Il sortit une paire de gants blancs de sa poche de blouson et les enfila tout en observant les différentes traces laissées par les promeneurs au flanc de la berge. Il agrippa le corps par l'épaule, des deux mains, et le retourna. Un homme d'une cinquantaine d'années, au visage massif, ouvrait les yeux sur la mort. Une place profonde, nettoyée par la Seine, laissait voir l'intérieur du tuyau du cartilage qui gonflait son cou. Le flic piqua du nez et respira longuement. Son collègue l'observait, deux mètres plus haut.
_Alors c'est quoi ?
Il se redressa et plaqua son index tendu sur sa pomme d'Adam.
_Tout juste si la tête tient aux épaule ! Appelle le fourgon, qu'ils viennent avec la bâche...
  Il ferma les yeux du cadavre avant de procéder à l'inventaire de ses poches : un paquet de gauloises entamé, une pochette d'allumette, une carte de téléphone, une clef de verrou sans numéro et roulés en boule, quelques tickets de PMU, des enjeux-hippodrome pour la nocturne de la veille, à Enghien. Le 5 et le 7, écurie gagnante dans la seconde course.
  Les policiers enquêtèrent dans tout le quartier, interrogeant les riverains, téléphonant aux mariniers en voyage, dressant la liste des habitués des champs de courses, relevant les empreintes de pas, de pneus, analysant les conclusions du médecin légiste.

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