Heather gisait sur son lit, les mains croisées sur son abdomen. La journée précédente avait été une véritable catastrophe. Boone et Amber n'étaient partis que tard dans la soirée, laissant un goût amer dans la bouche d'Heather. Il fallait dire que l'habileté d'esprit d'Amber lui avait permis de soutirer des informations à sa mère. Et par informations, elle entendait bien sûr petits secrets de famille, gênants à souhait, que la Princesse ne manquerait pas de faire partager à l'ensemble de la classe.
En y repensant, Heather soupira longuement, las de sa malchance infinie. Peu à peu, la disparition d'Alice s'éloignait de son cœur, y laissant une immense cicatrice, qui n'avait pas fini de guérir. Cependant, des tourments habituels recommençaient à prendre possession de son esprit – jusque là accaparé par la mort de son amie. Heather pensait de nouveau à son travail pour la semaine suivante, aux cours qu'elle devrait rattraper... Tant de petits tracas sans importance qui lui permettaient de reprendre en main le cours de sa vie. Bien entendu, Heather était tout sauf rétablie, et seul le temps lui apprendra à vivre avec sa souffrance.
Elle ne sortait quasiment jamais de sa chambre, et ses rideaux restaient toujours tirés, ne permettant que l'infiltration d'un léger rayon de lumière, trop faible cependant pour illuminer sa sombre caverne.
Un bref coup d'œil oblique permit à Heather de reprendre un repère temporel : il était sept heures neuf, et on était vendredi. Sa mère l'avait convaincue la veille d'éteindre son réveil, afin de se reposer. L'habitude avait cependant réveillé la jeune fille, et ce un peu en avance. Dans une minute, le réveil devrait sonner. Enfin, si tout était comme avant...
Heather s'étira longuement et se rallongea sur le dos. Elle regarda à nouveau la fissure dans le plafond, cette même fissure qu'elle observait depuis qu'elle avait désamorcé son horloge. Le battement incessant des secondes avait commencé à l'inquiéter. Ces minutes qui lui avaient servi d'accroche l'avaient mise mal à l'aise.
Donc elle s'était raccrochée à la fissure. Cette dernière était silencieuse et immobile. Elle lui rappelait qu'il y avait bien eu une brisure dans sa vie ; mais la fissure, silencieuse et immobile, se contentait de vivre au dessus d'elle, comme elle l'avait fait depuis ses débuts. Car la fissure avait un début et ce début ne changerait pas. Pour Heather, cette brisure représentait son souvenir de l'avant. Son après serait sans Alice, et c'était tout.
Quelque minutes passèrent sans qu'elle ne bouge d'un cil. Heather entendait son père dans la cuisine qui s'affairait autour de la table, prêt à partir au travail. Son frère, lui, avait déjà quitté la maison. Des bruits de pas dans les escaliers attirèrent l'attention de la jeune fille ; ils étaient secs et rapides, et elle reconnut rapidement la démarche de sa mère. Mais cette dernière avait pris l'habitude de marcher bien plus doucement pour aller voir sa fille depuis que son amie était morte. Son pas était devenu doux et hésitant.
A ce moment là, la démarche de sa mère n'avait plus rien d'inquiet ni de triste. C'était une démarche normale, hâtive, ordinaire.
La porte s'ouvrit soudain à la volée, et sa mère entra précipitamment, allant ouvrir les rideaux en premier lieu. Surprise, Heather mit un peu de temps à s'habituer à la luminosité.
« Heather, qu'est-ce que tu fabriques bon sang ! Ton réveil n'a pas sonné ou quoi ? Tu as cours dans quarante cinq minutes ! »
Hébétée, l'adolescente ne répondit rien. La mémoire de sa mère lui faisait-elle défaut ? Ou bien était-ce encore une des méthodes miracle du médecin pour faire oublier sa souffrance à Heather ? Elle s'assit sur son lit et tenta de réfléchir. Et si... et si tout n'avait été qu'un rêve ? Soudain revigorée, elle se tourna vers sa mère, légèrement hésitante.
VOUS LISEZ
Error 410
Mystery / ThrillerLa vie est comme un jeu. Chaque matin, on se réveille et on affronte les épreuves correspondant à notre niveau. Puis il y a les bugs. Les bugs modifient le quotidien, et parfois, ils font en sorte qu'on subisse des épreuves plus difficiles que celle...