Les arbres aux troncs sombres défilaient doucement devant mes yeux, un insupportable grondement me faisait tourner la tête et les odeurs humaines, animales et de l'humus recouvrant le sol me donnaient la nausée.
Je me redressais et m'assis sur le sol de bois, l'endroit ou je me trouvais était en mouvement et, si je n'y prenais pas garde, je venais me fracasser le crâne sur le plafond qui n'était pas bien haut. Je remuais la tête pour me remettre les idées en place et une goutte de sang vint éclabousser mes mains, on m'avait asséné un grand coup juste au dessus de la tempe droite, le liquide écarlate qui s'échappait de la plaie avait coulé le long de ma joue. Une gerbe de poussière me fit éternuer quand je me mis en tailleur pour me réveiller complètement. Levant les yeux vers la petite fenêtre qui trônait sur le mur de ce qui semblait être une cage... de bois qui plus est.
J'attrapais les barreaux et regardais dehors; une foret lugubre, des arbres presque noir, un sol pourri dont émanait une désagréable odeur, un brouillard épais qui gâchait la vue et le bruit incessant de roue qui dérape sur la mousse humide. Couplé à ce décor sordide, l'absence de la lune plongeait chaque parcelle découverte dans l'ombre, offrant un camouflage parfait à ceux qui saurait se repérer dans cette obscurité presque totale. Je fis un bond pour atterrir de l'autre côté de la cage et regarda à travers deux planches; j'aperçus une forme mouvante à l'avant du charriot sur lequel était fixé les quatre murs qui me servaient d'enclos, ce n'était pas un cheval mais une sorte d'énorme loup à la fourrure noire: un Shadaï. Environ 1m70 à l'encolure, soit ma taille, pour pas loin de 90 kg, une très belle bête, domptable mais très agressive si elle n'a pas eu son quatre heure, ne refusant pas un bon festin constitué de chair humaine. Autant dire que je préfère éviter de me frotter à lui! Il y en a un deuxième.. J'allais devoir être plus que prudente si je ne voulais pas finir dans leurs estomacs.
Et pour gérer ces deux Shadaïs, il y avait deux hommes à l'avant, assis une banquette de bois. J'entendais leurs voies, graves et chargées d'angoisse, ils empestaient la peur. En même temps... ils se retrouvaient seuls dans une foret en pleine nuit, qui plus est avec ce qu'ils qualifiaient de monstre: moi.
Pourquoi dit-on que je suis un monstre? Car je suis différente. Une créature qui n'hésiterai pas à tuer de sang froid pour sa survie. Un déchet que l'on pourrait jeter n'importe où, n'importe quand.
On me traque, on me pourchasse, on veut me tuer, me faire endurer les pires souffrances, m'emprisonner, me bayonner, me noyer, me fusiller, m'étrangler, m'égorger, me torturer et me faire comprendre que je n'ai rien a faire dans ce monde. Ont-ils une raison? Peut-être bien... ou peut-être pas. Je ne cherche pas à le savoir, mon seul but est de retrouver qui je suis et d'où je viens.Je fis en sorte que personne ne remarque le fait que je sois réveillée, ils deviendraient beaucoup trop méfiant et tous mes espoirs d'évasion s'envoleraient! Enfin... sauf si je me bat.
Je regardais autour de moi, les planches qui constituaient les murs n'étaient pas très solide mais suffisamment pour qu'elles fassent du bruit si je les brisaient. Mon seul moyen de sortir était le sol de cette petite cage, le bois y était plus humide, cela devrait permettre d'étouffer les sons.J'attrapais le poignard qui reposait dans son fourreau, à ma ceinture, et enfonçais la lame entre deux planches tout en faisant des mouvements circulaires pour les arracher. L'une des deux se brisa avec un son faible, cependant ce n'était pas suffisant pour que je puisse passer, il me fallait en enlever une autre. Ce que je fis, non sans mal. Enfin je pus m'extirper de cette cage par le trou que je venais de former. Je passais d'abord mes pieds et dus me tordre pour rester la plus silencieuse possible. Le sol spongieux et froid me fit frissonner à son contact. Je restais un moment en "araignée" en attendant que la charette ne me passe au dessus, retenant mon souffle, le sang battant aux tempes. Je ne bougeais pas avant qu'ils soit à plusieurs mètres de moi et me relevais lentement, les muscles endoloris. Je sursautais quand la voix d'un des hommes me parvint après que je me sois mise à l'abri de leurs regards.
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Apologie d'une Impure
FantasyJe ne perçoit pas de lumière. Je ne perçoit pas d'ombre. Je me trouve dans le clair-obscur d'un monde sans âme, née entre deux astres qui s'opposent. Ma vie n'est que poussière d'écorce, mon existence une tempête irrationnelle et mon destin promis...