I. L'autre Rive - Ava

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"Ava ... Tes cheveux sont magnifiques aujourd'hui. Je ne me lasserais jamais d'observer leur éclat, leur brillance. Tu es mon soleil... Je t'aime"

Sueurs froides, souffle coupé, tremblements, palpitations, douleur à la poitrine, nausée constante sans oublier cette peur qui me suit partout, celle de devenir folle.

- Ava ?!!! Quand est-ce que tu pars déjà ? lance une voix aigu.

Je lève la tête de mon journal. Une ombre se forme à l'entrée de ma chambre. C'est Lee ma colocataire son visage souriant et ses cheveux roux en bataille sont les seules choses qui me donnent envie de me lever chaque matin depuis "lui". Son visage m'interpelle. Je ferme mon journal d'un claquement de porte et soulève la lourde couette qui me retient prisonnière toutes les nuits sans que je puisse dormir paisiblement. Je suis vêtue d'un banal pyjama blanc. Mes longs cheveux ébène tombent en cascade sur chacune de mes épaules, ils sont gras et je vois déjà le temps que je vais prendre à les démêler. Je suis debout de marbre face au visage interrogateur de mon amie.

- Bon alors tu me réponds ? m'interroge t-elle à nouveau, les sourcil levés.

Je prends une bonne bouffée d'air, pour finalement la relâcher en un soupire d'anéantissement.

- Hé Ava ? Répond-moi ! Je dois aller bosser et j'aimerais savoir quand est-ce que l'appart va être vide pour inviter mon copain à dormir !

Cela fait seulement six mois que je suis revenue dans ma chambre, j'en ai passé la moitié dans mon lit et l'autre devant la télé. Je n'ai plus aucune envie de faire la fête, de m'amuser, de boire comme quelqu'un qui a vingt ans. Je ne peux pas refaire surface comme si de rien était et reprendre ma vie d'avant, car ne n'est tout simplement plus là même. Je suis choquée face à cette situation, démunis. Je n'ai même pas essayé de chercher, Lee a fait son possible pour me sortir de ma torpeur, me faire découvrir un autre monde. Mais elle n'a eu aucun effet et a finalement abandonné en me gueulant à la figure: "Écoute Ava je peux pas t'aider si t'en as pas envie, tu veux mourir et bien suicide toi si ta tellement envie, si tu trouves ça essentielle, moi j'en ai marre de passer pour une conne alors, sois tu te bouges le cul soit tu meurs ici ! Je te laisse choisir..."

Je crois que pour l'instant j'ai plutôt choisi la deuxième option.

- C'est plus possible de vivre comme ça, il faut que tu me répondes merde ! gueula-t-elle les larmes aux yeux de voir la fille qu'elle connaissait si bien auparavant, cette fille avec qui elle avait tout vécue, de la voir inerte, sans vie, voir morte préalablement

Je lève mes yeux vers elle, une réponse va bien sortir de cette satané bouche, mes cordes vocales vont tinter pour produire un son, pour communiquer, parler... Mais c'est trop tard elle est déjà partie le visage rougis par les larmes.

- Lee ... avais-je réussis à prononcer, mais elle ne m'avait pas entendue.

Je me laisse tomber sur mon lit également en pleurs. Que m'arrive t-il ont m'avait pourtant dit que j'étais guérie, que certes ça prendrait un peu de temps, mais je n'avais jamais pensé que ce serait aussi compliqué. Chaque jour, je me dis: aujourd'hui, aujourd'hui je vais y arriver je vais me relever. Mais toutes ces choses restent bloquées en moi, elles me grignotent de l'intérieur et je n'y peux rien.

Enfin c'est ce que je ne cesse de me répéter. Tout le monde sait que ma vie dépend de moi et de ce que je souhaite. Mais moi je veux quoi au juste. J'ai vraiment envie d'une nouvelle chance ?

J'avais toujours imaginé une île, un endroit où toutes ces horreurs auraient peur d'aller. Un endroit où je serais en sécurité où je vivrais simplement. Seulement cette île se trouve de l'autre côté, à l'autre rive et moi je suis au milieu, dans cette eau glaciale. Je stagne là. J'en ai plus qu'assez.

- Ava j'y vais ! Je rentrerais tard ce soir ! envoya-t-elle plus paisiblement avec ce nœud de douleur dans la gorge.

- D'accord... réussi-je à lui dire

La fermeture de la porte s'arrêta l'instant de quelques secondes pour écouter ma réponse avec attention puis continue son chemin pour finir dans un claquement. Aujourd'hui allais être une bonne journée. Je sort un pantalon en lin de mon armoire et un débardeur blanc dont l'inscription "LIFE" résonna comme un cri dans mon esprit. Je pris également des sous-vêtement blancs en dentelles et entra dans la salle de bain. J'avance jusqu'au miroir du lavabo laisse tomber mes habits sur un tabouret et me dévisage longuement. J'ai pris dix ans en seulement six mois. Des cernes violacés pendent sous mes yeux, ma peau est pâle et rêche, mes yeux sont sans vie. Plus aucunes émotions n'habitent mon corps. C'est lorsque je dépose ma main sur ma joue que je le vois, le sens, ce contact, lui me caressant ma joue de sa main, glissant une mèche de cheveux rebelle derrière mon oreille, essuyant mes larmes. Lorsque je la retire c'est comme une claque. J'observe de nouveau mon visage inexpressif. J'allume le robinet et me passe de l'eau gelée sur le visage. J'ôte les habits qui me pèsent et pénètre dans la douche. Je laisse l'eau tiède réchauffer mon corps, je me frotte énergiquement comme si ces simples pressions pouvaient me réactiver.

En sortant j'enfile rapidement mes habits et repasse à nouveau devant le petit miroir mal éclairé. Mon visage est toujours aussi sombre, j'essaye de plisser les coins de mes lèvres pour former ce que l'on appelle un sourire, mais je fonds en larme. Un goût salé entre dans ma bouche, je souris. J'essuie mes larmes du dos de mes mains et regarde une dernière fois mon sosie dans ce bout de verre. Je sors de la salle de bain pour longer le couloir, laissant glisser ma main sur le mur. J'arrive dans la petite pièce à vivre. Mes yeux se dirigent instinctivement vers la lumière de la baie vitrée. Je l'ouvre dans un cliquetis assourdissant et met un pied dehors, puis mon corps tout entier. Un courant d'air vient balayer mes cheveux encore humides et me faire frissonner. Je me penche sur le balcon et observe la circulation des voitures, des piétons... C'est ça la vie n'est-ce pas ? Mais ....

Ne me suffirait-il pas de plonger pour la rejoindre ?

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Voilà c'est la fin de ce premier chapitre, n'hésitez pas à me faire part de vos avis, ils m'intéressent !!!

Le Dimanche des JonquillesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant