La clef

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- Debout, princesse, ton fiancé t'attend.

Mary ouvrit doucement des yeux fatigués. Le soleil était déjà bien haut dans le ciel de mars.

Elle se retourna vers Edward qui l'avait réveillé.

Il faisait sa toilette avec une bassine d'eau froide. Elle ne voyait pas son visage mais percevait un albatros les ailes déployées, volant devant l'horizon, tatoué sur son biceps gauche. Elle quitta le lit et posa ses mains sur les épaules de son amant.

- Bien dormi ? chuchota-t-elle.

Teague sourit.

- Mieux que la plupart du temps.

Elle l'embrassa dans le cou et s'écarta un peu.

- Tu devrais prévenir ton fiancé avant que la mère supérieure s'en charge tu sais.

- Je sais... Mais je me vois mal arriver chez avec ça, répondit-elle en montrant la robe de nonne.

- Va demander une tenue à Suzy, elle doit bien en avoir quelques unes en plus.

La jeune fille acquiesça et descendit retrouver la serveuse qui nettoyait les tables de gros bois imbibées d'alcool. Elle lui posa la question faisant sourire la femme. Outre ses décolletés plongeant et ses robes un peu courtes, Suzy était une femme sobre, simple et joviale. Elle lui offrit volontiers une robe de lin mauve et un corset noir que son mari, Peter, le colosse borgne du comptoir, lui avait donné à l'occasion de leurs fiançailles et de l'ouverture de l'établissement. Elle ne pouvait plus la porter depuis ses quatre grossesses. Elle l'obligea à avaler un copieux petit déjeuner avant de partir avec Edward.

Ils arrivèrent à la demeure des Beckett, en début d'après midi, dans une petite voiture discrète. Seul James les accueillit, son père étant en train de diriger des opérations militaires dans la baie de Plymouth.

Il fit entrer rapidement sa fiancée, qu'il toisa surpris par sa tenue, et le garçon qui l'accompagnait, son homme de main, non sans lui avoir lancé un regard méprisant.

Une fois installés dans le salon, Mary entama la conversation.

- James, j'ai besoin de votre aide. (Elle croisa le regard d'Edward) J'ai eu un problème au couvent... et à présent je suis certainement poursuivie...

- Qu'est-ce que vous avez fait ? La coupa-t-il froidement.

- Elle s'est défendue seule, vu que personne ne l'a aidée, contra Teague.

James se tourna vers lui extrêmement raide.

- Je ne vous permets pas de souiller mon honneur en plus de souiller ma demeure, pirate.

Teague se leva, James ne faisait clairement pas le poids face à la carrure du jeune homme.

- S'il vous plait les garçons... tenta Mary.

- Qu'il mette son misérable orgueil de plébéien de coté alors.

- James, pourriez vous m'aider s'il vous plait ?

- Oui, vous le savez pertinemment, capitula le bourgeois. De quoi avez vous besoin ?

- Un endroit où vivre en sécurité jusqu'à notre mariage, si vous ne brisez pas nos fiançailles.

- Bon.

James se leva, alla chercher une clé dans le secrétaire.

- Ceci est la clé d'une maison en dehors de la ville, près de la mer. Mon père et moi n'y allons que quelques semaines par an à cause de nos affaires sur Plymouth.

Il prit une feuille et griffonna une adresse dessus.

- Est-ce que le cocher sait lire, réfléchit-il tout haut.

- C'est bon je m'en occupe, répondit Teague en prenant le papier.

Il sortit rapidement, criant déjà des ordres aux cochers. James s'assura que sa fiancée et lui étaient bien seuls et se rapprocha d'elle lui prenant les mains soyeuses de la jeune fille dans les siennes chaudes et puissantes.

- James, vous êtes sûr ? Si votre père venait à apprendre...

- Je m'assurerai personnellement qu'il n'en sache rien, ne vous inquiétez pas.

Il retourna les mains blanches, lavées de toute souillure, entre les siennes.

- Elle sont aussi douces que le jour de notre rencontre, remarqua-t-il.

- Vous n'avez aucune idée de ce qu'elles ont dû vivre pourtant, soupira tristement Mary.

- Et vous, avez vu une idée de pourquoi je fais cela ?

Il lui prit les coudes, les mains de la jeune fille se posèrent naturellement sur ses avant bras. Il restèrent silencieux un instant.

- Si vous partez maintenant, vous aurez une chance d'arriver avant la nuit avec votre homme de main.

- Très bien. Encore merci pour tout James.

Elle se hissa sur la pointe des pieds et l'embrassa de la même manière qu'il l'avait fait quelques années plus tôt. Elle sentait les secondes s'étirer. Elle s'écarta, le regarda et sortit rejoindre Edward.

Ils arrivèrent le soir même mais Mary ne put se rendre compte du décor que le lendemain matin.

La maison était plus petite que les habituels hôtels particuliers qu'elle avait habité, plus cossue aussi. Agrippée au sommet d'une falaise, elle faisait fièrement face aux assauts des embruns. De nombreux oiseaux marins nichaient non loin de l'habitation.

Edward veillerait sur elle. Il lui avait promis. Tout semblait si futile de cet endroit. Elle avait l'impression que sa vie lui appartenait , qu'ils étaient enfin libres. Le jeune homme détruisit tout cela.

- Mary, tu ne comprends vraiment rien. Tu t'es juste enfermée dans une cage doré avant qu'on te cueille pour te passer la bague au doigt.


Pirates des Caraïbes : Pirates' LoveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant