Chapitre 9 - A coeur ouvert

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10 Avril 2301
(4 jours après le précédent message)

Le temps est éternel, j'ai l'impression que chaque jour dure des mois entiers comme si nous revivions tout le temps la même journée et les mêmes choses. Tout le monde se lève aux alentours de 8 heures quand le soleil fait ses premières apparitions dans le ciel, Daniel est la plus part du temps levé en premier avant même que la lumière tape la tour, Nico, Sara et moi sommes les suivants puis vint Mélanie. Elle n'est pas du genre à se lever tard habituellement mais depuis son agression et le départ de son frère, elle passe de très mauvaises nuits et se rattrapent donc le matin, je pense que le bruit la rassure, elle se sent moins seule. Puis elle sait qu'elle peut compter sur nous, on ne la laissera pour rien au monde, surtout en ces temps assez durs pour tout le monde. Je remarque que c'est la première fois que je la vois aussi vulnérable, elle qui d'habitude a toujours la tête sur les épaules. En même temps cela se comprend, c'est pas facile de se séparer si soudainement de son frère jumeau. C'est le dernier membre de sa famille qui lui reste, d'ailleurs je pense que tout le monde ici l'a perdue, sa famille. Moi y compris. En même temps je ne considère plus ma famille comme telle depuis mes 18 ans. Pourtant ma vie avait très bien commencé, je n'avais pas du tout à me plaindre : des parents aimants, des grands-parents généreux aux anniversaires et aux fêtes et un grand frère avec qui je passais toutes mes journées. Enfin cela c'était jusqu'à ma majorité. " Joyeux Anniversaire Dimitri " me disaient-ils. C'était du vent oui, à travers ces mots ils voulaient plutôt dire " C'est l'heure de partir ". En effet, ma famille ne voulait plus de moi. Enfin je ne sais pas si elle avait déjà eu envie de m'avoir. Le jour de mes 18 ans fut le pire jour qu'on pourrait imaginer. Mes grands parents n'étaient pas présents soi disant " Parce qu'ils avaient un rendez-vous au club des seniors " alors que sur le téléphone, je voyais des messages qui montraient que mes parents leur avaient interdit de venir. Allez me demander pourquoi, je n'en sais rien. Enfin à cette époque non, maintenant j'ai compris, l'Incident m'a fait énormément réfléchir, sur ce qu'avait été ma vie et ce que l'être humain est capable de faire dans certaines situations. J'ai été clairement viré de chez moi. Le seul et unique cadeau, si je peux appeler cela comme ça, que j'ai reçu ce jour là c'était un billet pour ici, pour Trinité. Un seul billet, aucun autre pour le retour. C'était l'incompréhension totale.

" Dimitri, ton père et moi avons décidé de t'envoyer dans l'université de Trinité pour y faire tes études et obtenir un métier digne de ce nom. "

" Mais j'avais déjà été accepté pas loin d'ici, pourquoi m'envoyer là bas ? "

" C'est une université très réputée, celle que tu avais choisie n'était pas assez élevée socialement. "

Ils n'avaient pas tort, c'était la meilleure sur toute la terre entière mais je n'avais pas les capacités suffisantes, nos professeurs nous l'avaient dit de nombreuses fois.

" Tu seras là bas jusqu'au bout, tu devras te débrouiller seul, nous ne t'aiderons pas, tu ne reviendras pas tant que tu n'auras pas fini tes 5 années d'études, ta licence et ton master. Bien sûr tu auras le choix de celui que tu souhaites réaliser puisque tu es suffisant grand maintenant pour prendre tes décisions. "

J'étais complètement bouche bée, mes propres parents m'abandonnent de cette façon. Alors que mon grand frère lui, n'avait pas eu à subir cela car selon mes parents " Lui c'est différent ". Que voulez vous que je réponde à cela ?

" A la fin de ton résultat du bac, si tu es accepté, tu seras directement envoyé à Trinité dans la semaine qui suivra pour y passer des classes d'études estivales. Si jamais tu étais refusé, tu seras également envoyé là bas pour rattraper ton examen. Dans n'importe quel cas tu partiras sache le. " Enchaîna mon père.

Évidemment ils avaient tout prévu pour que je ne reste pas et que je parte loin d'eux. Puisque sinon, j'aurais tout fait pour rater mes épreuves du baccalauréat. Vous vous demandez sûrement où est ce que j'habitais avant de partir pour Trinité ? Je vivais un appartement assez luxueux de Paris, dans le sixième arrondissement. Ma famille était assez riche, et je n'ai jamais trop apprécié ma renommée parce que j'étais souvent sujet aux moqueries et à la jalousie depuis tout petit alors que toute cette richesse m'importait peu. Peut être était ce la raison pour laquelle ma famille m'avait déshérité. Bien sûr j'ai essayé de comprendre et j'avais demandé à mon frère pour cela.

" Joackim, explique moi tout ça, qu'est ce que ça veut dire ? "

" Dimitri, ne pose pas de questions s'il te plaît, écoute papa et maman. "

" Mais pourquoi moi ? Toi tu n'avais pas eu à vivre ça, tu as toujours été couvé par nos parents. "

" Mais je suis l'aîné Dimitri, ce n'est pas pareil, ma place dans la famille est assuré depuis ma naissance vu que je suis le premier successeur en cas de décès. "

Évidemment, je n'étais pas au courant de cela. Je connaissais cette pratique mais je pensais que c'était mis en place uniquement dans les familles royales et pas dans une vulgaire famille qui a hérité d'un patrimoine familial quelconque. Mes parents se prenaient pour des rois alors ils se comportaient comme tels. Après cela mon frère ne m'a plus regardé et il ne m'a même pas adressé une seule fois la parole. Même si j'avais été déçu par l'attitude de mes propres parents, c'était celle de mon grand frère qui m'avait le plus choqué après tout ce que nous avions vécu tous les deux.
Comme vous pouvez le deviner, si je suis ici aujourd'hui, c'est bien parce que j'ai réussi mes épreuves du baccalauréat et que j'ai rejoint l'université. Quand l'Incident a éclaté, j'étais en première année de master et si rien de tout cela ne s'était passé, je serais actuellement en train de réviser mes dernières épreuves de deuxième année et serait devenu un très bon graphiste même si mes parents avaient été très déçus de ma décision d'études, ils auraient plus apprécié médecin ou architecte. À vrai dire, aujourd'hui cela m'importe peu, pour moi, ma famille n'existe plus, je suis seul et le restera. Mon frère a déjà essayé de rentrer en contact avec moi quelques mois après mon départ mais j'étais trop en colère pour lui répondre, alors je l'ai laissé sans nouvelles et j'ai fini par les oublier et oublier qui ils étaient et ce qu'ils avaient fait. Maintenant je pense à moi, à ma propre vie et j'ai arrêté de laisser les autres décider pour moi. Si un jour, je l'espère, je sors de cet enfer, je recommencerai ma vie loin de tout ça, comme si tout cela, mon enfance, mon adolescence et Trinité ne se sont jamais passés. La vie ne tient qu'à un fil, alors préservons la le plus longtemps possible.

Journal de Dimitri
10/04/2301

À travers le cielOù les histoires vivent. Découvrez maintenant