Chapitre 1

296 8 13
                                    

          9h16, le téléphone sonna dans l'appartement n° 47 de monsieur Edouard Rouzeau, rue Caisserie à Marseille. Les fenêtres étaient entrouvertes et une douce brise s'infiltrait dans le petit appartement, remuant la poussière accumulée sur les nombreuses bibliothèques et l'antique bureau. L'air marin se mêlait aux effluves de café qui s'échappaient de la cuisine en ce dimanche matin ; Edouard remuait sa petite cuillère d'un air distrait en faisant tinter le métal contre la porcelaine. De son autre main, il tenait La Provence et la lisait avec attention.

« ...oui, il s'agit malheureusement encore d'un vol, je le crains fort », avoue le conservateur du musée des docks romains. On peut en effet en déduire que la volatilisation de ce canthare (vase à boire à deux anses) étrusque en bucchero nero est une perte inestimable. Il n'y a pour le moment aucunes preuves et seules des suppositions peuvent être émises mais l'OCBC a déjà été prévenue par la police locale et une enquête a été ouverte, en espérant que notre patrimoine culturel retrouve rapidement sa place, nous ne pouvons qu'attendre. »

Edouard fronça les sourcils et regarda la date de parution du journal. Mardi 12 Avril 2017 ; il datait d'il y a cinq jours. Cette affaire était vraiment étrange, d'après la presse on avait affaire à un voleur amateur insaisissable. Il fallait qu'il regarde la liste des objets dérobés au bureau le lendemain.

Le téléphone continuait de sonner sur la vieille console instable de l'entrée puis dans un soupir agacé, Edouard se leva pour décrocher. La personne qui téléphonait avait tout intérêt à avoir une bonne raison de l'appeler un dimanche matin !

« Rouzeau à l'appareil, que voulez-vous ? demanda t-il abruptement.

-Allo inspecteur Rouzeau, c'est l'agent Verdier !

-Ah Verdier c'est vous... dit-il en s'adoucissant, comme il le faisait à chaque fois qu'il entendait Martin Verdier.

-On a un problème au Vieux-Port, il y a un touriste qui a trouvé un corps qui flottait entre les bateaux ! s'exclama l'agent.

-Vous avez dit un corps, Verdier ? J'arrive de suite ! »

Il reposa précipitamment le téléphone sur la console branlante puis il enfila son long manteau usé jusqu'à la corde, prit son calepin et sortit de l'appartement.

♦♦♦

En quelques coups de pédale, l'inspecteur Rouzeau était sur la scène de crime. Il posa son vélo contre un lampadaire et se dirigea vers l'attroupement de journalistes, de médecins et de policiers. L'agent Verdier se précipita sur lui en lui débitant rapidement toute l'histoire :

« Ce matin vers 9h, un plaisancier qui pêchait sur les quais du Vieux-Port, croit avoir une touche, tire énergiquement sur sa canne. Une masse se rapproche de lui et il la prend pour un thon rouge. En rembobinant difficilement son moulinet il casse le fil et voit alors que c'est un corps qui flotte entre les bateaux. Choqué, il appelle immédiatement la gendarmerie maritime. »

Verdier et Rouzeau se rapprochèrent du groupe de personnes puis après avoir réussi à braver ces insupportables journalistes affamés de nouveaux ragots, il alla à la rencontre du médecin légiste, Daphné Diaz.

« A quand remonte la mort ? interrogea l'inspecteur

-Hm... difficile à dire, ça fait un moment ! » répondit-elle en s'écartant du corps.

Edouard sentit son cœur se soulever à la vue du cadavre verdâtre recouvert de marbrures bleues. Une odeur de chair putréfiée s'en dégageait ; il recula de quelques pas puis détourna son regard du spectacle macabre.

My MicrocosmosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant