Le Démon de Pierre

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➺ Nouvelle fantastique d'inspiration gothique, récit d'une métamorphose

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Nouvelle fantastique d'inspiration gothique, récit d'une métamorphose.


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Tout commença le 25 août 1885 à Londres.

L'air était particulièrement lourd ce soir-là et un orage était sur le point d'éclater. J'avais ouvert toutes les fenêtres pour rafraîchir l'intérieur de la maison mais il n'y avait pas de vent. Edmund, mon mari, raccompagna l'homme en costume sur le pas de la porte et plaisanta avec lui. J'entrai dans son cabinet personnel pour aérer la pièce qui sentait la fumée de cigare. La soirée s'était très bien passée et Edmund sifflotait joyeusement tandis qu'il se déshabillait et revêtait une chemise de nuit. Sa négociation avec le représentant de l'entreprise de textile concurrente était clairement un succès.

Je l'embrassai tendrement puis éteignis la lampe à huile et essayai de m'endormir malgré la chaleur pesante qui régnait dans la pièce. Je somnolais lorsque soudain, un bruit retentit dans le salon au rez-de-chaussée. Je remontais les draps jusqu'en dessous de mon menton et regardai Edmund avec terreur. Il se leva silencieusement et se munit du fusil caché sous la latte de parquet puis descendit les escaliers sur la pointe des pieds. Un silence de plomb s'abattit sur la demeure et les minutes s'écoulèrent lentement et inlassablement. C'est alors que j'entendis des bruits de lutte et des cris puis il y eut un coup de feu. Je me précipitai dans le salon et vis Edmund étendu dans une mare de sang tandis que son agresseur jeta l'arme au sol et s'enfuit au loin.

Trois mois passèrent et personne ne retrouva l'assassin de mon mari. J'ai renoncé à poursuive mes recherches inespérées et me suis petit à petit enfermé dans ma solitude. Puisque je venais de la classe de la haute bourgeoisie, je n'avais jamais dû travailler pour vivre et je passais mes journées dans mon atelier de sculpteur mais désormais, ce simple passe-temps était devenu obsédant. Je dormais le jour et travaillais la nuit, à la lumière d'une dizaine de lampes à huile. Je taillai le visage du tueur d'Edmund dans le granit, animée par un profond désir de vengeance et inspirant qu'il sentirait chaque coup de burin que je lui infligeais.

Mais plus je taillais, limai, ponçai la sculpture, moins elle ressemblait au meurtrier. Deux cornes ornaient son front et ses traits étaient déformés par la haine et la folie. Ses griffes acérées étaient prêtes à déchiqueter tout ce qui se trouvait à leur portée et ses dents aiguisées semblaient rougeoyer à la lumière des lampes. Deux puissantes ailes étaient déployées dans son dos et le seul battement de celles-ci était capable de déraciner des arbres. Du sommet de ses trois mètres de haut, la gargouille était terriblement effrayante.

Cependant, ce que je craignais et désirait le plus se produisit le 2 Décembre de la même année. J'entendis que l'on forçait ma porte d'entrée tandis que je polissais les cornes de ma statue achevée. Je sus que le tueur était revenu mais je n'allais pas me laisser tuer aussi facilement qu'Edmund. J'éteignis les lampes, m'armai de mon burin et m'appuyai contre le torse en pierre de ma sculpture. L'homme se montra bien assez vite. Tandis que j'étais sur le point de venger mon mari, le ciel se dégagea et la blancheur du clair de lune inonda ma galerie d'art. Le meurtrier s'approcha de moi et brandit un couteau luisant mais je ne parvenais plus à me détacher de la statue. Ma peau fusionna avec la pierre et je fus absorbée dans la gargouille. Nous ne fîmes plus qu'un.

L'homme s'enfuit avec horreur. Je déployai mes ailes puissantes et m'envolai à travers la verrière de la galerie. L'air glacial de la nuit me donna une force nouvelle et j'appréciai cette soudaine puissance. Ma fine ouïe me permettait d'entendre le souffle régulier des Londoniens qui dormaient paisiblement. Ce fut grâce à ma vision nocturne et aiguisée que je retrouvai rapidement l'assassin dans une ruelle non loin d'ici. Je me saisis de lui à l'aide de mes griffes et alors qu'il hurlait de terreur, je m'élevai de plus en plus haut dans le ciel puis je me dirigeai vers la Tamise où je le lâchai au milieu du fleuve.

J'atterris sur une des deux tours de l'abbaye de Westminster, contemplant mon reflet dans un des vitraux. L'aube se leva finalement et sous les premiers rayons du soleil, je redevins Jane Whiteson, la jeune veuve.

Je me suis alors faite la promesse que je ferais régner l'ordre et la justice. La journée, je poursuivais discrètement les criminels impunis sous la forme de Jane Whiteson et la nuit, je devenais une gargouille de pierre et punissais ces meurtriers qui peuplaient les ruelles sombres de Londres.

Je n'étais pas devenue un monstre, j'étais devenue le « Démon de Pierre » comme les Londoniens aimaient m'appeler.


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C'est une nouvelle très mystérieuse... J'ai volontairement donné très peu d'indications sur les personnages, ou même sur l'assassin, le mobile du crime...ects, mais en réalité, je pourrais presque faire de cette nouvelle un roman avec toutes les pistes exploitables que j'ai laissées ^^

Vous en avez pensé quoi ? Est-ce que vous aimez les histoires très courtes comme celle-là ?

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