Nous sommes mercredi, il est 8h. Je suis avec Tris devant la porte de la salle de philo. Je la connais depuis 48h exactement, et nous sortons plus ou moins ensemble. Nous nous tenons les mains, face à face, et elle me parle d'elle, de sa vie, que son rêve c'est d'être danseuse. Elle m'a déjà dit qu'elle dansait, mais apparement c'est vraiment très important pour elle.
- Je danse depuis que j'ai 4 ans. J'ai commencé le classique à 7. Je ne sais pas tellement pourquoi j'aime la danse, c'est un peu inexplicable... Mais j'en ai besoin pour vivre. Par exemple, quand je suis triste ou sur le point de pleurer, je danse. Comme ça, d'un coup, j'oublie toute ma tristesse, j'oublie tous mes soucis et je danse. C'est comme si mon corps et mon esprit ne faisaient plus qu'un.
- Tu danses combien de fois par semaine ?
- Tous les jours, sauf le dimanche. Quoique, je danse même chez moi. Je passe mon temps à faire des pirouettes dans mon salon, et mon père me gronde souvent à cause de ça, mais je sais qu'au fond ça le fait rire.
- Et ça te fais combien d'heures du coup ?
- 15. Ça paraît énorme, mais j'ai l'impression que ce n'est pas assez.
Elle rigole doucement.
- Je suis souvent fatiguée, mais j'aime savoir que je suis fatiguée parce que je me donne dans ce que j'aime.
- J'aimerais beaucoup te voir danser.
- Luke, tu n'es pas sérieux ?
- Si, si.
- Alors tu me laissera te regarder peindre.
- D'accord. Ça marche.
- La semaine prochaine, c'est les portes ouvertes. Tu n'as qu'à m'accompagner après les cours.
- Tu auras un tutu rose ? Avec des paillettes ?
- Luke ! Toutes les danseuses n'ont pas des tutus roses à paillettes. En plus, mon justaucorps est bleu.
- Explique-moi comment se déroulent tes cours.
- Tu es vraiment intéressé ou tu veux me le faire croire ?
- Non, je suis très curieux. Je n'ai jamais vu personne danser, et je suis sûr que tu es très jolie quand tu danses.
- Et bien, on est dans une salle, avec un miroir sur un mur entier et des barres tout le long. On fait des exercices à la barre, pour s'échauffer et pour travailler le placement. Ensuite on va au milieu où on travaille les pirouettes, les adages, les sauts, etc. À la fin, on s'étire pour la souplesse et pour détendre les muscles.
- C'est quoi un adag-...
La sonnerie retentit. Le professeur arrive, Tris et moi nous mettons à côté mais elle ne me parle plus de sa danse pendant tout le cours. Elle adore la philosphie, et elle écoute attentivement. Moi, je déteste ça. Pourtant, je fais quand même l'effort d'écouter pour qu'elle ne pense pas que je n'en ai rien à faire. Soudain, le prof commence à parler d'un sujet qui m'interpelle.
-... L'amour est sujet à de nombreuses réflexions. Chacun à sa propre définition. Beaucoup de poètes et d'écrivains, ou même des peintres ont travaillé sur le sujet des amoureux. Mais tous disent la même chose : l'amour est quelque chose d'extrêmement puissant. Quelqu'un a-t-il son avis à porter sur sa définition de l'amour ?
Je lève timidement la main.
- Oui, Luke ?
- Je pense que l'amour est trop complexe pour qu'une ébauche humaine comme un poème ou une peinture puisse le refléter. Néamoins, il est possible, je pense, d'exprimer la puissance qui nous habite, en mettant en œuvre quelque chose de délicat et émouvant à l'attention de l'aimée.
- Bien, Luke, ton point de vue est très intéressant. Malheureusement, c'est la fin du cours, nous n'avons pas le temps de débattre plus sur le sujet. Bonne journée et à demain.
Nous sortons tous du cours, Tris empoigne ma main et la serre doucement. Je la regarde, elle a l'air très émue.
- Luke, ta remarque était très belle.
- Je.. J'ai pensé à toi. Quand je l'ai dite.
- Oh, Luke !
Elle s'aggrippe à mon cou et me câline. Je prend son menton dans mes doigts et l'embrasse. Juste quelques petits bisous que je plante sur ses lèvres, mais chaque semence fais pousser des frissons dans mon corps. J'essaye de me rappeler que nous sommes en public et que nous ne pouvons pas faire preuve de trop de gestes intimes. Nous nous écartons, je prend sa main et nous allons ensemble au prochain cours. Andrew n'est pas là. Un pressentiment me dit que je ne le verrais pas de sitôt.La journée s'est déroulée à une vitesse désarmante. Avec Tris, tout est plus beau. Elle s'émerveille devant une jolie fleur, ou rigole quand un nuage à une forme bizarre. Je continue à la questionner sur la danse, je trouve fascinant avec quelle force elle y semble attachée. J'ai vraiment envie de la voir danser, j'ai envie de tout savoir sur elle. Elle me questionne sur ma peinture, et à la fin des cours, je lui demande comment elle rentre chez elle.
- À pied. J'habite tout près. Mais d'abord j'ai mon cours de danse, donc je marche un peu vers chez toi.
- Je vais t'accompagner.
- Non, Luke, ne t'embête pas-...
- Tais-toi, Tris. C'est par où ?
- Ok.. Suis-moi.
Elle prend ma main, dépose un bisous sur ma bouche et me guide dans les rues de la ville.On arrive devant un bâtiment assez grand, avec des vitres qui laissent entrevoir une salle de danse.
- J'ai le droit d'entrer ?
- Oui, mais ne vas pas dans le vestiaires. Les autres filles vont faire un malheur sinon.
- Quel dommage.
Nous rigolons, puis je pousse la porte pour la laisser entrer.
- Bon, Luke, attend-moi ici, je vais me changer. J'en ai pour cinq minutes.
Dix minutes plus tard (décidément, c'est bien une fille), elle pousse la porte et j'ai le souffle coupé.
Elle porte des collants roses clairs un un body bleu. Toute sa tenue est entièrement moulée, et ses muscles apparaissent. Elle a un corps qui me donne le tournis. Ses cheveux voltigent sur ses épaules.
- Tu vas laisser tes cheveux comme ça pour danser ?
- Non, je fais un chignon.
- Je peux te coiffer ?
Elle semble surprise. Pourquoi ? J'ai très envie de toucher ce cadre doré qui occupe le tour de son visage.
- D'accord.
Elle s'assiet en tailleur devant mes genoux, dos à moi. Elle me donne une brosse.
- Euh... Je fais comment ?
- Comme ça, regarde.
Elle glisse la brosse le long de ses cheveux, puis me la tend.
- Vas-y.
J'entreprend d'enlever les nœuds dans sa chevelure. J'adore déméler sa crinière, ses cheveux sont soyeux et brillants.
- C'est agréable, dit-elle. J'ai l'impression que tu me masses la tête.
- Tu voudras que je te masse la tête un jour ?
- Avec plaisir. J'adooooore me faire masser.
Je pose la brosse et lui demande quoi faire. Elle attache ses cheveux, puis me montre comment les enrouler pour former une boule aplatie. J'essaye, mais je n'ai pas sa main experte, et mes tentatives échouent.
- Je vais t'aider, Luke.
Nos doigts réunis, nous arrivons à créér un chignon. Elle place un filet dessus, puis y plante des épingles. Elle lisse une dernière fois ses cheveux, court devant la glace pour inspecter notre travail, puis sourit.
- J'adore ce chignon. Merci d'être venu avec moi, ça me touche beaucoup.
- Derien mon amour.
Mon amour ? Je viens vraiment de l'appeler MON AMOUR ? Les mots pourtant me semblent naturels à prononcer.
Elle court vers moi et s'assiet cette fois sur mes genoux. Elle place ses mains sur ma nuque et m'embrasse avec une passion déroutante. Puis elle se lève aussi vite qu'elle est arrivée, prend son sac, me fait un clin d'œil et rentre dans sa salle de cours. Je reste là, assis, béa, le souffle coupé et les joues rouges, encore en émoi de ce baiser passioné pendant au moins dix minutes sur cette chaise en plastique. J'entend un piano jouer depuis la salle, je sais qu'elle est heureuse de danser, alors je me lève et rentre chez moi.
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Pilier
Teen FictionLuke Merriman, 17 ans, ado banal sans histoire, rentre à l'université. D'ici, ça ressemble à n'importe quel début d'histoire. Mais c'est sans compter sur elle. Elle, elle s'appelle Tris, et elle est belle. Vraiment belle. Mais ses traits d'anges cac...