5 • TOUT VA BIEN

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—   Ma Lys ? (on me prend la main). Hé ! Alyssa !

Quoi ? Je cligne plusieurs fois des yeux et regarde rapidement autour de moi. Ma portière est ouverte et nous sommes à présent garé sur le parking. C'est comme si le temps c'était arrêté au moment où on a passé la ligne d'arrivée. J'étais effrayée, mais en même temps... euphorique. Pour la première fois de ma vie, j'ai regardé ma peur droit dans les yeux et je n'ai pas fait de crise de panique.

Instinctivement, mon regard se pose sur Andy, à genoux à côté de moi avec un regard inquiet. Derrière lui, un peu plus en retrait, se tient Gabriel. Je ne prends pas la peine de dire un mot et je le  prends dans mes bras. Ma ceinture de sécurité me retient et s'enfonce presque douloureusement dans ma poitrine et mes hanches, mais je m'en fiche.

— Andy... J'ai réussi... soupirais-je dans son cou.

Il me rend mon accolade et s'écarte ensuite de moi pour détacher ma ceinture. Son regard dévie dernière moi.

— Alyssa, je suis forcé d'admettre que pour ce coup-là, ce n'est pas moi qui mérite tous les remerciements.

Je me retourne pour faire face à Eric. Il me regarde gravement. Je cherche quelque chose à lui dire, mais je ne trouve rien de mieux que « merci ». Ce simple mot est suffisant et je vois dans son regard qu'il en comprend tout le sens. Il aurait pu me brusquer, me forcer à repousser mes limites, fait plus qu'un seul petit tour. Mais non, il m'a mise en confiance, il est allé à mon rythme. Je me surprends à penser que, même si j'avais horriblement peur, je ne me suis pas sentie en danger.

Eric semble lire dans mes pensées à travers mon regard et hoche doucement la tête. Je ne le connais pas, et pourtant j'ai l'impression d'avoir fait quelque chose d'incroyablement intime avec lui. Mais après tout, montrer sa pire faiblesse à quelqu'un et le laisser en devenir le maitre – ne serait-ce qu'un instant – est un acte des plus intimes qui soit, non ?

*

Encore sonnée par ce tour riche en émotion, je ne participe pas à la conversation. Je ne l'écoute même pas, à vrai dire. Je me tiens un peu en retrait de Gabriel et Andy. Ils se tiennent à côté du bar en sirotant un café. Ils s'esclaffent parfois et parles avec de grands gestes. Je ne sais pas ce qu'ils ont bien pu se dire, mais j'ai l'impression que ces deux-là sont devenus les meilleurs amis du monde.

— Tout va bien ? Vous me paraissez ailleurs depuis que vous êtes descendue de voiture.

Eric me fait sursauter. Je n'avais même pas remarqué qu'il s'était assis à côté de moi autour de la petite table en fer forgé. Il est négligemment assis sur la chaise, une jambe pliée sur l'autre avec la cheville posée sur le genou. Ses bras croisés sur sa poitrine font ressortir ses muscles certainement bien dessinés sans pour autant être trop imposants sous sa veste en jean. Il porte à nouveau ses lunettes de soleil. Je me surprends à penser que son look simple et décontracté lui va aussi bien que les costumes de créateurs.

—   Je ne vous ai pas fait encore plus peur, au moins ? Ajouta-t-il.

— Non, c'est juste que... (Je cherche mes mots.) Je ne sais pas. C'est comme si j'étais coincée sous l'eau, sans pour autant me noyer.

Nous portons tout deux des lunettes de soleil, pourtant je sais que nos regards s'accrochent l'un à l'autre. Plus loin, les rires de Gabriel et Andy tranchent avec notre sérieux. Je vois les muscles de sa mâchoire se contracter à un rythme régulier, comme s'il essayait de retenir des paroles qui lui brûlent les lèvres. Puis il finit pas céder.

—   Dînez avec moi.

Ce n'était pas une question.

—   Non.

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⏰ Dernière mise à jour : Jun 11, 2017 ⏰

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