1 • INAUGURATION DE LA GALERIE

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AUJOURD'HUI

Dix-neuf heures trente. L'ouverture de la galerie est dans une heure et demie et rien n'est encore prêt. Je crois rêver. Je regarde une énième fois ma montre, comme si le fait de fusiller les aiguilles du regard allait faire remonter le temps.

Dix-neuf heures trente-cinq.

Je te hais, Maître du Temps.

Je respire un bon coup et tape dans mes mains pour attirer l'attention du personnel qui s'active — mais pas assez à mon goût — à finir les préparatifs.

— Votre attention s'il vous plait ! Vous faites tous du bon boulot, mais la galerie ouvre ses portes à vingt-et-une heure. Je souhaiterai dont que tout soit prêt dans une heure grand maximum.

Je regarde encore une fois ma montre. Les serveurs viennent m'informer que l'installation du bar et du buffet sont terminés, mais il manque encore la moitié des caisses de champagne. Ah, et apparemment une certaine Tina ne pourra pas venir travailler ce soir. Nous avons donc une serveuse en moins à la dernière minute. Super.

J'entends un bruit de chute dernière moi et je manque faire un arrêt cardiaque. Je me retourne vivement pour voir que ce n'est qu'une caisse vide qui contenait un tableau. Andy, mon meilleur ami et bras droit dans la galerie, a eu la merveilleuse idée d'engager des gros bras pour nous faire installation des œuvres. Ils ont des muscles, certes, mais niveau délicatesse c'est zéro. Il ne manquerait plus qu'ils m'abiment une pièce à plus de dix mille dollars. Ça sera déduit de ta paie mon Andy. Avec tout mon amour, bien entendu.

Sentant une migraine pointer le bout de son nez, je me masse les tempes en fermant les yeux. Mes médicaments sont dans mon bureau, mais je préfère éviter de les prendre tant que la douleur reste supportable, comme me l'a conseillé mon médecin.

— Ma Lys, va te reposer et te préparer tranquillement dans ton bureau. Je m'occupe du reste. Tu ne t'es pas arrêtée depuis ce matin.

En parlant du loup, tiens. Andy se place dernière moi pour me masser ma nuque pleine de tension. J'en gémirai presque de plaisir.

— Comment veux-tu que je me détende quand on risque une catastrophe à la seconde. J'ai hâte que cette soirée soit terminée pour finir les caisses de champagne dans mon lit avec un bon film.

Andy insiste sur un nœud au creux de mon coup. Il a des doigts de fée. Mon portable vibre dans ma poche. Je le sors pour regarder le message qui s'affiche sur l'écran et soupire. Andy pose ses mains sur mes hanches et lit par dessus mon épaule avant de soupirer à son tour.

— L'idée de quitter ce connard t'a-t-elle déjà traversée l'esprit ? Ce soir, c'est l'ouverture de ta galerie. Tu en rêves depuis toujours et lui, il va arriver tard parce qu'il est trop occupé à diner avec un client ? Mais est-ce que c'est bien un client d'abord ?

— Pour être honnête, je m'en doutais un peu de ce message. Je crois bien que c'est la dernière fois que je sors avec un homme conseillé par mon père. La prochaine fois, rappelle-moi de suivre tes conseils.

Je rangeais mon portable dans ma poche. Le temps n'est pas à se soucier du connard qui me sert de petit-ami, ni au fait que mes parents ne puissent pas venir à l'inauguration à cause d'une affaire à Washington, mais à vérifier que ma galerie soit parfaite. Elle fait tout le quarante-troisième étage d'une nouvelle tour de Manhattan. C'est un client de mon père fan de mon art — et qui accessoirement possède l'immeuble — qui me l'a proposé. Bien que je gagne très bien ma vie avec mon métier d'artiste, Harvey Fitzgerald est un ange et refuse de me faire payer un loyer au prix du marché. Inutile de préciser que je lui offre avec plaisir les tableaux qu'il me commande.

La Beauté du HasardOù les histoires vivent. Découvrez maintenant