CHAP. 1-

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Les mailles du filet de l'espoir se refermaient avec une certaine lenteur et préciosité autour de mon corps engourdi. Le bleu me rendait nauséeux et mes poumons tentaient d'avaler cette eau terrible, mais déjà de viles sirènes me tiraient vers la surface. Je n'avais certainement pas englouti suffisamment de médicaments, ou d'eau, ou d'idées noires. J'étais sauvé de l'inexistence et noyé de nouveau dans mes regrets.
Ma tête émergea hors de l'eau trop rapidement ; je me sentais uniquement suffoquer, mes poumons n'avaient pas bu que j'étais déjà sauvé, mais mes paupières lourdes et insolentes. Puis il y eut un noir, je me sentis choir, bien que je fus déjà bien bas.

J'ignore tout à fait la durée de cette absence, qui je pense n'a pas duré plus de trois heures ; je jour n'étais point encore levé lorsque j'émergeai dans une chambre affreusement blanche. Une terrible douleur à l'estomac me clouait tout à fait au lit, l'espoir de fuite était mort, d'autant plus lorsque des pas approchèrent de ma chambre, la porte s'ouvrant sur une inconnue. Dans mon était normal, je n'aurai certainement pas réagi à sa présence, mais dans la présente inquiétude dans laquelle je me trouvais, je m'armai de plusieurs questions, bien trop curieux de connaître ma situation. Je n'avais pourtant pas remarqué le bracelet blanc portant mon prénom, que j'avais autour du poignet. Mais je n'eus pas le temps d'ouvrir la bouche que la femme se présenta en temps qu'infirmière, d'une voix rassurante, me regardant avec compassion et un léger sourire de son visage heureux et ses cheveux grisonnants.
Je ne fus d'ailleurs pas surpris d'apprendre de ses mots que je me situais dans un endroit que j'ai pourtant toujours fui : "Bienvenue au service psychiatrie", avait-elle dit. Cela m'avait donné une étrange boule au ventre, savoir que j'étais loin de chez moi, mêlé avec des inconnus qui sont probablement aussi tristes et malheureux que je le suis. L'idée d'être au fond du gouffre sans solution m'angoissait avec force, et cet endroit était loin d'être une solution à mes yeux.

J'eus rapidement l'autorisation de me lever, malgré la douleur lancinante qui me prenait le poitrail sans pitié. L'infirmière, se prénommant Natacha, me présenta ma chambre, les règles du service et, enfin, les locaux. L'étage n'était pas très grand, mais un peu plus coloré que les chambres, ce qui me rassura un minimum.
Je débarquai alors, en sa compagnie, dans la salle commune de l'étage ; l'ambiance y était un peu plus vivante, les couleurs changeant de la blancheur austère de ma chambre, bien que le silence était le maître du temps. Natacha me laissa ici, rejoignant ses collègues dans une salle un peu plus reculée. L'horloge de la salle indiquait sept heures du matin, mais la fatigue était aucunement présente. Quelques personnes semblant avoir mon âge étaient déjà levées, faisant un je-ne-sais-quoi plus loin, en silence, semblant ne pas avoir remarqué ma présence. Seuls quelques mots brefs, murmurés, et le tic-tac angoissant de l'horloge brisaient la langueur matinale excessivement apaisante. Le lieu n'était pas si lugubre, du moins, pas autant que je l'imaginais.

Je m'assis donc sur une chaise, autour d'une table plutôt isolée, vers le fond de la pièce à vivre. Je n'étais pas quelqu'un de spécialement sociable, bien que je fuyais pas la foule non plus, j'avais juste besoin d'être à l'aise et à distance pour le moment. On m'informa rapidement qu'un proche avait été contacté afin d'amener quelques affaires, fort heureusement, j'étais simplement vêtu du robe de chambre de l'hôpital car mes vêtements étaient encore fort détrempés, et cette tenue me déplaisait ; j'avais froid.

Le temps passait à une vitesse plutôt lente, mais rapidement la salle se remplissait ; l'heure du petit déjeuner approchait et une délicate odeur de café embaumait la pièce. Quelqu'un s'assit en face de moi, mais je ne la regardai qu'à peine, constatant que c'était une jeune fille aux cheveux châtains un peu emmêlés. 
On nous servit le petit déjeuner sur de simples plateaux, ce n'était pas digne d'un grand restaurant, mais j'étais sacrément affamé, et je commençai à manger en regardant l'inconnue en face de moi, restant silencieux. Elle semblait avoir mon âge, peut-être un peu moins. Elle m'adressa un simple sourire que je ne rendis pas, balayant ensuite rapidement la pièce du regard. Tout le monde ici semblait se connaître, comme s'ils avaient passé leur vie ici.

Je mangeais en silence, pas très à l'aise sous le regard de la jeune fille, et sursautai même lorsqu'elle m'adressa la parole :
« Comment t'appelles-tu ?
- Adam, répondis-je simplement, d'un ton neutre. Bien que peu curieux, je me forçai à lui répondre un « Et toi ? »
- Cassandre. »
Je hochai la tête à sa simple réponse, me concentrant ensuite sur mon repas, bien que mon estomac me laminait, j'avalai, encore, tant la nourriture m'avait manqué. Cassandre ne semblait pas si affamée, ni les autres présents dans la salle, qui ne semblaient même pas s'intéresser ni à elle, ni à moi.
« L'ambiance est toujours ainsi ? demandais-je alors, relevant le nez vers la jeune fille, qui hocha la tête au même moment.
- Tu comprendras avec le temps... » répondit-elle, d'un air un peu trop mystérieux à mon goût. Je me contentai alors de hocher la tête, sans approfondir la discussion, l'attention attirée ailleurs par un étrange bruit venu du dehors.

Je mourrai dans tes bras...Where stories live. Discover now