Un soir

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Jack-

Je m'écroule sur mon lit, sourire aux lèvres. Et je pense à Elsa. Je n'en reviens pas d'avoir réussi à lui demander son numéro. C'est la première fois que je fais ça. Je ne suis pas le genre de lover à faire tomber les filles en pamoison dès que j'approche. Ceux qui me connaissent depuis le collège ont toujours tendance à me prendre en pitié, suite à l'accident.

Elle, je ne dirais pas qu'elle est différente. Elle aussi se fond dans la masse. Moi j'ai Flynn, elle un petit groupe d'amis restreint qui la suit depuis toujours. Mais, elle me plait de plus en plus. Ses beaux yeux bleus glace, ses cheveux blonds quasi-toujours tressés. Sa peau diaphane, le rouge de ses lèvres. Son esprit parfois enfantin, son tempérament calme. Un jour, j'aimerais qu'elle devienne véritablement ma Reine. Peut-être que je saurais enfin vraiment ce que cela veut dire, tomber amoureux ? Car du haut de mes dix-sept ans, je ne suis jamais tombé pour qui que ce soit, mis à part Flynn et ma petite sœur. Ma Lily. Une photo de nous deux est toujours accrochée au-dessus de mon bureau. Prise le jour de mes quinze ans, alors qu'il neigeait. Elle, elle en avait presque quatorze.

Je secoue la tête, et descend retrouver mon père. Je ne veux pas ressasser mes souvenirs, alors qu'une porte de sortie se dessine au loin. Je m'installe sur une chaise dans la cuisine, et constate du coin de l'œil que ma mère n'a pas bougé du canapé. Cette fois-ci, elle regarde une émission sur les papillons. Une douce odeur arrive à mes narines.

— Chili ? je questionne.

— Exact mon fils !

Mon père pose doucement la petite marmite en face de moi sur la table, et j'en salive d'avance. C'est mon plat préféré entre tous, je pense.

— En quel honneur ?

— Juste comme ça, répond-il. Ca fait bien longtemps qu'on a rien eu à célébrer, donc aujourd'hui, je décide qu'on est le jour national du chili !

Je ris. Mon père a parfois des idées farfelues. Je me dis que c'est ce qui lui permet de survivre, comme moi qui m'échappe avec le théâtre. Lui, informaticien, s'abruti le reste du temps dans le code. Quelque chose de logique et réconfortant selon lui.

— Alors cette pièce, ça avance ? me demande-t-il.

— Doucement. Après tout, la semaine prochaine c'est les vacances, on aura deux semaines de pause.

Il me sert une louche de viande fumante, accompagnée de riz et d'haricots rouge. Patient, j'attends que ça refroidisse.

— Et vous avez prévu quelque chose avec Flynn ? continue-t-il.

— Pas vraiment, j'hésite. Il va surement partir avec ses parents une semaine dans sa famille.

Nous discutons de tout et de rien pendant le repas, ce qui me rassure. Grâce à mon père, j'ai toujours une sorte de sensation de normalité dans la famille. Ce n'est pas ma mère qui va m'aider là-dessus...

**

Le lendemain, je sors de trois longues heures de physiques. Je m'étire, les neurones en bouillie. Flynn, ses éternels cheveux bruns en bataille, bondit devant moi.

— Alors, on la rejoint où ta princesse ?

— Devant l'agora, je dis en riant.

C'est le lieu de retrouvailles favori des étudiants, qui nous sert de cour intérieure. Très pratique lorsqu'il pleut. Je distingue la tresse blonde d'Elsa, entourée de deux gars mastoc et d'un maigrichon, qui j'ai déjà aperçus au bar.

— Déjà que Kriss mange comme une grand-mère, tu veux en plus qu'on attende deux personnes supplémentaires ? Grogne le maigrichon roux.

— Promis, on avale nos plats plutôt vite ! s'exclame mon ami.

Tous se tournent vers nous, et Elsa vient me faire la bise en souriant. Viennent ensuite les présentations.

— Les gars, voici Jack qui est avec mon en théâtre et en italien, Jack et copain de Jack voici Le Roux, le Brun et le Blond ! s'exclame-t-elle.

Les trois râlent de concert.

— On a des prénoms, Elsa ! commence le blond.

— Arrêtes de nous dénigrer tout le temps ! Continue le brun.

— C'est fatiguant, termine le roux.

Elle leur tire la langue, ce qui fait rire Flynn. Décidément, ils ont l'air bien assortis. Nous nous dirigeons ensuite dans la queue de la cantine, qui passe vite sous les questions incessantes des trois copains d'Elsa qui apprennent à nous connaitre. Elle me regarde distraitement de temps à autre, et ses yeux me transpercent. Discrètement, je me débrouille pour me placer à côté d'elle, la frôlant de temps à autres. Son ami roux, Harold je crois, lui chuchote quelque chose à l'oreille, ce qui la fait rougir. Elle plisse les yeux mais ne réponds rien. Un drame survient alors, lorsque que le brun, Hans, vole le dessert du blond, Kristoff. J'ai l'impression que les deux vont s'étriper sur place.

— Ça suffit ! Tonne Elsa. Sinon, c'est moi qui mange vos desserts demain !

La menace à l'air de faire son effet, et tous deux se calment. Moi, je tourne la tête vers Flynn, qui sourit. Et je sais ce qu'il ressent. Ça fait du bien, depuis longtemps, d'enfin se sentir accepté sans être jugé.


Le Conte d'Hiver - JelsaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant