Chapitre 1

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Comme chaque matin, je me rendis au Starbucks où je travaillais en prenant soin de saluer mes collègues. Jeremy, mon patron, opta pour des musiques jazz, qui me détendirent instantanément. J'adorais ce métier. Certes, préparer du café et du thé à longueur de journée était barbant et répétitif, mais je m'étais liée d'amitié avec mes collègues et aussi avec quelques clients qui revenaient souvent. Puis cela me donnait l'impression de mener une vie banale, ne serait-ce que quelques heures par jour. La musique, le brouhaha et le bois de la pièce renvoyaient une ambiance chaleureuse et rassurante. On se croyait dans un petit chalet accueillant. C'était comme ma deuxième maison.

Je travaillais ici tous les matins sauf le dimanche et j'aimais aussi venir en fin de journée parfois. Du coin de l'œil, j'aperçus une silhouette qui m'était familière entrer. Un homme s'avança et s'accouda au bar en me regardant avec insistance. C'était Mehdi, mon meilleur ami. J'avançai d'un pas nonchalant vers lui en soupirant.

- Ne me dis pas qu'il est déjà midi.

- Si. J'ai même quelques minutes de retard aujourd'hui. Comment peux-tu aimer ce métier ? Tu n'as pas besoin de le faire, tu sais.

Je balayai l'air d'un revers de la main pour lui faire comprendre que ses dires me laissaient indifférente avant de déposer mon tablier pour sortir. Je dis au revoir à tout le monde et je suivis Mehdi qui m'emmenait sûrement dans un nouveau restaurant comme chaque jour pour éviter la routine. Cette dernière était la bête noire de Mehdi. Et personnellement, la seule chose que j'aimais faire régulièrement c'était travailler au Starbucks, sinon j'évitais les habitudes tout comme lui.

Mehdi était un bel homme à la peau bronzée, aux cheveux noirs de jais et au regard sombre et mystérieux. Sa musculature imposante lui donnait une prestance troublante et lui valait plusieurs coups d'œil aguicheurs de la part des femmes qu'il croisait sur son chemin. Si je ne l'avais pas aimé comme un frère, j'aurais laissé mes sentiments se développer pour lui.

Nous nous assîmes dans le restaurant italien déniché par mon meilleur ami avant de commander deux pizzas. La serveuse qui s'occupait de nous devait sûrement croire que nous étions en couple puisqu'elle nous installa dans un coin tranquille, sur une table à côté d'une petite fontaine éclairée d'une faible lumière verte. Le doux son de l'eau qui coulait était apaisant, une rose était soigneusement déposée sur le coin de la table et rendait le moment assez romantique. Les murs étaient en brique rouge et de jolies fenêtres rectangulaires filtraient les rayons du soleil, sublimant la pièce.

- J'ai une affaire en or. Bien payée et simple, lâcha Mehdi en sortant une pochette de son sac à dos qu'il me tendit par la suite.

Je feuilletai le dossier avec attention tout en retenant un maximum d'éléments. En effet, j'avais déjà ma petite idée et cela n'allait pas être compliqué à mettre en place, Mehdi avait raison. Il avait aussi raison sur le gain de cette affaire, un joli nombre à six chiffres, comment refuser ?

- Allan Loyd, dirigeant d'un club de strip-tease et trafiquant de drogue... pas mal. Qui est l'employeur ?

- Xavier. Il est réglo ne t'inquiète pas. On doit juste en avoir terminé avec cette affaire au plus tôt, sinon la paye diminue.

J'acquiesçai, nous nous en occuperions ce soir. La serveuse nous apporta nos plats en souriant de toutes ses dents. Elle était petite et rousse, et la plus grande partie de son visage était recouverte de tâches de rousseur qui lui donnaient un air enfantin, c'était mignon. Je la remerciai et commençai mon repas.

Je connaissais Mehdi depuis le collège. Au début ce n'était qu'un simple ami, voire une connaissance. Puis, en classe de seconde, je découvris son secret. Et depuis mes quinze ans, je l'aidais et on se partageait l'argent. Je ne saurais justifier mon choix. Peut-être que si je m'étais fourrée dans ce pétrin, c'était par manque de charisme, par insatisfaction ou par soif d'aventures. C'était devenu mon meilleur ami à partir de ce moment-là et on ne s'était plus quitté depuis. Aujourd'hui, nous avions vingt ans et nous faisions toujours le même métier ensemble. La seule différence, c'était les affaires qui devenaient plus complexes et plus rentables qu'à nos débuts.

Après avoir payé l'addition et laissé un pourboire à la petite rouquine, nous quittâmes le restaurant pour entrer dans la voiture de Mehdi. C'était une Mercedes noire classe E cabriolet. Elle était splendide mais ce n'était pas ma préférée parmi ses voitures. Il en avait plusieurs, de toutes les marques et pour tous les goûts. C'était un grand amoureux des bolides. Moi je n'en avais que deux, et elles me suffisaient amplement.

J'ouvris le portail pour qu'il puisse rentrer sa voiture dans ma propriété. Un peu malsain, non?

Je sortis du petit bijou et je savourai l'air frais qui me caressait le visage. Je faisais ma modeste quand il s'agissait de parler de mon chez moi, mais je devais bien l'avouer, ma maison était immense. Elle faisait beaucoup trop de mètres carrés pour moi seule, mais j'y étais épanouie. J'avais une piscine qui longeait le côté gauche ainsi que l'arrière de ma demeure, elle était à l'extérieur mais protégée par le toit du balcon du premier étage. La façade était couleur gris pâle presque blanc. L'intérieur était habillé d'un camaïeu de taupe, bleu ciel, blanc et noir. Je n'étais pas fan des couleurs vives, j'étais plutôt classique.

Mehdi inspecta encore chaque détail du contrat pour être sûr que tout se déroulerait comme prévu pendant que je nous préparais du café. Mon meilleur ami ne travaillait pas en dehors de ça, il profitait de son temps libre pour draguer ou claquer son argent dans des choses inutiles. Il n'avait pas passé son bac, soutenant que c'était puéril et que ça ne l'aiderait pas à faire fortune. Moi je l'avais passé, et obtenu avec mention bien. J'étais fière de pouvoir me dire que, malgré mon aversion pour les études, j'étais parvenue à aller jusqu'à la fin du lycée alors que j'aurais pu arrêter comme lui. Et qui sait, peut-être même qu'un jour, ce diplôme me permettrait de trouver un métier raisonnable ?

Non, tu ne devrais pas rêver Marine.

- 'Rine, dis-moi, tu es certaine de vouloir faire ça ?

Je me remémorerai le plan que nous avions échafaudé pour ce soir, Mehdi s'inquiétait pour moi, c'était normal, je n'avais pas la tâche la plus facile. Ce n'était pas la première affaire où je devrais me mouiller autant. Je lui fis signe que oui, j'étais sûre de moi.

Mais l'étais-tu réellement Marine ?

Je ruminai avant de d'écarter toutes pensées qui pouvaient me dissuader d'aller au bout des choses.

- Dis à Xavier que la tête d'Allan sera sur son bureau ce soir, dis-je entre deux gorgées de café.

Contrat [En pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant