Ce matin là, Yoann se réveillait sur les toits de la capitale. Il n'avait pas fermé l'oeil, rongé par l'angoisse. Il avait passé la nuit à la dessiner, parce qu'elle avait sans doute été sa plus belle source d'inspiration. L'air était frais tandis que le soleil se levait à peine. Sous ses yeux, les lumières de la ville s'allumaient doucement. Et, quelque part, il s'était senti chanceux. Il craignait la manière dont sa journée allait se dérouler, craignait de ressentir ce remord qui était devenu une habitude. Ce qu'il ferait, il n'en savait rien. Il avait emprunté le petit escalier qui donnait sur son studio, avait attrapé un tee-shirt aux rayures marines irrégulières parmi ceux qui traînaient déjà sous le lit, avait furtivement enfilé son jean levis qu'il avait assorti avec ses nouvelles baskets, puis s'était fait un quatrième café. La mélodie de petit frère dans l'appartement créait une atmosphère que Yoann adorait. Il était tôt, et c'est ce qui lui plaisait. Médiator en main, guitare sur le dos, il s'aventurait dans les rues parisiennes. Il savait qu'apporter du bonheur était devenu quelque chose d'impossible, mais un simple sourire à son égard le transportait. C'était devenu une routine, ce qu'elle et lui craignaient tant. Depuis son départ, Yoann ne fermait plus les portes de la même manière, c'était d'une autre façon qu'il laçait ses chaussures. Il repensait, les paupières lourdes, à l'invitation de Jule. Il l'avait gardé dans le coin de sa poche arrière gauche de jean. Parfois il l'effleurait du bout des doigts, songeant à ce qu'il ferait ce soir là, puis pliait nerveusement un des quatres coins du papier, décidé à ne pas s'y rendre. Il s'était assis au beau milieu de la place du trocadéro, convaincu que ce jour-là serait le dernier, qu'il ne jouerait plus que pour ne pas sombrer, seul.
