⊰ Chapitre 51 ⊱

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Il est là, sous mes yeux. Couché sur du papier glacé, la vie imprimée dans ses yeux. Ses cheveux blond clair retombant en mèches trempées sur le haut de son front. Un regard sombre et pétillant. Mon doigt trace le contour de sa silhouette. Il porte une combinaison de surf noire qui lui colle à la peau, tranchant avec la pâleur de sa carnation. Une fossette discrète rend toute son enfance à l'adolescent. J'appuie contre sa joue. Ce n'est qu'une photo et pourtant, j'arrive à sentir la chaleur de sa peau, mêlée à l'odeur iodée de la mer. Il est si beau, immortalisé à jamais avec un sourire éclatant, jusqu'à ce que le temps ne détruise le cliché.

Je le sers contre mon cœur, tandis que je sens des bras m'enserrer les épaules. Je lève la tête pour croiser le regard de Nate. Il a vu la photo, et il ne dit rien, plongé dans un silence respectueux. Je cligne des paupières, me rabattant sur l'être que je chéris le plus au monde, même s'il n'en fait plus partie. Je me lève maladroitement, soutenue par Nate, que je repousse machinalement. Plus rien n'a de couleur, si ce n'est ce bout de papier.

« − Ambre..., appelle Nate doucement.

Je ne l'écoute pas.

Je sors de la chambre, la mine grave, comme une âme errante à la recherche du purgatoire. Je descends les escaliers avec une lenteur morbide. J'ai l'impression d'être plongée dans un brouillard. Tout autour de moi est embrumé. Probablement l'oeuvre de mon esprit décharné. Liliane croise mon chemin, et je veux la contourner. Elle semble me dire quelque chose, me parler. Mais que dit-elle ?

Les mots n'ont plus de musique.

Je la vois tendre la main et caresser ma joue. Sa peau est froide. Je recule, et je continue ma route. Nate me dépasse, et me bloque le passage. Ses lèvres bougent ; il s'agite. Mais je ne comprends pas.

Je ne l'entends plus.

Plus rien ne semble pouvoir m'atteindre. Que ce soit l'air sur ma peau, l'odeur des roses blanches ou la douceur des paroles prononcées. Je suis hermétiquement fermée, engoncée dans un deuil oublié et ravivé. Je ne sais plus ce que je fais. D'ailleurs, je ne fais plus rien. Je me laisse guider. Nate m'amène dans le salon, et me fait asseoir sur le canapé. Je n'ai pas desserré mes bras. La photo est toujours là. Près de mon cœur. Sanctuaire sain où il vit encore.

Le temps ne m'atteint plus. Combien de minutes se sont écoulées depuis que Nate a pris son téléphone et appeler à l'aide ? Je n'en sais strictement rien, et cela n'a aucune importance.

Un bruit sourd me gêne. Il est apparu trop soudainement.

Nate se lève et va ouvrir la porte. Je reconnais la chevelure rousse de Flora, les mèches bleutées de Merry et le regard vert de Fauna. Elles se rapprochent de moi. Merry est la première à m'enlacer. Fauna m'aide à me relever. Flora discute avec Nate et Liliane. Puis la portière de la voiture se referme et le roulis me berce en douceur.

* * *

Tout est gris. Les couleurs se sont enfuies. Elles ont pris peur.

Dans la fraîche soirée, le ciel apris une teinte orangée. La seule tonalité à être restée est une nuance de rouge.

La maison est sans chaleur. Froide. Repoussante. Crayeuse. Comme la ville qui s'étend autour. Comme les arbres qui la parent.

Je rejoins ma chambre, mécaniquement. Mon corps se souvient du chemin sans que j'ai à réfléchir. Il sait ce qu'il doit faire, quel pied poser le premier. Je pousse la porte, et j'entre, affable et soudainement fatiguée. Le désordre ambiant n'a plus rien de réconfortant. Ce n'est qu'un a mas de choses immobiles, figées, sans libre-arbitre. Je dépasse les frasques gisant sur le sol, ignorant le miaulement inquiet du chat noir venu se frotter à mes jambes pour quelques caresses.

J'arrive au bord de mon lit et je m'arrête. Je l'observe longuement, imprimant son image dans mon esprit. Si je m'allonge, je ne me relèverai pas. Je le sais, je le sens. Je n'en aurai pas la force. Pas maintenant.

Je regarde alors le visage si heureux sur la photo. Et sans que la tentation ne se fasse poison, je me couche, et je ferme les yeux.

Il est là. Tout près de moi. Se tenant debout sur un rocher. Par terre dans la neige. Le visage enfariné ou les cheveux trempés. Il est là.

Alors je mets à pleurer, doucement, sincèrement, piteusement. Et j'appelle à l'aide, désespérément. 

«− Maman...»


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Hello ! ~

Ça faisait longtemps. J'espère que le bac et le brevet se sont bien passés. À l'inverse sachez que cela ne définira pas votre vie. 

On entre enfin dans le vif du sujet, avec un retour-arrière dans le comportement de Ambre. Tout sera plus clair dans les chapitres à venir. D'ailleurs, je pense écourter cette histoire, j'aimerai la terminer rapidement parce que l'année prochaine, je ne pourrai pas écrire. Donc je la reprendrai sûrement dans le futur avec plus de détails. Pour le moment, je veux vous offrir l'idée globale de la fin pour ne pas vous laissez sur votre faim -notez le jeu de mot svp-.

Je sais que ces derniers chapitres, c'est parti dans un pitch "poétique", qui n'est pas forcément très compréhensible. J'expliquerai tout dans un chapitre bonus pour vous révélez les secrets de l'histoire.


Bref, je n'ai rien à vous demander à part si vous avez bien aimé, et si vous avez des hypothèses sur ce qu'elle a fait. Chapeau bas pour ceux/celles qui avaient deviné que c'était en rapport avec son frère.

Merci beaucoup d'avoir lu, j'espère que cela vous aura plu,

Kiss acidulés. ♥


Wake up, Sleeping Beauty !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant