Severus Snap

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Harry se tenait dans la pénombre, le poing en l'air devant la porte. Il pensait que le directeur - ou plutôt, le portrait d'Albus Dumbledore - serait disponible à cette heure de la nuit. Mais apparemment non.
De la lumière filtrait de sous la porte, mais elle n'était pas la seule à franchir les murs. Il y avait autre chose. Du bruit. Léger, presque doux, mais incroyablement déchirant. Des pleurs. Il y avait une autre voix aussi. Même si les sons lui parvenaient étouffés, Harry la reconnaîtrait entre mille. C'était celle d'Albus Dumbledore. Calme. Brisée. Brisée ? Aussi étonnant que cela puisse paraître, l'ancien directeur montrait rarement ses émotions quand il s'agissait de tristesse. Et pourtant... Il avait l'air aussi malheureux que les pleurs qui l'accompagnaient.
Malgré lui, Harry avait besoin de savoir.
Il colla l'oreille contre la porte.

-... tout seul ?

-... Non.

- Est-ce qu'il a souffert ?

Silence.

- Est-ce qu'il a souffert ?

-... Oui.

- Oui...

D'autres sanglots.

- Ma chère, je vous promets que ce qu'il a fait sera révélé au grand jour. Il... Il est mort pour nous tous et son sacrifice ne sera jamais oublié. Je le considérais comme un fils...

Un reniflement, un petit rire moqueur, un sanglot.

- Et moi donc, Albus... Où est-il ?

- Dans l'aile nord, à l'intérieur de la salle aux vitraux. Les élèves n'en ont pas connaissance, ils ne l'y verront pas.

En quelques secondes, la porte s'ouvrit violemment. Harry se plaqua contre le mur pour ne pas être surpris par celle qui sortait du bureau directorial - mais elle était de toute façon trop occupée à s'essuyer les yeux. Dans la pénombre, il pouvait dire que sa démarche lui était familière - sans pour autant arriver à mettre un nom sur cette femme qui filait dans le couloir. Évidemment, elle aurait pu être n'importe qui. Il y avait eu tellement de morts, y avait tellement de familles endeuillées qui défilaient dans la Grande Salle à la recherche des leurs. C'était une victoire acquise par et grâce au sang. Dans le sang. Sur le sang.

La curiosité l'emporta. Silencieusement, il suivit la femme qui n'était déjà plus qu'une ombre. Elle devait avoir quelque chose de spécial. Celui dont elle pleurait la mort avait été déplacé dans une partie quasiment inaccessible de Poudlard, qu'Harry connaissait seulement de nom après l'avoir brièvement vu sur la Carte du maraudeur. Et elle appelait l'ancien directeur Albus.

La pénombre jouait en sa faveur, ainsi que le tumulte qui leur parvenait encore de la partie principale du château. Mais au fur et à mesure qu'ils s'enfonçaient dans l'école, elle s'atténuait peu à peu et il lui fallut être plus prudent. Malgré son état de détresse apparent, la femme n'en restait pas moins dotée d'un sens de l'ouïe remarquable - à moins que ce ne soit l'odorat - ou de quelque chose qui, en tout cas, lui permettait de savoir que quelqu'un, peut-être, était en train de la suivre - et elle s'était déjà retournée plus de cinq fois.
Elle s'arrêta finalement devant une porte verte encastrée dans un mur de pierre. À son contact, celle-ci s'ouvrit immédiatement. Lorsqu'elle se fut refermée, Harry colla son oeil contre la serrure, très large pour n'importe quelle clef. Il avait la désagréable impression de se trouver là où il n'aurait pas dû être. De violer un moment solennel. Il était sur le point de faire demi-tour lorsqu'un murmure s'éleva doucement de la pièce.

- Severus...

Harry se retourna. La femme, toujours dans la pénombre, était à genoux devant une grande table de marbre où gisait la dépouille de son ancien professeur de potions, Severus Snape. Il était là, allongé, plus pâle que la mort, ses vêtements nettoyés de tout le sang qu'il avait versé. Et la femme pleurait, elle pleurait en lui tenant la main, en lui caressant doucement la joue en murmurant encore et encore son prénom... La lune éclairait l'étrange scène à travers un vitrail, et Harry pouvait voir l'ombre de la femme de profil, son nez crochu presque au-dessus de celui du professeur.

OS Harry PotterOù les histoires vivent. Découvrez maintenant