Dans La Tête D'un Suicidaire

10• Depuis (FIN)

Je ne suis pas devenu docteur, mais psychiatre. Le rêve d'être docteur demande beaucoup plus d'ambition que mon métier actuel.

J'ai une fois de plus passé une main dans mes cheveux châtains: ces dix dernières années étaient les plus difficiles de toute ma vie. Ma secrétaire m'a annoncé que j'avais une patiente qui viendra quinze minutes d'ici-là. Je la remercie et lui demande de s'en aller.

Je jetes un coup d'œil par la fenêtre et fais le bilan de ma carrière, ainsi que celui de ma vie: qui aurait cru que le pauvre Austin qui faisait pitié à tout le monde, arriverai jusque-là? Pas moi en tout cas.

Mon imagination me porte à l'incident qui m'a permi de changer de point de vue sur moi-même. L'incident qui m'a fait ouvrir les yeux. Le suicide imprévu de Pierre, par ma faute. Je n'ai jamais oublié la tête que faisait Maure au spectacle qui s'affichait devant elle. Je n'ai jamais oublié comment elle m'a fait partir, bien que j'aurais pu lui filer un coup de main...

Non... Qu'est-ce que je raconte? À l'époque, c'était moi le protégé... Mais peut-être que j'aurais pu servir à quelque chose... Qui sait?

À la place, je me suis égaré deux ou trois semaines-je ne sais plus- avant de reprendre mon courage à deux mains et de me dire qu'il fallait que je fasse quelque chose... Pour Pierre, pour Maure, mais surtout, pour moi.

Hélas, je n'avais pas de quoi payer mes études. J'ai donc travaillé dans un restaurant situé dans un quartier plutôt chic. Mais une position pas si souate quoi... Je travaillais dans la cuisine, pas en tant que chef, non non.

J'ai commencé à rire en évoquant ces souvenirs. Douloureux certes. Mais le rire prouvait que je m'en suis sortit.

Je faisais donc la vaisselle. Oui. J'ai travaillé comme ceci pendant près de 7 mois, et je dormais dans la chambre des reserves de nourriture, à côté de la cuisine. J'avais de la chance. Mais la tête de Maure ne me sortait pas de l'esprit.

Un jour, un serveur du restaurant même devait s'absenter pour une raison que j'ignore. On m'a donc confié la tache.
J'ai prit deux ou trois jours à m'abstenir, mais j'ai fini par m'y adapter: au moins je serts, je ne grattes pas le fond gras des assiètes des doigts.
Mais encore, ça n'était pas suffisant pour payer ma scolarité. Car ma fiche de paye était l'échange de monnaie que me laissaient les clients.

De fil en aiguille, je suis devenu chef des serveurs. On commençait à me faire confiance. Et ce poste était bien payé.

Un jour, j'avais suffisement d'argent pour integrer la Faculté des Sciences. Le seul problème était que l'argent lui-même n'était assez que pour les frais des cours de psy. Je me suis dit que ça pourrait être facile de prendre des cours pour devenir psy, en continuant à travailler de côté.

Alors que devenir médecin était de trop, je ne pourrais plus travailler, et j'aurais éventuellement besoin d'encore plus d'argent! Génial!

Je me suis donc jeté sur ce métier. Ça allait très bien avec mon emploi de temps serré, parce-que je gérais aussi celui des serveurs. C'était mon job. J'étudiais le soir dans la chambre de reserves.

À ce stade, on peut dire que j'ai complètement oublié mon passé: j'étais refait. Quoique je faisais tout cela en éspérant un jour satisfaire une certaine Maure. C'est stupide, mais elle a vraiment un truc avec tout ce qui c'est passé.

Sans elle, je serais peut-être mort suicidé à l'heure qu'il est.

La porte toqua, me faisant sortir de mes pensées. C'était un léger toc, celui d'une femme.

"-Entrez, c'est ouvert." Fis-je, modestement.

Une silhouette fine, un corps beaucoup tros maigre, je dirais anorexique, entra.

La personne avait des cheveux châtains, des yeux noisettes un peu bridés, et la peau claire.

Elle s'est arrêtée devant mon bureau, en me regardant comme si elle n'en croyait pas ses yeux.

Mon non plus d'ailleurs.

"-J'ai besoin d'aide, Austin!" Était tout ce qu'elle dit, avant que je ne la serre dans mes bras.

C'est à moi d'aider la personne à qui je dois d'être ici aujourd'hui.

                                         Fin.