Partie 5

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« C'EST UN SCANDALE ! »

Tout le monde sursauta brusquement lorsque le cri de colère poussé par Chloé retentit dans la salle silencieuse. La jeune blonde s'était levée de son banc, et avait violemment claqué ses deux mains sur la table en bois.

« MADAME, COMMENT OSEZ-VOUS ! C'est... TOTALEMENT INSENSÉ !

-Chloé, tente de calmer la jeune professeure, stupéfaite devant cette réaction plus que virulente. Je te prie de te calmer. Ce n'est pas en-

-Me calmer ? ME CALMER ? Madame, nous parlons bien de Juleka et Nathanaël là ? Les deux empotés du fond qui osent à peine parler à leurs camarades ? Ce rôle est à MOI ! Je suis faite pour incarner la princesse »

Chloé laissait libre court à sa rage, et s'égosillait devant notre professeure, qui ne savait vraiment pas comment réagir face à tant d'impulsivité. Personne n'osait bouger de peur que la tornade blonde lui tombe dessus comme la misère sur le monde. Je serrais la main de Rose, comme pour vainement me réconforter face à cette nouvelle. J'ai été nommée pour jouer le rôle principal, celui de Cendrillon. Je crois que personne, pas même Max avec ses probabilités chéries, n'aurait soupçonné un tel retournement de situation.

Elle était sortie de sa rangée pendant son discours plein de haine pour écraser son pied avec rage sur la première marche de la salle en gradin. Le bois vernis des escaliers avait brusquement craqué, faisant sursauter de nouveau toute l'assemblée de gens stupéfiés.

«QUANT À TOI ! »

Chloé me poignarde de ses yeux bleus glacier, aussi froids que tranchant, tout en me hélant d'une voix cassée par l'émotion :

« Avoue que c'est toi qui as soudoyé la prof de te donner le premier rôle, afin d'être avec ton Nathanaël chéri ! AVOUE JULEKA, AVOUE-LE ! »

La rage de Chloé était sans égale. Sa colère noire m'a fait sortir de mon état second, pour me faire violement atterrir sur Terre. La façon dont elle avait presque craché mon nom m'a donné des frissons. Jamais Chloé Bourgeois ne m'a fait aussi peur.

A chaque syllabe qu'elle prononçait, elle grimpait une marche de plus, se dirigeant dans le fond. Je ne savais plus où me mettre, et mon instinct de survie me hurlait de me défenestrer. J'avais tellement peur que je me recroquevillais sur moi-même. Elle parvient à la dernière marche, juste devant mon bureau, pour planter une main manucurée avec soin dans le bois de ma table, telle des serres acérées et tout bonnement effrayantes.

« ET SI CE N'EST PAS TOI, C'EST FORCEMENT TOI ROSE, houspille-t-elle en direction de mon amie. Je suis sûre que c'est TOI qui as forcé la prof à la choisir ! »

Elle serrait les poings, ses poignets cliquetant à cause de ses fins bracelets dorés. Ses beaux cheveux blonds en queue de cheval volaient presque, comme ceux d'une enchanteresse sous l'influence de son aura explosive. Ses yeux bleus glacier paraissent s'assombrir tel un ciel d'été orageux, et scintillaient de rage. Sa bouche s'était tordue en un rictus sous sa colère. Elle était littéralement ivre de rage, et j'étais pétrifiée devant tant d'animosité et de haine. Chloé était ainsi au sommet de sa puissance.

« ET puis TOI, ajoute-t-elle en se retournant vers Nathanaël, au comble de la colère. TOI QUI JOUE LE PRINCE ! C'EST LE MONDE A L'ENVERS ! JAMAIS TU N'EN SERAS UN AVEC TES CHEVEUX ROUGE TOMATE ! TU N'ES QU'UN DESSINATEUR DE PACOTILLE ! VOILA CE QUE TU ES ! ET TOI, JULEKA, TU ES UNE MANIPULATRICE, UNE-une-une ... »

Chloé s'époumonait tellement que son flot de parole s'éteignait tout seul, mais elle n'en pensait pas moins. Nathanaël ne savait pas où se mettre devant une telle pluie de remarques acerbes, et ses yeux rappelaient ceux d'une biche terrifiée devant le chasseur armé.

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