« Et si tu restais dormir à la maison ? Ce serait chouette pour vous deux, non ? »
Aïsha avait glissé ça au milieu de la conversation lorsque Jude avait évoqué l'idée qu'il allait devoir rentrer chez lui, le ciel s'obscurcissant de plus en plus. A peine eut-il prononcé ces mots que Caleb ravala son sourire et le remplaça par une mimique triste, mimique que sa mère adoptive remarqua ce qui l'amena instantanément à poser la question à l'autre garçon.
Inutile de préciser que la perspective de rester avec son ami pour le restant de la soirée et de la nuit l'enchantait au plus haut point, tout comme le brun. Ce dernier sauta au cou de sa tutrice après sa proposition, cette dernière l'accueillant dans ses bras en rigolant, tandis que le châtain observait la scène avec un grand sourire. Depuis les événements qui s'étaient produits au début de l'été, Caleb s'était ouvert au monde, du moins, à son monde, qui se résumait à Aïsha, Jude, et un peu Mark et Axel. Néanmoins, le stratège considérait ça comme une victoire personnelle lorsqu'il voyait son ami exprimer franchement ses sentiments, chose qu'il expérimentait pour la première fois en quinze années d'existence.
« Bon, et bien c'est décidé ! Reprit la belle maghrébine, je vais aller appeler ton père pour le prévenir que tu restes ici ce soir, j'ai un futon en plus dans le placard, vous pouvez le mettre dans la chambre de Caleb ! »
Les deux adolescents acquiescèrent et allèrent chercher le lit. Tandis qu'ils l'installaient et préparaient les draps et l'oreiller, le brun sourit narquoisement et lança :
« - J'espère que tu ronfles pas Judie, parce que sinon, je te préviens, tu dors dans le couloir !
- Et qui me dit que c'est pas toi qui fait du bruit quand tu dors ?
- Même si j'en faisais, ce serait toi qui irait dormir ailleurs. »
Finit-il en tirant la langue à son interlocuteur, ce dernier répliquant en lui envoyant le coussin qui se trouvait entre ses mains dans la figure.
S'ensuivit une bataille de polochons mémorables qui eut pour conséquences la quasi mort de la lampe de chevet du brun, sauvée inextremis par le stratège, ainsi que de leurs coiffures respectives.
Aïsha eut la bonne idée d'entrer dans la chambre à ce moment précis, recevant ainsi l'un des oreiller sur la figure, ce qui eut au moins l'effet de calmer les deux joueurs. Un silence glaçant s'abattit dans la pièce, les fautifs retenant leur souffle, envisageant effrayés les représailles potentielles qu'ils allaient subir.
« Alors comme ça on veut jouer, hein ? » S'écria la quarantenaire, un grand sourire aux lèvres, tout en renvoyant le coussin à ses agresseurs.
Ils jouèrent comme des enfants pendant au moins une heure, puis, reprenant son sérieux, la tutrice leur intima d'aller se mettre en pyjama et de se coucher rapidement car « ils étaient en période scolaire ». Argument qui bien entendu ne pesait pas lourd dans la balance mais les deux amis ne le firent pas remarquer et obéirent tout en remettant un peu d'ordre dans le champ de bataille qu'était devenu la chambre du brun.
Une trentaine de minutes plus tard, ils étaient couchés dans leurs lits respectifs, à parler de tout et de rien, en attendant que le sommeil vienne les cueillir. Ce fut Jude qui sombra en premier dans les bras de Morphée, suivit par Caleb quelques minutes plus tard.
L'appartement devint silencieux, seul résonnait faiblement le bruit de la radio encore allumée dans la chambre d'Aïsha, et le bruissement du vent dans les rideaux.
Et puis, le cri retentit.
Ce cri qui avait poussé Jude, des mois au par avant, à toquer à la porte du 9 rue Tsubaki.
Ce cri de douleur pure, terrifiante.
Ce cri qu'il aurait voulu ne plus jamais entendre sortir de la bouche de son ami.
Il se redressa dans son lit, effrayé et en sueur, les yeux grand ouverts pour mieux comprendre ce qui était en train de se produire.
Dans le futon situé à ces côtés était recroquevillé, tremblant de tout ses membres, son ami qui hurlait à la mort, les mains sur les oreilles comme pour se protéger de quelques paroles nauséabondes, et les genoux serraient contre sa poitrine. De grosses larmes roulaient sur ses joues tandis qu'il continuait de s'écorchait la gorge en criant des phrases incompréhensible, tout son visage crispé dans une expression de douleur ignoble qui paralysa le spectateur de cette scène horrifique.
Dans un bruit assourdissant, la porte s'ouvrit et laissa apparaître une Aïsha au regard paniqué et cheveux décoiffés, elle semblait être tombé du lit, la marque de l'oreiller étant toujours visible sur sa joue droite. Elle se précipita à la vitesse de l'éclair auprès du jeune garçon qui s'agitait maintenant dans tout les sens, bougeant ses bras dans l'air comme pour empêcher l'attaque d'un ennemi invisible, sans cesser de crier des phrases aléatoires et empreintes de douleur.
- Calmes toi chéri ! Calmes toi ! Jude et moi on est là ! C'est juste un mauvais rêve, tu es en sécurité maintenant, tu es avec nous ! Calmes toi !
La belle femme avait beau s'égosiller et tenter de le réconforter en le prenant dans ses bras, le jeune garçon ne se calmait pas, ne se réveillant toujours pas du rêve atroce dans lequel il semblait être plongé. Le châtain observait la scène avec des yeux embués de larmes, mais essuya bien vite les quelques gouttes qui s'aventurèrent sur ses joues avant de se précipiter à son tour auprès de l'endormi.
Il se joignit à l'accolade d'Aïsha et répéta à son tour :
« Tout va bien Caleb, tout est fini, tout va bien. »
Les yeux du nommé s'ouvrirent brutalement, un derniers cris s'arracha de sa poitrine et il observa, interdit, ce qui se passait autour de lui. Il tremblait violemment, sa bouche se mouvant à présent sans laisser un quelconque son sortir de sa gorge, et de grosses larmes continuant de salir ses joues pâles.
« Chéri... C'était juste un cauchemar... Tout va bien maintenant » Murmura la brune d'une voix tendre.
D'un geste délicat, elle le recoucha et remonta la couverture sur son corps tremblotant, tout en le rassurant d'une voix douce, alors que Jude n'avais toujours pas lâché la main de son ami, pensant que c'était la moindre des choses qu'il puisse faire pour lui montrer qu'il se trouvait à ses côtés.
Caleb rentrouvrit ses paupières, ils sentaient son coeur tambouriner dans sa poitrine, si fort qu'il avait l'impression qu'il allait s'arracher de son corps.
Il ne voyait rien.
Il n'arrivait pas à respirer, une peur sourde et immense paralysant ses poumons, ses membres et ses pensées, tout son être étant uniquement focalisé sur le souvenir encore trop récent de son père brandissant son poing pour le frapper.
A cette pensée, il se recroquevilla une nouvelle fois sur lui même, serrant ses bras frêles autour de son corps, geste qu'il faisait toujours lorsqu'on tentait de le blesser. Il ferma ses paupières si fort qu'il en eut mal aux yeux, et soudain, il sentit une main se poser doucement sur son crâne.
Tout son corps se raidit, il pouvait déjà sentir la douleur qu'il recevrait lorsque le coup l'attendrai et pourtant... Rien ne vint. Aux bouts de quelques minutes, la main était toujours posée sur son crâne et il s'aventura à ouvrir légèrement les yeux.
Devant lui se tenait Aïsha et Jude, leurs regards étaient empli de panique et il pouvait même apercevoir de timides larmes briller aux coins des yeux de son ami.
Que s'était-il passé ?
« Caleb... Tout va bien, on est là. »
Il se tourna vers son ami et resserra sa main tremblante autour de la sienne.
« C'est passé trésor, prononça à son tour sa mère adoptive, c'est fini. »
Oui, c'était fini, il était en sécurité maintenant, entouré des deux personnes qu'il appréciait le plus au monde, rien ne pouvait lui arriver.
Tout allait bien.
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Le secret de Caleb
FanfictionUne curieuse rumeur circule depuis quelque temps au sein de la prestigieuse Teikoku Académie, l'un des élèves aurait été responsable d'un assassinat.Mais et-ce seulement la vérité?Jude, le stratège prodige, va essayer de découvrir la vérité. Fanfict...