Chapitre trois : Fox

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« J'ai trouvé plein de bouffe » avait crié Leo. Le message était clair, c'était à elle de trouver l'essence. Elle se dirigeait vers les éoliennes, elle ne pouvait pas les voir à cause de la pluie et de la faible luminosité ambiante, mais elle entendait les pales fouetter l'air. Souvent, les gens rangeaient leurs voitures à leur pied, que ce soit les navettes électriques ou les voitures à énergie fossile. Il fallait juste espérait qu'il y en ait eu au moins une dans ce village, et que les habitants avaient oubliés leurs jerricanes en partant. Après avoir traversé un champ boueux, probablement un ancien champ de culture, Fox apercevaient les hangars qui se profilaient à travers la pluie. Trois de ces bâtiments suffisaient à Spoliarvik pour mettre de côté leurs véhicules, leurs récoltes et le matériel libre d'usage.

Elle se dirigea vers le bâtiment de gauche, il valait mieux agir de façon méthodique. Tout de bois, haut de peut-être cinq mètres et au moins trois fois plus large, il avait une grande porte qui menaçait de tomber. Les gens s'étaient enfuis dans une telle précipitation que tout avait été mis un état de décrépitude en quelques jours seulement. Habituellement, sur Loukos, tout était toujours bien rangé et chacun respecté les affaires des autres. Mais l'intérieur du bâtiment, dont tout avait été balancé, fouillé, dégradé ne donnait pas cette image. Elle déplaça une lourde toile en lin qui couvrait une pile de pneu et des bidons en métal d'essence. La chance lui souriait. Mais quand elle ouvrit les bidons, elle découvrit que tous été vide. « Evidemment, se dit-elle, pourquoi ils auraient laissé des bidons pleins puisqu'ils sont partis avec tous leurs véhicules ».

Elle déplaça un coffre en bois qui bloquait l'accès entre deux piles de pièces détachées. Le couvercle s'entrouvrit et une faible lumière bleutée en sorti. Fox se pétrifia. Ses années dans la forêt lui avait permis de reconnaître des esprits au moindre signe. Un esprit charmeur n'annonçait rien de bon. Elle se releva lentement et entreprit de reculer afin de s'enfuir du hangar. Son pied droit tapa dans une clef à molette qui traînait sur le sol. « Merde » jura-t-elle intérieurement. Quand elle releva la tête pour voir si elle découverte, elle vit la petite méduse blanche flottait dans l'air et savait qu'elle l'avait repérée. Alors elle détala le plus vite possible vers la sortie pour espérer perdre l'esprit charmeur dans la bruine.

Courir vite sans se retourner. Ses pieds s'enfonçaient dans le sol boueux des champs de culture, la faisant zigzaguer. Elle se permit un regard en arrière et son sang ne fit qu'un tour. La méduse blanche la suivait. Elle courut de plus belle mais ne trouvait plus le chemin vers le village. Elle sentait l'aura de l'esprit se rapprocher d'elle. S'il la touchait, c'en était fini, elle deviendrait son hôte. Cette idée créa en elle une vague de frissons, qui parcouru tout son corps, de son échine à ses pieds.

Un premier filament la toucha et une décharge électrique la projeta à terre. Elle se retourna et vit la petite méduse, pas plus large que son poignet, mais aux filaments si longs, s'approchant d'elle et les déployant tous. Elle roula sur le côté mais une nouvelle décharge la plaqua au sol. Dans un dernier espoir, elle déploya toute la force qui lui restait dans un coup de pied direct sur la méduse qui lâcha prise. Fox roula sur le côté et se cogna contre un arbuste. La fortune lui souriait. Quand la méduse vint s'abattre sur elle, elle pencha l'arbuste entre elle et l'esprit. L'esprit charmeur venait de trouver son hôte. Attaché à l'arbuste, il ne pouvait défaire son lien.

***

Fox était épuisée. Elle avait l'impression d'avoir perdue toute sa force vitale dans ce combat. Elle se releva, et se rendit compte qu'elle était couverte de boue. Sa capuche s'étant défaite dans la bataille, ses cheveux roux étaient emmêlés dans un mélange de boue et d'eau de pluie. Ses lunettes étaient devenues opaques, elle les nettoya avec un bout propre de son t-shirt. Elle était pétrifiée de froid et totalement trempée, mais elle avait une mission. Il fallait qu'elle trouve un bidon d'essence. Retourner dans le hangar ne lui disait rien qui vaille, pourtant, elle n'avait pas le choix.

Elle tourna dix minutes dans les champs de cultures avant de retrouver son chemin, en suivant le bruit des éoliennes. Elle ne voyait pas à plus de dix mètres à cause de la pluie qui se mélangeait au brouillard naissant.

Elle entra prudemment dans le hangar, même si elle se doutait qu'il n'y aurait pas d'autre esprit charmeur. Après avoir déplacé plusieurs tôles, elle trouva un bidon d'essence plein. Elle dégagea un chemin d'accès entre le bidon et la grande porte et entreprit de le renverser pour le ramener à la voiture.

A cause du poids important du bidon, elle dut s'appuyer, dos contre lui et les deux pieds sur le mur d'en face pour le faire tomber. Le faire rouler sur le sol terreux du hangar était déjà une épreuve, alors dans le sol boueux fut un calvaire. Après un temps terriblement long, elle arriva enfin sur les pavés de la place, où pousser le bidon semblait un jeu d'enfant. Elle aperçut Leo qui vint vert elle en courant : « Mais qu'est-ce que t'as foutu ? Ça fait deux heures que je t'attends pour charger la nourriture dans la voiture ! ». Pendant qu'il parlait, il lui avait pris le bidon des mains. Il continua :

- Ce n'est pas compliqué de pousser un bidon d'essence !

- Alors déjà j'ai dû roulé ce bidon dans 20 centimètres de boue, j'ai les pieds trempés et les vêtements totalement dégueulasses. Mais avant, parce que ça aurait été trop simple sinon, je me suis battue contre un putain d'esprit charmeur. Et pendant ce temps-là, tu t'es contenté d'attendre ? Et tu oses me dire que c'est facile de pousser un bidon ? Evidemment, quand on a que 10 mètres à pousser sur des pavés c'est facile. Alors tu sais quoi ? Débrouille-toi pour charger la bouffe et l'essence dans la voiture, moi je vais me nettoyer !

***

Elle avait trouvé une petite maison où l'eau courante et l'électricité fonctionnait encore. Après avoir pris une douche et changer de vêtements qu'elle piqua dans les placards, elle nettoya du mieux possible sont sweat kaki à capuche qu'elle portait tout le temps. Elle prit une veste trop grande pour elle, mais toujours à capuche pour se protéger avant de pouvoir remettre son survêtement.

Quand elle sortit, Leo avait terminé de ranger les vivres et elle lui indiqua la maison pour qu'il puisse lui aussi se laver et se changer. Elle s'installa au volant le temps qu'il revint. Elle sortit de la poche ventrale de son sweat, qu'elle avait posé à l'arrière, un petit livre écrit en anglais. C'était un trésor familial, le dernier livre terrien de sa grand-mère. Ecrit en anglais, il représentait les animaux sauvages communs européens. C'était de ce petit livre que venait son surnom. Quand elle vit Leo arrivait, elle rangea son trésor et reprit la route, dans le silence de la pluie.

Après la catastropheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant