Une nuit tiède de novembre. Le 25 précisément. Je suis sur le tarmac de l'aéroport d'Ambouli. En attendant une délégation étrangère à faire voyager dans un vol d'Éthiopian, je contemple les carlingues qui scintillent sous les lampadaires.
Parmi elles, une attire mon attention : Air Djibouti. Avec ses lettres en rouge, la tête d'antilope qui offre sa tête qu'on dirait portant le foulard, à la brise de nuit.
Les souvenirs affluent. L'enfance à Balbala et le nez levé vers le ciel pour contempler les avions bariolés qui entament leur atterrissage.
La partie de foot s'arrête quand un enfant crie « Air-Djibouti ! ». Et tous les enfants de délaisser la balle pour fixer cet avion aux couleurs vives qui filent comme un dauphin heureux.
Il est là, devant moi, somnolant sur le tarmac qui respire encore la chaleur de la journée. Aurais-je voulu que quelqu'un crie « Air-Djibouti », comme à l'époque de Balbala. Mais je suis seul.
Pourtant, une voix monte en moi. Un murmure qui va crescendo. Je devrais monter dans cet avion, la voir, la toucher, pour vérifier si c'est bien cet oiseau de fer qui nous a bercé sur les collines surchauffées de Balbala.
Je ne peux physiquement la palper. Je laisse alors libre cours à mon imagination. Air-Djibouti n'est pas pour L'enfant de Balbala, il n'a pas le sou pour prendre un vol où qu'elle puisse aller.
Il y a certainement d'autres qui s'accrochent à ses sièges comme des bouées de sauvetage. Des hommes et des femmes s'envoleraient chaque jour pour fuir Djibouti vers d'autres cieux qu'ils considèrent, parfois à tort, que l'herbe y est verte.
Pour moi, tous n'ont pas cet objectif innocent. Dans la masse des voyageurs, certains ont de sombres desseins. Qu'ont-ils laissé derrière eux ? Un cadavre ? Une vie brisée ?
Qu'emportent-ils dans leurs valises ? De l'argent ? Des histoires noires ? Ou tout simplement des vies éclatées ?
Ainsi est germé en moi ce titre symbolique : Testaments du ciel. J'ai imaginé un instant un vol on ne peut plus normal. Des voyageurs qui se ressemblent tous, normaux, bien habillés ; les valises se ressemblent, tout comme les voyageurs.
Rien ne les différencie dans leur hâte d'embarquer et d'arracher du tarmac hanté par les mirages. Rien ! S'il y a des visages tendus, c'est l'appréhension du voyage, évidemment. Dans mon imagination qui vagabonde, j'imagine ces voyageurs contraints de parler, de se confesser pour chercher le salut.
Et comment ?
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Testaments du ciel
Non-FictionTestaments du ciel ou confessions dans le ciel devrais-je dire ? Dans Testaments du ciel l'auteur Rachid Hachi a réussi avec prouesse à dépeindre Djibouti avec exactitude dans ses moindres ruelles en faisant ainsi de cette ville un personnage à elle...