5 : Après l'effervescence

173 18 0
                                    

♥♠♦

♣ Chaque fois que tu fais un mouvement, tu détruis mon esprit. Je perds le contrôle et les frissons me viennent. Tu me coupes le souffle. ♣

You Take My Breath Away, QUEEN


JAYDEN

Dès lors que nous nous sommes tous retrouvés chez Chris, mon taux d'adré a rechuté. Je ne me suis intensément éclaté qu'en prenant et en rendant des baffes. La baise n'est pas parvenue à me remettre dans la même euphorie.

Notre soirée a pourtant été longue et volcanique. Du sexe, de la beuverie... Cela s'est clos en apothéose, comme prévu. Le challenge portait sur l'endurance sexuelle. Chris Jenkins a été notre grand gagnant, tandis que Diego, qui sortait d'abstinence, a eu du mal à tenir la distance. Ce qui en a fait marrer plus d'un. Personnellement, j'ai souvent déserté pour m'isoler dans la cuisine et esquissé des portraits vagues de mon inconnue au bracelet. Cela me passionnait davantage que les nanas à poil.

♥♠♦♣

On est lundi. Nous remettrons nos défis au week-end prochain, comme d'hab. Nouveau tirage au sort, nouvelle lettre, nouveau challenge à relever. Nous irons certainement dans la Grosse Pomme, les délires y prennent plus d'envergure qu'à Jersey City. Les ingrédients de base seront identiques, mais nous ne voulons pas nous engluer dans la monotonie et la routine.

Perso, j'affectionne encore plus nos soirées purs mâles sans sexe. Combats, courses sauvages ou sports extrêmes à sensations fortes. Enfin bref, quand je tirerai le bon as, j'instaurerai ce qu'il me plaît...

Assis à mon poste de travail, je jette mes gants à la poubelle et range le rouleau de film étirable avec lequel j'ai protégé le tatouage sur lequel je viens de travailler. Mon client, un régulier, sort en me lançant :

— Merci, à demain !

— Ouais, on attaquera les ombrages !

Malgré les quatre heures que je viens de boucler sur son bras, mes doigts me démangent de ressortir mon carnet de croquis. Je sais pertinemment pourquoi, et cela commence sérieusement à m'exaspérer.

Jimi Hendricks résonne dans les enceintes du salon. Désœuvré maintenant, je résiste contre l'envie qui me taraude. Dessiner. Le cahier et le crayon se retrouvent finalement entre mes mains, presque par magie. La fugace vision du parc s'impose dans mon esprit. Je suis incapable de l'oublier, alors je m'y plonge, revivant pour la millième fois cette époustouflante illusion. Le bruissement d'un dermographe en cours d'utilisation s'allie aux accords de guitare en bruits de fond de mon fantasme artistique matérialisé à coup de mine.

Le tintement disgracieux de l'entrée s'infiltre dans la vibe, telle une fausse note. Brutus accueille les nouveaux arrivants. Eh oui, le prénom marqué sur son état civil est exactement celui de l'homme, considéré comme le probable fils illégitime de Jules César, qui a fini par commettre un parricide sur ce dernier. On en a d'ailleurs beaucoup ri et parlé entre ces murs.

Lui et Ryan travaillent pour moi, tous deux artistes tatoueurs avec leur propre touche. Ryan assure dans les motifs graphiques, tribaux et les manzanas. Brutus est doué dans la reproduction de photos et d'images. Moi, je suis polyvalent : je suis mon feeling et mes envies fluctuantes.

Pas plus intéressé que cela par d'éventuels clients, je m'immerge dans ma représentation éthérée d'un rideau de cheveux dorés. Le tracé des contours m'absorbe.

Love & Dakness (Dispo en Numérique & Format Hugo Poche )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant