Réponses - Partie 1

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– Alors ?

Nous sommes assis sur l'un des strates qui font face au lac situé derrière le lycée. Le temps maussade de la veille semble s'être totalement dissipé. Les conversations et les rires des élèves fusent derrière nous, diminuant en intensité au fur et à mesure qu'ils s'éloignent.

La journée s'est écoulé aussi vite qu'un battement de cils.

Apres m'être débarbouillé le visage dans sa salle de bain, nous avons marché en silence jusqu'au lycée.

Durant tous les cours, et même pendant les pauses, Claire n'a cessé de me jeter des regards inquisiteurs et méfiants. A la sonnerie annonçant la fin des classes, elle a été la première à sortir. Apres voir dit à Henry et Mike de partir sans moi, prétextant que je devais me rendre à la librairie pour faire des recherches, je lui ai emboîtée le pas. Vu le sourire en coin que m'a lancé Mike, il ne m'a surement pas cru. Henry, encore moins.

Je laisse le « Alors » de Claire flotter dans l'atmosphère telle une bulle de savon. Elle scrute mon visage comme si elle espère y déceler la réponse. Mais la vérité est que je n'ai aucune réponse à lui donner. Moi-même je n'ai pas la moindre idée de ce qui s'est passé.

Pendant les heures de cours, je me suis penché sur la question, passant et repassant le scenario d'hier dans ma tête.

Une pensée folle m'a soudain traversé l'esprit, mais je l'ai repoussée presque aussitôt.

C'est impossible, me suis-je dit.

– Alors ? répète Claire avec plus de force. Tu comptes me dire comment tu t'es retrouvé sur mon lit ce matin alors que je me souviens très bien qu' hier soir en m'endormant tu n'y étais pas ? Comment t'es entré ?

Mon cœur se met à battre violemment. Impossible de dire si c'est à cause de la peur ou de ses yeux de biche qui me dévisagent.

J'n'en sais rien...

– Comment ça t'en sais rien ? Tu dois bien savoir puisque tu étais là !

L'expression de son visage m'indique qu'elle est de plus en plus méfiante. Je m'adosse au banc et je me mets à contempler le ciel.

Une chose à savoir sur moi : je ne panique pas. Jamais. Du moins, en apparence. Même dans les situations les plus chaotiques, j'arrive à garder mon calme. Je ne le fais pas exprès. Je suis juste comme ça.

Je... Enfin, j'ai bien une idée, mais c'est tellement dingue que je suis sûr que tu ne me croiras pas.

– Pour moi, il n'y a qu'une seule explication.

Au prix d'un effort surhumain, je la regarde à nouveau.

– T'es un espion, n'est-ce pas ?

Mes yeux s'écarquillent. Je manque d'éclater de rire, mais je parviens à le dissimuler en faisant sembler de tousser bruyamment.

– Euh... quoi ? dis-je.

– Un espion ! Et me regarde pas comme ça ! C'est logique. Comment t'aurais pu entrer chez moi sinon ? Si t'étais entré par la porte, l'alarme de la maison s'serait déclenchée, à moins que t'aies l' code, ce qui m'étonnerait. T'es donc passé par la fenêtre de ma chambre, pas vrai ?

Je dois reconnaitre que sa théorie est intéressante. Elle semble en tout cas plus plausible que la mienne.

Je n'suis pas un espion, Claire. Et non, je n' suis pas passé par la fenêtre de ta chambre...

– Dans ce cas, comment t'as fait ? dit-elle avec colère. Tu ne t'es tout de même pas téléporté jusque dans ma chambre !

Je laisse passer quelques secondes de silence avant de répondre :

Je crois, pourtant, que c'est exactement ce qui s'est passé...

Je le fixe quelques instants avec des yeux ronds. Puis je me mets à rire.

– Tu m' prends vraiment pour une idiote...

– Pas du tout, répond-il. Ecoute, hier soir je me souviens m'être endormi en pensant... à toi. Tout ce qu'il y a de plus normal, ajoute-t-il précipitamment lorsqu'il me voit hausser les sourcils. Tu es la nouvelle, je m'interrogeais un peu à ton sujet. Bref, lorsque j'ai fermé les yeux, j'ai eu l'impression...j'ai eu l'impression de...

– Quoi ??

– L'impression de te voir allongée sur ton lit, exactement comme tu l'étais quand je me suis réveillé. Mais j'ai pensé que j'étais juste en train de rêver.

– Et selon toi... en fermant les yeux, tu t'es... téléporté inconsciemment ?

– Je crois...

– Donc... tu penses avoir des sortes de... supers pouvoirs, c'est ça ?

– Apparemment...

Il se met à examiner ses mains, comme s'il s'attend à projeter du feu ou je-ne-sais-quoi. Je secoue la tête et pousse un soupir.

Ce garçon est complétement fou.

– C'est ce que je me dis aussi depuis que je me suis réveillé dans ton lit ce matin, dit-il soudain, les yeux toujours fixés sur les paumes de ses mains. Je dois être complétement fou... Mais à part cette explication, je ne vois pas comment...

– Quoi ? l'interromps- je. Qu'est-ce que t'as dit ?

Non...C'est impossible... Totalement impossible...

– Quoi ? dit-il en me regardant à nouveau. Et qu'est-ce qui est impossible ?

C'est pas vrai... !

– Qu'est-ce qui n'est pas... ?

Il se tait brusquement. Un long silence s'installe, durant lequel nous nous fixons, ébahis et interdits.

– Je...

– Tu...

Nous finissons la phrase en chœur :

–... lis dans les pensées ?!

L'harmonie dans nos tumultesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant