- II -

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Vingt heures sept.

La serveuse me faisait un drôle d'effet. C'était une jolie brune, bien habillée et constamment en activité. Elle me faisait de la peine aussi. Je la voyais tous les soirs exécuter les mêmes services, pour les mêmes personnes et cela en étant payée une misère sans aucun doute. Elle m'intriguait. Je devais sembler un peu niais en la dévisageant de cette façon, certes ; mais je n'arrivais pas à décrocher mon regard de son corps. Elle se tenait droite, toujours souriante. Ce soir là, elle portait une chemise blanche en soie et un jean des plus ordinaires mais qui lui allait à ravir. Cependant, depuis tout le temps passé dans ce taudis, nous ne nous sommes jamais adressés la parole ; jamais.

Quoi qu'il en soit, cela faisait au moins un quart d'heure que j'attendais Roy et je commençais à m'impatienter. J'avais eu le temps de mémoriser l'ensemble de la verrerie du bar. Enfin, après avoir fini mon verre, il arriva. Roy me paraissait paniqué. Quelque chose l'avait sûrement effrayé. Il s'assit au comptoir et me raconta avoir vu quelque chose d'étrange à deux rues d'ici. Ce n'était pas dans l'habitude de Roy de perdre ainsi son sang froid, le voir dans cet état me glaçait le sang. J'eus à peine l'occasion d'enfiler ma veste qu'il me prit la main en m'emmenant droit à la porte de sortie.

Il faisait nuit noire. Les lampadaires grésillaient, provoquant un bourdonnement sourd et désagréable. Nos ombres suivaient les murs délabrés et le goudron qui soutenait nos pas était recouvert de pluie. Roy avait froid; moi aussi. Une brume fraîche enveloppait nos corps comme un drap gelé. Nous avancions dans la ruelle péniblement. Elle semblait interminable. On pouvait apercevoir les résidents et leurs routines à travers les fenêtres illuminées qui guidaient nos pas, tandis que, là; dans la brume, tout demeurait mort et inanimé.

Une ambiance oppressante s'installait peu à peu dans le silence, et, plus nous avancions, plus il était compliqué d'y voir quelque chose dans cette obscurité. J'avais peur. Je ne comprenais pas ce qu'il se passait. Pourquoi Roy était il paniqué ? Où allions-nous ? Tant de questions me traversaient l'esprit que je ne savais plus où donner de la tête. Je n'avais qu'une seule envie, m'enfuir. Mais je ne pouvais pas, j'avais peur, mais j'étais intrigué.

Les neufs coups retentirent quand nous arrivions sur un endroit qui m'était inconnu. Un grand terrain vague. L'herbe rasée se joignait à l'horizon et quelques corbeaux survolaient la grande étendue. Paradoxalement, je me sentais plus serein. Ce n'était pas le cas de Roy qui était de plus en plus effrayé. Enfin je lui demandait la raison de notre venue ici, et il me répondit d'une voie frêle :
- Il y avait quelqu'un ici, immobile. Et un corps mort à ses pieds.
Le problème c'est que je n'en voyais rien, mais il semblait convaincu de ce qu'il avait vu. Je ne savais plus quoi croire, mes yeux ou Roy ? Perplexe, je lui demandais pourquoi le terrain était vide contrairement à ces dires. Il me répondit :
- Je n'en sais rien. Quand je l'ai vu, j'ai couru dans la direction opposée sans hésiter, mais ma curiosité m'a poussé à revenir vérifier ce que j'ai vu. Quand je suis revenu, il n'était plus là.
- Comment tu peux être sûr de ce que tu as vu ? On ne voit rien ici, lui disais-je.
- Je suis sûr et certain de ce que j'ai vu. Je te l'assure William, me répondait-il.
Après avoir regardé une dernière fois l'horizon nous avons fait demi-tour.

J'avais l'esprit troublé. Je ne savais pas quoi penser. Comment pouvait-il être sûr de ce qu'il a vu ? Si quelqu'un était effectivement mort ce soir, devrait-on appeler la police ?

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⏰ Dernière mise à jour : Dec 14, 2017 ⏰

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