Peut-être qu'un jour, le jour reviendra.

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Peut-être que j'ai besoin d'aide.
Peut-être que j'ai besoin d'en parler pour le surmonter.

Mais est-ce que j'ai vraiment envie de partager ça ? Est-ce que j'ai vraiment envie de faire sortir ça de mon coeur alors que j'ai si longtemps caché mes émotions malsaines ?

La réponse est non.

La réponse est mitigée.

La réponse est compliquée.

Parce que si j'en parle, je serai obligée d'en reparler. Parce que si j'en parle, je serai surveillée. Parce que si j'en parle, je ne pourrai plus suivre mes plans. Je serai comme traquée. Observée. Et je serai obligée de faire ce qu'ils disent, au moins un peu.

Et je serai jugée.
Pour quelque chose qui est ancré profondément en moi, mais qui est malsain, illogique, et je crois qu'on ne peut pas vraiment le comprendre sans l'avoir vécu. Peut-être qu'on peut dire qu'on comprend. Peut-être qu'on peut accepter. Mais il y a tellement de haine, de peur, d'émotions irraisonnées que... Ils ne pourront croire à l'étendue de la souffrance engendrée. Ils me forceront comme si tout n'était pas insurmontable. S'ils font l'effort de ne pas m'en vouloir, de ne pas me faire culpabiliser, ils n'attendront pas moins de moi que je me batte et croirons qu'une petite tape sur l'épaule suffira à me guérir.

Mais c'est pas comme ça que ça marche.

Ce n'est pas parce que j'en parlerai que je m'en sentirai moins seule et incomprise.

Ce n'est pas parce que j'en parlerai que je me sentirai mieux.

Peut-être y aurait-il un soulagement. De se laisser aller et réconforter (si toutefois ils parviennent à me comprendre et me pardonner).

Mais il y aurait surtout ce sentiment d'être coincée, obligée de leur obéir et de leur parler à présent que la boîte de pandore est ouverte. Et sûrement d'être incomprise, de sentir que je suis un échec, d'entendre quelques piques échappées presque par accident de la bouche des personnes qui doivent le supporter, et de me sentir coupable, coupable de m'être laissé tomber, coupable d'avoir gardé ça pour moi, coupable de ne pas avoir réussi à m'en sortir, coupable de les avoir en plus impliqués, et plus tard, coupable de les repousser car leurs encouragements ne suffiront jamais. Coupable de ne plus vouloir de leur aide car remonter est trop compliqué, coupable de replonger et de les forcer à observer alors que maintenant, ils sauraient et remarqueraient tout, ou coupable de leur mentir encore et encore et encore.

Alors, garder ça au fond de moi est certainement la solution.
Je vais mal, mais ça pourrait être pire.
Je ne me sens pas piégée, car cette souffrance, je la connais. Et je l'accepte en quelques sortes. Je ne parviens pas à m'imaginer sans elle.
Je frissonne rien que d'imaginer tout révéler et faire face aux réactions.

De toutes façons, ce serait trop mélo-dramatique. Je me mettrais à pleurer et à étaler mes sentiments tel Calimero. Ça serait ridicule. Je suis ridicule. Mes sentiments sont ridicules. Ma vie est ridicule.

Tellement insignifiant.

Non, pleurer en solitaire est décidemment bien moins prise de tête. Je suis la seule témoin de mes faiblesses sottes, dérisoires, absurdes.

Je suis la seule à me juger.
Et tant mieux.
Déjà que j'ai du mal à me comprendre.
Alors les autres...

Et puis, si on ne fait pas attention aux petits détails, je reste la même. On ne peut pas vraiment deviner, à moins que je me laisse emporter et nage vers le fond au lieu de simplement me laisser couler.

Peut-être qu'un jour la souffrance sera trop grande. Peut-être qu'il sera alors temps de remonter vers la surface.

Mais pas encore.

Je veux continuer à me noyer. À me complaire dans ce que je connais. À ne pas battre mes instincts, tellement illogiques, mais tellement forts.

Je ne m'imagine pas encore m'en sortir. Moi, à la surface ? Ce serait insensé. Absurde. Révoltant. Pas pour moi.

Ça me réconforte et me définit.

J'ai l'impression qu'un jour, en continuant à plonger, j'en vaudrais la peine.

Et je ne veux pas perdre ce sentiment.

Qu'au fond du gouffre, il y a peut-être une lumière meilleure que celle à la surface.

Et quelque part, c'est certainement vrai même si c'est faux.

Oui.

Peut-être plus tard.

Mais pour l'instant,

Je ne suis pas prête.

Je veux continuer à me noyer.

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⏰ Dernière mise à jour : Oct 31, 2017 ⏰

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