L.

LÉO.

Le regard baissé, le jeune homme frotte légèrement son pied contre le sable rugueux tout autour de lui. Il n'a pas cherché à comprendre comment il est arrivé ici, c'est comme un instinct qu'il a suivi. Il avait senti qu'il allait céder, que son équilibre précaire allait voler en éclat alors il était parti pour amortir le choc. Ses pas l'avaient mené jusqu'ici. Il s'était laissé tomber dans le sable, le cul posé et les jambes repliées vers son torse, pour observer l'horizon dans lequel le soleil disparaissait, comme s'il se faisait avaler par l'océan.

La peine continue de peser sur ses épaules et il a l'impression de suffoquer, de se noyer dans ses propres larmes. Il pensait être au-dessus de ça, au-dessus de tout ça. Mais il a vraisemblablement eu tort puisque qu'une petite brise a tout ramené dans son esprit.

Comment Lucas pouvait-il revenir dans sa vie comme si ne rien n'était après qu'il soit parti aussi simplement en lui disant qu'il était un élément libre et qu'il ne pourrait jamais être à lui malgré tout ce qu'il pouvait lui offrir ? Léo avait toujours été taciturne et n'avait jamais cru au coup de foudre alors diable pourquoi avait-il eu tant de sentiments en lui quand il avait rencontré son aîné ? Après tout, ça n'aurait dû être que pour une nuit, Lucas n'aurait dû être que son cadeau d'anniversaire offert par ses meilleurs amis. Alors pourquoi s'était-il entêté à vouloir le revoir ? À le payer à nouveau pour avoir sa compagnie, nuit après nuit ? Léo avait bien compris que le plus vieux ne lui restait pas insensible. Était-ce pour ça qu'il avait disparu ? Était-ce parce que son travail devenait trop difficile à supporter avec la chaleur du plus jeune qui ne voulait plus le lâcher ?

Le vent marin secoue ses cheveux et glace doucement ses joues, humides de ses larmes. Il pensait avoir fait le deuil de son premier amour durant cette année : il avait repris la fac, s'était inscrit au club de basket et était particulièrement doué. Il avait eu une ou deux histoires pas vraiment sérieuses et sortait beaucoup avec ses amis. Rien ne l'avait prédestiné à retomber sur Lucas dans un parc, à la tombée de la nuit, qui allait lui sourire comme s'ils s'étaient quittés la veille en lui lançant un simple « Salut Léo ».

Rageusement, le plus jeune tape son poing dans le sable, sa vision devenant floue. Comment l'aîné pouvait-il lui faire ça ? Il avait senti son cœur s'arrêter de battre à sa vue avant de repartir à toute vitesse. Il avait senti sa tête tourner et ses yeux s'écarquiller. Il avait entendu le fin rire de son ancien amant et il n'avait pas tenu, il s'était enfuit en courant, sans demander son reste.

C'était peut-être lâche. C'était sûrement lâche. Mais il n'avait rien contrôlé. Après tout, c'était soit ça, soit s'évanouir. Ce qui n'aurait pas été beaucoup plus viril. Mais comment pouvait-il prétendre être viril quand il avait eu tant de mal à traverser cette année ? À se sortir de cette douleur ? Bordel, comment tous ses efforts pouvaient-ils s'effondrer aussi facilement face à Lucas ?

- Je savais que tu viendrais ici, tu le faisais déjà à l'époque.

Nul besoin de se retourner, il savait déjà qui était derrière lui à prononcer ces mots.

- Je ne pensais pas que tu fuirais en me voyant à nouveau.

- Je pensais ne jamais te revoir.

- Je me doute bien.

- Qu'est-ce que tu fais ici ?

- Je voulais te voir.

- C'est chose faite. Tu peux repartir, désormais.

- Léo...

- Lucas.

Un soupir parvient à ses oreilles alors qu'il voit du coin de l'œil son aîné s'asseoir à ses côtés. Et il n'arrive plus à savoir s'il en a envie ou pas. Il sent la peur monter à lui, lentement et insidieusement. Il a peur de retomber pour lui, de ne plus pouvoir penser correctement et que tous les efforts qu'il a eus tant de mal à faire ne se réduisent à néant.