1er décembre

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— On vous souhaite un joyeux Noël, on vous souhaite un joyeux Noël, on vous souhaite un joyeux Noël, et une mort paisible...

Confectionnant avec soin et une grande joie une guirlande composée de crânes et de tibia, Caron chantonnait sur les bords du Styx. C'était l'un des premiers Noël depuis le second Déluge, les nouvelles mers s'étaient parées de glace, la Terre n'avait jamais aussi mal porté son nom. Une grande partie de la surface du globe n'était plus que blancheur pure et éclatante. Et sous cette épaisse couverture glacée se trouvait toujours plus de cadavres. L'eau fut meurtrière lorsqu'elle recouvrit la quasi-totalité des mers, emportant avec elle quelques milliards d'humains. Et la glace était venue, deuxième vague sanglante, pour achever les survivants. 

D'aucuns auraient pu s'en plaindre mais pas autant que Caron. Zelyan avait bien prévenu le passeur qu'il allait déclencher l'Apocalypse mais Caron n'avait pas réalisé l'ampleur de la tâche qui s'engouffra en déferlantes dans les limbes. Des âmes, des âmes, des âmes, plus d'âmes qu'il n'en avait jamais vues s'étaient précipitées en enfer. Y avait-il eu une augmentation de la taille de l'équipe de Caron ? Avait-il reçu des renforts pour l'aider à gérer le passage des morts ? Que nenni ! Ah Zelyan créait des cités vampires, engendrait des loups-garous pour régner sur Terre et des démons pour les tortures mais qui gérait l'entrée des enfers ? Caron, rien que Caron, avec pour seul aide le chien des enfers. Certes Cerbère était effrayant et n'avait jamais manqué à sa tâche en interdisant l'entrée des enfers à toute personne non habilitée mais seul Caron pouvait diriger la barque qui voguait sur le Styx. 

Il accrochait sa réalisation au moment où Ereyne sortait des enfers et le rejoignait dans les limbes, suivie par Zelyan. 

— C'est magnifique Caron, déclara Ereyne en glissant ses doigts dans la neige éparpillée sur la plaine en couche épaisse. 

L'immortelle s'assit dans la neige et observa le ciel couleur prune que formait la voûte de la caverne. Le soleil lui manquait, la vie lui manquait. Là-haut tout n'était que ruine et désolation, l'Humanité n'avait probablement jamais passé de Noël aussi triste. Il restait pratiquement un mois mais personne ne s'en souciait. Les vivants avaient bien d'autres choses en tête, il leur fallait survivre. Il ne restait guère plus qu'Ereyne, et les habitants des terres saintes, pour bientôt célébrer ce jour de fête. 

— Je suis heureux que cela te plaise princesse, répondit le passeur qui soupira de soulagement. 

Sa surprise avait eu l'effet escompté, Ereyne avait souri. Zelyan mit une main dans la neige, puis une patte, et rejoignit le chien dans une course folle sur les plaines blanches, en chasse aux âmes en peine. Caron descendit de son échelle et aida Ereyne dans sa grande construction : un bonhomme de neige. 

— Ce sont de petits plaisirs qui font la joie de la vie, rit l'immortelle en jetant un peu de cette neige douce et tiède, magique, sur Caron. 

— Je suis assez fier du résultat, je ne pensais pas que cela fonctionnerait aussi bien, observa le passeur en modelant une bloue entre ses mains. 

— Comment as-tu fait ? commit l'erreur de demander Ereyne.  

— J'ai hâché les âmes les plus claires que j'ai trouvées, cela a fait cette poudreuse, pas mal non?

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Merci d'avoir lu ce chapitre !

Axel.

Mortel AventOù les histoires vivent. Découvrez maintenant