Begarchì

Par-dessus la vie

«Ça y est, je dors. Il paraît que le temps ne s'écoule pas de la même façon, selon notre état. Réveillé ou assoupi. Nous n'avons que notre propre perception de la réalité pour nous donner des indices. Alors cela fait combien de temps? Je ne pourrais pas le dire, si le temps est tellement subjectif. Alors, est-ce que je rêve? Je ne vois rien. Suis-je seule? Pourquoi le suis-je si souvent? Je crois. Je ne sais jamais. Visualise le contexte. Le contexte... Pourquoi est-ce que je suis endormie? Parce-que, ce n'était pas naturel, ce n'était pas moi. Mon corps n'avait pas décidé qu'il était temps de m'échapper de la vie. Faire une pause dans mon existence? Faire une pause, pour recommencer? Pour aller mieux? Aller mieux... Oui, oui. C'est évident. Je dors, pour aller mieux. C'est ça. C'était ce qui était prévu. Quoi d'autre? Me forcer à quitter la conscience pour plonger dans l'inconscience, ou la surconscience? Pourquoi? Suis-je seule? Éclairez-moi, suis-je seule? Autour de moi, tout est paisible. Si je suis seule, tout est paisible. Pourquoi je ne veux pas l'être dans ce cas? Est-ce que je recherche... Le chaos? Qui suis-je? Répondez-moi, qui suis-je? C'est étrange, je ne veux plus dormir, donne-moi les réponses. Julia, donne-les moi. Qui es-tu? Ne le cache pas, qui es-tu? Nous le recherchons... Quoi-donc? Le réveil, ou l'éveil. Il y a cette musique. Régulière, une seule note, jouée dans un rythme lent. Le tempo de la sérénité. Suis-je seule? Je le suis. Cela va changer, tu l'as dit...Tu l'as dit, tu le recherches, tu le veux. Qu'est-ce que je désire? Le chaos. L'anarchie. Le bouleversement. La confusion. Le trouble. Nous l'aurons voulu, tu l'auras voulu. Je l'ai voulu. Je le sens. Je ne suis plus seule, je le ressens, il s'insinue en moi? Ce n'est plus la brûlure de l'esprit, ce n'est plus la douleur de l'âme. C'est physique. Tu dois partir, si c'est physique. Tu reviendras pour la dernière des douleurs. Ne voyage plus si loin. Réveillons-nous. Maintenant. Maintenant. MAINTENANT!»

-HAAAAAAAAAAA!, hurla Julia.

Un cri de douleur, un cri de torture. L'elefthera n'était plus la simple potion bleue. Ce n'était plus la fiole inconnue. Elle lui était devenue familière au moment ou elle avait pénétré son corps. Ce n'était rien d'autre qu'un poison, le pire des venins.

Thomsen lui fit une autre piqûre, une autre de ses potions. Elle devait l'apaiser rien qu'un peu. Un tout petit peu. Il n'était pas question d'utiliser de la morphine maintenant que ses pouvoirs revenaient en elle. La morphine est une trop grosse drogue pour les sorciers.

-Enlevez! Enlevez-la! Je..veux pas! Veux...pas. Sortez...le poison.

Julia n'avait plus sa jolie voix chantante. Ça voix n'était plus qu'une plainte, un déchirement. Elle voulait repartir d'où elle venait. Elle y pensa, elle fit des calculs dans sa tête. Vivre ou mourir. Olkpat se précipita vers elle. Il reprit de sa voix profonde, de sa voix rassurante.

-Julia, ça va aller. Tiens le coup, ça va aller.

Non. Non, pour elle, cela n'irai pas. Ça allait de mal en pis. Si la douleur était déjà indescriptible dès qu'elle avait sentit la seringue, cela ne s'arrangeait pas. Ce n'était pas

juste avoir mal. C'était bien pire. On ne donna jamais de mot pour un tel ressenti.

-Elle ne va pas tenir longtemps!, gronda Olkpat à l'adresse de Thomsen.

-Il le faut, Olkpat, regardez son bras. Il faut qu'elle tienne jusqu'à ce que les motifs disparaissent.

-On les voit encore nettement! Combien de temps à peu près?

-Ça dépend! Il y a eu peu de cas et jamais l'intervention n'a eu la même durée. Ça dépend du niveau de magie, je suppose.

Thomsen était simplement professionnel. Ses apparences de jouvenceau avaient disparu tant qu'il jouait la vie de cette jeune fille. Il surveillait toutes les machines. Olkpat, était assis sur une chaise qu'il avait placé à côté d'elle. Il la regardait se tordre de douleur, impuissant. Un sentiment qu'il ne connaissait que peu. Il ne le supportait pas. Thomsen reprit alors la parole,