CHAPITRE 2

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Il s'agit toujours de la même appréhension lorsque je referme la porte d'entrée, lorsque j'ai embrassé les filles et leur papa. On referme la porte et on craint qu'ils ne reviennent pas, alors on prononce une petite prière- bien qu'on ait déjà soumis la requête auparavant. Juste pour soi on demande encore et encore "Seigneur puisses- tu les préserver, puisses-tu les préserver".

Car même si les filles pourraient venir avec moi, je préfère qu'elles restent en compagnie de leur père à son travail, plutôt que d'avoir à se déplacer à gauche à droite où rester seules à la maison tandis que je me déplace à gauche à droite. Cela dit la porte a été refermée depuis plus d'une heure déjà, Lik m'a confirmé être bien arrivé à son bureau , ainsi donc lui et les filles sont toujours en vie et lorsque la sonnerie du téléphone de la maison retentie, il s'agit de Lou, institutrice dans la même école que moi, vivant à quatre maisons d'ici, et dont la fille Nawel est une amie et camarade de classe Nadi.

" Tu t'en sort avec les préparatifs du voyage?" Demande-t-elle.

Dans trois jours nous partons tous- si Dieu le veut -pour la France. " Tous" signifie ma famille, la sienne et celle de bien d 'autres de la communauté chrétienne . J'ai choisi la France pour destination car nous y parlons la même langue, bien que très proche de notre langue Arabe, et même si ce n'est pas le cas pour la famille de Lou ainsi que la mienne , beaucoup ont des connaissances dans le territoire . Lorsque j'ai premièrement pensé au voyage, je n'ai ni songé ni à sa famille ni à la mienne qui évidemment en feraient tous partis mais à ceux ne faisant pas parti de mes proches qui se devaient de nous rejoindre .

" Comment veux-tu amener tous les autres chrétiens de la région avec nous ?! " S'exclamait mon mari lorsque nous n'étions encore que deux dans le lit conjugal, car personne encore ne bombardait La Manilla.

En effet lorsque nous sommes devenus les derniers chrétiens de tout le pays et que seule notre région sur les quatre existantes, n'était pas passée sous les mains des rebelles, Lik n'avait autre choix que d'admettre que j'avais raison en voulant quitter le pays des mois plus tôt, et sans même en avoir réellement parlé au préalable nous nous préparions à fuir.

" En se mettant en contact avec les autres! Je peux voir avec mes parents d'elèves et Lou avec les siens ! Comment oses-tu encore me demander comment communiquer avec les gens de la ville n'est-ce pas ton métier?"

" On ne peut pas faire d'annonce officielle on risque trop! Les rebelles nous traquent! S'ils ont vent que des chrétiens se préparent à l'éxil ils débarquent ici avant l'heure et on est cuit!

" Il ne sauront pas, cela se fera discrètement"

Et cela s'est fait dans la discrétion, je lui ai exposé mon plan avant de le mettre à exécution le lendemain. Même si Lou a paru effrayée au debut elle m'a fait confiance,et avec son aide j'ai rapidement eu la participation des parents d'élèves chrétiens au notre voyage, puis m'est venu l'idée de la page. Un groupe sous forme d'une page internet sur un réseau social que je gererais, une page privée à laquelle nous n'avons accès qu'en étant membre. Une page avec un nom lambda cachant ses activités de récupération de communauté chrétienne. J'ai appelé la page "Les recettes du Week-end".

Toujours est-il que la page réunissait chaque jour 10 à 15 nouvelles personnes venant rejoindre le projet. L'avantage d'être professeur des écoles et maire de la ville est que cela facilite les relations sociales, Lik et moi connaissions donc chacune des personnes présentes sur la page, il m'aidait d'ailleurs à y voir clair lorsque nous la parcourions ensemble, lorsque nous nous assurions que nous nous connaissions chaque personne . Cependant il y'a trois jours, deux jours après la mise en ligne de la page, j'ai voulu voir plus loin que la ville et aller chercher nos frères chrétiens où ils se trouvaient, donc non seulement à La Manilla mais également dans ses environs. Je souhaitais visiter les églises de la ville voisine, et celles de celles qui viennent après, faire du répérage, savoir qui fréquente les lieux, afin de finir par avoir fait la région dans son entièreté, ce qui signifie quinze villes au total. Quinze villes qu'avec Lou nous nous sommes partagé, et aujourd'hui vient d'ailleurs le dernier jour, ce soir nous aurons officiellement fini notre travail de visites d'églises.

Etre la femme du maire de la plus grande ville de la région rend plus facile la confiance que les gens mettent en vous. Car ils savent qui vous êtes , que vous partagez la même confession religieuse, que vous vous retrouvez dans la même situation aussi pénible que la leur, qu'il vous est impossible de les piéger. Car c'est bel et bien le travail des rebelles , piéger, trouver les gens de la croix où ils se trouvent quitte à se faire passer pour l'un des leurs.

" Tu as enlevé les croix chez toi?" Demande Lou .

" Oui! Plus de croix accrochées au mur, plus d'écritos avec des phrases bibliques dans le salon, la bible elle est cachée, plus de chapelet au rétroviseur de la voiture, plus de figurines! Tout est brûlé! Et toi?"

" Pareil ! Combien de villes tu fais aujourd'hui?"

"3" Répondis-je, et tandis que je me déplace dans le salon, j'aimerais me poster devant la fenêtre mais pensant être peut-être surveillée, je m'abstiens.

Même s'il est vrai que je ne connais que très peu mes voisins, et qu' ils ne m'ont pas l'air bien méchants, finalement je ne les connais pas, et tous sont de confession Almara! Et s'ils étaient en contact secret avec les rebelles? S'ils nous dénonçaient? S'ils en avaient marre de subir les bombes à cause de nous s'ils voulaient précipiter les choses et nous envoyer au camp tout de suite?

" 3 aussi, je n'arrive pas à croire que c'est déjà le dernier jour. Et Lik et sa démission?"

" Il compte la faire demain! Il a du travail qu'il veut encore finir aujourd'hui"

" Comment ça va se passer?"

" Il a déjà prévenu son équipe. Il fera un communiqué aux habitants quand on sera en France, cela n'est pas la meilleure façon de faire, mais je pense que la ville comprendra" Répondis-je en me connectant sur la page où nous nous rejoignons tous sur le réseau social.

Celle-ci annonce trois-cents personnes. Au centre de l'écran est écrit le déroulement du voyage, sûrement le plus éprouvant de nos vies. Il ne va pas s'agir d'un voyage traditionnel passant par la case passeport, et encaissements de bagages, d'ailleurs les bagages sont réduits à leur strict minimum.

Cela ne fait d'ailleurs qu'à peine six jours qu'il est prévu, et que mes prières ont été excaucées. Avant d'avoir crée la page, j'ai entrepris multiples démarches auprès des compagnies aériennes des états voisins, dix ont été contactées, certaines ne m'ont pas répondu, d'autres se sont contentées d'évoquer la dangerosité de l'idée pour poliment refuser. J'ai insisté par plusieurs messages écrits via internet, mais plus de réponse.

Bien que je comptais fuir dans le continent, je n'avais plus le choix que d'opter pour les autres, et le plus proche étant l'Europe. Cette fois m'a été offerte une réponse positive, ils m'ont appellé nous avons discuté et conclut qu'un avion de la compagnie " Air France" serait présent à l'aéroport de La Clivia , une ville voisine le mardi 3 juillet. Seras présent l'avion même qui seras entièrement vide seulement occupée par l'équipage, et un second dont l'idée à été proposée par la compagnie. Celui-ci contiendra forces de police , il s'agit d'une équipe nommée " La police de la croix", le nom m'a fait sourire, je les ai remercié mille fois puis j'ai pleuré.

La réaction que je craignais le plus fut celle des filles, l'idée de quitter le pays fut été difficile pour elle , ainsi que de garder le secret quant au départ . J'imagine bien le grand effort que cela coûte à Zo de ne pas craquer avec ses amies Almara lorsqu'au téléphone elle s'abstient de leur dévoiler qu'elle s'en va. Je me console en me disant que Nadi du haut de ses sept ans n'a pas ce poids sur les épaules -bien qu'elle aurait voulu revoir ses copines de classe lors de la rentrée prochaine- comme je crois que chacune d'elle se console également en se disant que toutes embarque à bord de l'avion avec une amie, Nadi en compagnie Nawel, Zo avec Peluche.

Seulement embarquer dans l'avion est le plus facile, le vrai enjeu se trouve loin derrière l'accès à l'avion, il se trouve à des kilomètres avant. Nous allons passer par des endroits que tout le monde connaît , cependant non loin du camp des Almara l'endroit où ils manient les armes, où ils s'entrainent à tuer.

" Tu as vu nous sommes plus de trois cents personnes sur la page! " S'exclame soudainement Lou .

" Oui ! Seulement il y' a plus de 1950 places dans l'avion"


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⏰ Last updated: Dec 12, 2017 ⏰

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Le bon berger, La lumièreWhere stories live. Discover now