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Ainsi n'en restait que trois personnes. Deux hommes et une femme, précisément. Les deux hommes étaient désespérés et ne savaient que faire. L'un était un prêteur qui n'avait plus de sous à garder, tandis que le second était un bâtisseur qui n'avait plus personne à loger. La femme, quant à elle, était une belle personne atteinte de cécité, qui ne voyait rien depuis ses trois ans. D'une grande beauté, l'usurier et le bâtisseur la tenait en grande estime, car malgré son jeune âge, elle faisait preuve d'une sagesse extraordinaire, et était capable de déjouer les plans de malins, ainsi que de régler les conflits, peu importe lesquelles.

Il y avait déjà fort longtemps que ces trois là attendaient, tous dos à la montagne, et la nuit tenait peu à peu à s'estomper. Pour rompre le silence, le prêteur dit : « femme, toi dont le savoir émane, dis-moi. A présent que plus personne n'est en cette région pour me demander des services, que vais-je devenir en ce monde ? » à cela, assise en tailleur la femme lui dit ceci : « tu es bon et juste, tu m'aideras dans les taches de ma maison ». Le prêteur en prit bonne note et se tut. Puis, le bâtisseur, curieux de connaître la réponse, s'enquit de la questionner : « femme, toi qui sait les réponses aux questions, dis-moi. Je n'ai plus personne à loger en cette région. Que deviendrais-je dans l'avenir ? » Imperturbable, elle répondit : « Tu es bon et juste. Tu feras ma maison. »

 Tous deux interloqués pas ces affirmations, le prêteur et le bâtisseur demandèrent alors à l'unisson : « Mais toi, femme qui paraît savoir la réponse à nos questions avant même que nous ne les posions, sais-tu ce que tu deviendras dans l'avenir ? » Et, pour la première fois depuis qu'elle avait perdu l'usage de ses yeux, un beau sourire de joie apparu sur son visage si dur. Elle prit en considération la question, et répondis, amusée : « Je m'en vais vous répondre, si vous tenez tant à le savoir ». Alors elle se leva paisiblement, pris la branche d'un vieux chêne non loin de là et, s'en servant de canne, se retourna face à la montagne et fixa, bien qu'aveugle, le sommet du mon pâle. Contrairement à toute autre personne, elle ne s'effondra pas au sol, car le soleil, en la voyant, tomba instantanément sous son charme. Les deux hommes ne le virent pas, car ils n'osaient se retourner, par peur de mourir dans l'instant. Mais elle, continua.

Lorsque les loups la vire, ils la laissèrent passer. Lorsque des avalanches se produisirent, pas un flocon ne l'atteint. Le froid, pourtant si mordant en ces hauteurs, se put se résoudre à lui faire du mal, tant sa détermination était inflexible.

Et le soleil, lui, jamais n'osa ne serait-ce que tenter quoi que ce soit. Et, plus que jamais, c'était à présent lui qui était pétrifié en la voyant, et se sentait impuissant. Cette femme paraissait fragile, et pourtant rien n'aurait été en mesure de la contrarier, tant le respect qui en émanait était palpable.

Sans aucune difficulté, atteignant quasiment le haut, elle se trouvait à quelque mètre du soleil transi par l'indécision, lorsque sa canne en chêne tapa contre quelque chose à moitié enfoui. Elle demanda alors : « Serait-ce des os que ma canne a touché à l'instant ? » il dit « Oui, oui en effet ce sont des os, ceux d'un ours que j'ai autrefois connus. »

- Soleil, pourquoi est-il mort, si loin de tout ?

- Il est mort, car il a perdu un pari.

- Par les dieux, si on mourrait en perdant un pari, peu d'hommes seraient encore debout pour parler !

- C'est vrai.

- Soleil, ne ment pas et réponds-moi franchement. Pourquoi l'ours est-il mort ?

- Je l'ai tué. nous avions conclu un marché. Si, pendant onze mois et onze jours, le comportement des hommes, femmes et enfants était exemplaire, alors il gagnait. Si leurs vices prenaient le dessus, alors je gagnais, et en ce cas je m'accordais le droit de les punir comme bon me semble.

- Soleil, est-ce vrai ce que tu me dis-là ?

- Jeune aveugle, je te dis la pure vérité.

- Mais, dans ce cas, qu'on-t-il fait de mal d'après toi ?

- L'un d'entre eux a torturé, violé et tué une jeune enfant pure, devant les parents incapables de la protéger.

- C'est terrible ce que tu me dis là. Et qu'est-ce que les autres ont fait ?

- Ils lui ont fait subir les mêmes supplices, puis l'on écartelé.

- C'est une punition satisfaisante d'après toi ?

- Oui. Je le vois en effet comme une punition juste.

- Alors dans ce cas pourquoi les avoir punit, s'ils ont réagis aussi bien selon toi ?

- Eh bien, pour deux raisons. La première, c'est qu'apparemment, d'après les faits rapportés par mon ami l'ours, il ne sut jamais expliqué les raisons de son crime. J'en ai conclue que la cause ne venait pas de lui, mais de son lieu de vie. C'est son entourage, les autres villageois qui l'on poussé au vice, ou bien ses parents, ou bien ses amis, ainsi de suite. Deuxièmement, peu après bon nombre de villageois sont devenus fous, et n'ont tardé à retourner à la violence dans laquelle je les avais trouvés. C'est pour ça. Les hommes, de part leur manière d'être, sont mauvais en groupe. Ils ne savent se tenir. C'est pourquoi il faut leur empêcher d'exister en groupe trop nombreux, sinon ils s'autodétruisent, et donc...

- Je me permets de te couper, astre. Ce que tu dis, est faux. De tous les hommes avec qui j'eu la chance de parler aucun ne ressemble à ce que tu me décris. Tu t'es menti à toi-même, comme tu as menti à cet ours. Ils n'ont jamais été mauvais en groupe, crois-moi. mais ne t'es-tu jamais mis à leur place ? Etre sans cesse épié par un être supérieur, qui choisi ce qui est bien et ce qui est mal, qui juge de leur utilité simplement par leurs actions, et non par leur raison d'être. N'est-ce pas le summum de la torture que cela ?

Le soleil ne sut quoi répondre. D'habitude solitaire, jamais on ne l'avait remis en question, et on ne faisait que le vénérer. S'en suit le reste de la journée et de la nuit suivante une longue discussion. 

Le soleil et l'aveugleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant