Chapitre 1

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Il était là, installé sur un banc entre des arbres comme tous les matins avant de commencer sa journée. Un café dans la main, venant du Sugarman Café, de l'autre côté de la rue et son ordinateur portable sur les genoux. D'après la météo, un soleil radieux dans un ciel sans nuages allait persister toute la journée. Il n'élevait pas la tête et ne faisait pas attention aux différents passants, trop concentré peut-être. Pourtant, un téléphone avait sonné, une chansonnette incongrue, trop triste pour ce matin de printemps. Malgré le fait qu'il ne levait pas les yeux, il devait forcément l'avoir entendu. La personne avait mis du temps à répondre et la sonnerie avait retenti longuement dans l'atmosphère. Il frotta sa légère barbe avant de passer sa main dans ses cheveux châtains, toujours concentré.

Les yeux rivés sur son écran d'ordinateur à pianoter, il laissait libre cours à son imagination.

***

Dans les années vingt, le commissaire, Monsieur Parrish, enquêtait sur une mystérieuse affaire qui concernait la disparition d'une jeune femme, près des rails. Elle avait été aperçue en train de bavarder avec une autre, blonde et qui portait une veste rouge. Elles se tenaient debout sous un pont, qui pouvait être distingué depuis la fenêtre du train. Celui de dix-sept heures trente-quatre. C'était un passager à bord de ce train qui les avait remarquées. Il avait prêté une attention particulière à ses deux femmes, se demandant pourquoi elles pouvaient bien discuter à cet endroit. Au milieu de la route. Sous un pont.

***

— Alors ? Il avance votre bouquin, Monsieur Howard ?

Un vieil homme, les cheveux grisâtres venaient de s'approcher du banc et il finit enfin par lever la tête.

— Oh, monsieur Newton, je ne vous avais pas entendu approcher, répondit-il avec un sourire, avant de boire une gorgée de café.

Le vieillard s'assit à ses côtés avant de continuer la conversation.

Tom Howard avait pris l'habitude de se poser sur ce banc avant de commencer sa journée et de papoter avec cet homme, plutôt curieux à son goût. Il s'agissait d'une des seules personnes qui prenait encore le temps de lui parler. Sa femme l'avait quittée depuis un petit moment déjà. Depuis, sa vie était devenue un cauchemar et il se plongeait dans l'écriture de ses livres pour se vider la tête.

— Pour tout vous dire, ça avance, mais il me reste encore pas mal de chapitres à écrire, expliqua-t-il.

— Tant mieux alors !

Il porta de nouveau le gobelet à ses lèvres pour en prendre une gorgée : le goût de la toute première fois où il avait pris un café dans ce bar avec sa femme. Le matin, avant d'aller au bureau, elle s'arrêtait au Sugerman Café. Une petite habitude qu'elle avait très vite transmise à son mari. Enfin, maintenant, son ancien mari. C'était elle qui lui avait fait découvrir ce bar et depuis, il n'avait cessé d'y aller. Il but une autre gorgée de café, puis encore une nouvelle. Le gobelet était à moitié vide, mais ce n'était pas grave. Il retournerait en acheter s'il le fallait étant donné qu'il en avait besoin pour se remotiver.

Il était presque neuf heures lorsqu'il arrêta de bavarder de tout et de rien avec ce vieillard, une quinzaine de minutes après son arrivée. Il ferma l'ordinateur qu'il rangea dans sa sacoche avant de se lever. Il allait retourner chez lui, comme quasiment tous les matins à cette heure-ci. De toute façon, il ne pouvait pas rester plus longtemps sur ce banc, même avec un sandwich dans son sac pour le déjeuner. Il aurait bien besoin de brancher son ordinateur à un moment ou à un autre, d'utiliser les toilettes ou encore de jeter un coup d'œil à toutes ces notes qu'il laissait sur son bureau.

THE JOY MOTEL (En Pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant