3. NOUVELLE CONNAISSANCE

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🎼 People help the people de Birdy 🎼

CHAPITRE 3

9 AOÛT 2020, MAISONS-ALFORT, ILE-DE-FRANCE

Apparemment, cette petite blonde s'appelle Silène. Si c'est la vérité ou pas, aucune idée et je m'en fous un peu. La probabilité pour que je la revoie est aussi élevée que je serre Milan dans mes bras quand je rentrerai. Et puis, aussi bien, elle habite à Paris et non à Maisons-Alfort [1]. Le monde est bien trop grand pour qu'elle croise à nouveau mon chemin. En tout cas, ça a l'air d'une fille géniale. Originaire de Montélimar [2], un endroit paumé me semble-t-il, elle a eu un bac L ou ES ou S même. En tout cas, elle a eu son bac et elle a entamé des études en langue mais finalement, elle a tout lâché et s'est lancée dans la traduction en free-lance. La seule chose dont je suis sûre, c'est qu'elle est excentrique. Je parie qu'elle adore dessiner. Un pressentiment.

Mon portable vibre à nouveau dans ma poche avant et un grognement s'échappe de mes lèvres. Je sais déjà qui c'est. Pas besoin d'être devin pour le savoir. Ça vibre à nouveau. Je le sors d'un geste brusque et l'éteins. Je fonce dans quelqu'un, m'excuse sans relever la tête et le contourne. Les rues des Champs-Elysées sont toujours bondées, quelque soit la période de l'année. L'heure même ! Il y a toujours de la population. Des riches comme des pauvres mais impossible de les différencier. Jusqu'à un certain point. Une femme corpulente, agenouillée au sol, un gobelet d'un quelconque café est écrasé entre ses mains noirs de crasse. On ne voit pas un seul bout de sa peau, couverte par du tissu d'un chocolat sombre et pourtant il fait une chaleur étouffante, amplifiée par le nombre incalculable de passants qu'il y a. Force de croire que quelqu'un s'arrêterait pour lui donner une pièce mais rien. Personne. Je passe près d'elle en pinçant des lèvres. Ça me fait tellement mal de voir des personnes dans le besoin. Je cligne des yeux puis fais marche arrière.

— Bonjour, je la salue avec un grand sourire.

Ses lèvres se retroussent mais juste un petit peu. Mais assez pour comprendre qu'elle ne dira pas un mot. Elle ne doit pas parler couramment français. Je dépose plusieurs pièces de un euro, cinquante centimes, deux centimes, tout ce que je trouve dans mes poches et mon porte-feuille puis lui tend un bout de pizza que j'ai récupéré au fameux resto avec Silène.

— Merci, murmure-t-elle avec un petit accent, le regard baissé.

Je renifle puis lui souris.

— Bonne journée.

Mais je sais que ces deux petits mots ne changeront pas sa vie. Je me mords l'intérieur de la joue, m'intimant de ne pas pleurer. Surtout pas alors qu'il y a du monde autour de moi. Maman l'aurait pris sous son aile pour l'aider à remettre sur pieds. À reprendre sa vie en mains et avoir un bel avenir. Sauf que cela fait depuis longtemps que j'ai su que je ne pourrais sauver personne. Vingt putains de minutes que je cherche ce fichu Häagen-Dazs mais impossible de le trouver ! J'ai déjà parcouru deux fois la file de magasins en passant par Nike, Adidas... et pareil de l'autre côté ! À croire qu'il a disparu. L'envie de taper du pied me prend. Envie réprimée. Je n'ai pas envie qu'on me prenne pour une débile !

Je m'arrête devant le magasin Longchamp. Avec ses néons et les étagères en cuir matelassé blanc et la porte en verre, aucun doute pour qu'on comprenne que c'est du luxe ! Et je sais que nǎi nai [3] adore les sacs de cette marque. Maman aussi d'ailleurs mais disons que nǎi nai [3] a un goût prononcé pour les produits de marque. De luxe surtout. Je n'ai que quinze euros. Je soupire.

— Quel boulet, je marmonne dans ma barbe.

Je rallume mon portable. Je saisis mon mot de passe et le code pin. Je lève la tête et...! Wow ! Ce sac, nǎi nai [3] l'adorerait ! C'est un petit sac à main au cuir noir tout simple avec des lanières en cuir d'un bleu nuit brillant. Je ne sais pas ce qui se passe mais mon portable vibre, m'arrachant un sursaut. Et il vibre et il vibre encore ! C'est comme s'il prenait soudainement vie et qu'il allait bientôt s'envoler. Soudain, il s'arrête dans ma paume, inerte. 39 appels manqués. 208 messages reçus.

What the fuck [4] !

Mes doigts survolent le clavier virtuel à toute vitesse et j'envoie un message très clair à Milan.

De : Moi
À : Frère de mes deux
Fiche-moi la paix. Je fais ce que je veux. Je rentrerai quand j'en aurai envie.

Un point à la fin pour qu'il comprenne bien que j'ai le fin mot et sans faute d'orthographe comme si je parlais à un étranger. La technique parfaite pour clore une discussion qui ne demande pas de suite ! Mon portable bipe et je le glisse dans la poche de mon jean sans regarder. Il est 18 h 21. Le ciel est toujours clair. La température est bonne. Le temps est parfait pour une promenade tranquille. Je me glisse dans la foule et flâne. Après avoir dîné seule dans un restaurant chinois, je fixe d'un regard morne la borne pour acheter des tickets. Plus de sept euros pour seulement dix tickets, ça fait mal ! Je souffle puis paye. Quel ligne prendre déjà ?

1. Commune française du Val-de-Marne, en Île-de-France. Banlieue sud-est de Paris.
2. Commune française située dans le département de la Drôme en région Auvergne-Rhône-Alpes.
3. Grand-mère en chinois. ( 奶奶 )
4. C'est quoi cette merde ?!

•••

Hey, un nouveau chapitre de posté ! Nous découvrons une nouvelle facette de Shannon, qu'en pensez-vous ?

Plein de bisous,
Julie

Plus fort que toutOù les histoires vivent. Découvrez maintenant