6. UN BOUT D'AVANT

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🎼 Losing Sleep de Chris Young 🎼

" L'amour était bien souvent une question de compréhension du langage de l'autre. " de Archer's Voice de Mia Sheridan.

CHAPITRE 6

18 AOÛT 2020, AUBENAS, ARDÈCHE, AUVERGNE-RHÔNES-ALPES, FRANCE

Adossée contre la portière de la grosse voiture de riche de Gabriel, j'inspecte mes ongles, faisant comme si je ne remarquais pas les fréquents coups d'œil du père de Milan.

— T'es sûr qu'elle va bien ? chuchote-t-il à son fils.

Chuchoter est un grand mot. Il est plutôt entrain de brailler.

— Elle ira bien, affirme Milan.

Malgré cette réponse positive, je perçois une pointe d'incertitude dans sa voix. Je sens mes lèvres frémir.

— Vos conversations de gonzesses, vous pourrez les avoir au téléphone, je leur lance. Faut qu'on y aille sinon on va rater le train.

Ils échangent un dernier regard puis dévalent les maigres escaliers en pierres. On ne peut pas dire que Gabriel soit riche comme Crésus mais il vit plutôt confortablement. Comme peut le montrer sa BMW et son manoir. Ah et j'ai oublié la piscine qui englobe une grosse partie du jardin. Oh et le jacuzzi sur la terrasse. Donc, oui, Gabriel vit très aisément. Et quitter cette petite cage dorée ne lui ait jamais venu à l'esprit. Ça en devient pathétique.

— Allons-y ! clame Gabriel sur un ton joyeux qui m'arrache un grognement.

Ces trois jours passés en leur compagnie m'ont parue si longs que je me suis demandée plusieurs fois si le temps ne s'était pas arrêté. Chaque minute qui passait me semblait des heures alors ne parlons même pas des journées ! Le silence règne dans l'habitacle alors que Gabriel quitte le parking de sa propriété privée. C'est fou comme propriété privée semble snobinard !

— Alors, Shannon, c'est quand que tu me présentes ton copain ?

Et c'est reparti pour un tour. Je roule des yeux en serrant la mâchoire à m'en briser les dents. Est-ce qu'il ne pouvait pas juste la fermer pendant... disons toujours !

— Quand je l'aurai tué et enterré, je rétorque d'un ton sans pince-rire. Tu le verras sûrement dans son cercueil.

Il éclate de rire.

— Je ne te connaissais pas un humour si particulier.

— Qui a dit que c'était de l'humour ? je réplique, les yeux figés sur la verdure qui défile par la vitre.

— Allez, Shannon, tu peux me le dire ! Je suis quand même ton p... beau-père.

Enfant, je n'ai eu que Gabriel comme figure paternelle et même si j'ai apprécié le fait qu'il me considérait comme sa fille par le passé, ce n'est que ça, le passé. Maintenant, je suis adulte et j'ai toutes les cartes en main pour mener ma vie comme bon me semble.

— Si je te dis que je n'ai pas de petit ami, c'est que j'en ai pas tout simplement ! je m'écrie d'une voix exaspérée. Tu ne peux pas me laisser tranquille putain ?!

Essoufflée par l'effort, je relâche la tension dans mes épaules et m'affale contre le dossier en cuir. C'est fou comme c'est épuisant de ne pas dire ce qu'on pense quand on veut juste que cette personne se la ferme au plus vite ! Le silence pesant qui a empli la voiture m'oblige à fermer les yeux. Je n'en peux plus. Toute cette énergie dépensée pour quoi ? Il ne peux pas juste se taire ? Et Milan ? Les épaules raidis, je sens sa respiration forte et hachée. Au moins, il a la décence de ne pas ouvrir sa gueule. Pour une fois.

Plus fort que toutOù les histoires vivent. Découvrez maintenant