What I Thought Was Good People

Chapitre 1/ Partie 2: Austin

Au sud de la ville, quelques jours après l'assassinat de Phillips Maine, Austin et quelques autres gars étaient vautrés sur le canapé, chacun un joint de marijuana aux commissures des lèvres. L'appartement était envahi d'une fumée épaisse, créant un brouillard quasiment opaque. La vaisselle sale traînait depuis des lunes sur la minuscule et peu pratique table à manger, la place étant habitée par un troupeau à l'hygiène parfois douteuse. Austin se plaisait dans cet endroit, ayant vécu là ses meilleurs souvenirs : sa première baise, son premier party et son premier bad trip. Jason et Marcus jouaient aux jeux vidéo, concentrés sur leur course automobile virtuelle. Lui profitait de son état de planage pour se reposer après une longue journée de complications. Un de leurs collègues, Phillips, venait de se faire retrouver, après une longue absence sans nouvelles, à l'autre bout de la ville, le visage bleui par la mort. Vu les circonstances de son décès, on ne pouvait qu'écarter les coïncidences. Le pauvre était recherché par quelques rassemblements de criminels, car il foutait la zizanie partout où il fourrait son nez. Il a appris à la dure de ne pas embêter les mauvaises personnes, surtout pas en étant aussi peu expérimenté que lui. Cependant, à ses yeux, il ne méritait pas ce triste sort : une seule erreur l'avait conduit six pieds sous terre.

Marcus se redressa le dos et grogna en envoyant valser sa manette sur le tapis mal entretenu. «Aussi mauvais perdant qu'à son habitude», nota le jeune homme avec exaspération.

- Hé, petit blond, l'interpella Jason, savourant sa victoire. Ça t'ennuierait d'aller me chercher les restants d'hier ?

Après avoir compris qu'il faisait référence aux plats de nourriture chinoise, il se leva de peine et de misère, marmonnant dans sa barbe.

- La prochaine fois tu le feras toi-même, je ne suis pas à ton service, mon vieux.

À la seconde où il allait atteindre le réfrigérateur, le loquet du battant se déverrouilla et laissa entrer Jeremiah, celui qui s'occupait de retracer l'auteur du crime à la fête que Phillips assistait. L'air sévère qu'il arborait à son habitude était remplacé par une vague de frustration et de fatigue. Sa peau foncée contrastait avec son t-shirt blanc taché de rouille, signe qu'il avait dû travailler sur son SUV endommagé la majeure partie de sa nuit. Il avait beaucoup de talents manuels, dont celui de réparer l'irréparable.

- Toujours en train de se défoncer à ce que je vois, remarqua l'homme. Bon, selon ma source, nous aurions une piste supplémentaire au sujet de qui nous cherchons. Au départ, nous en avions si peu il aurait été impossible de lui associer un nom, mais...

- Crache le morceau, qu'on s'y mette maintenant !, s'exclama impatiemment Marcus.

Jeremiah déglutit et pris son temps pour communiquer l'information, par peur que ces jeunes hommes sous-estiment leur opposant :

- C'est une femme, contrairement à nos soupçons.

Les regards qu'ils s'échangèrent furent un mélange de surprise et de confusion. Ils étaient plus accoutumés à voir des hommes dans le milieu de ce qu'ils appellent communément «Le Marché Noir». Celles qui en faisaient partie étaient des prostituées, pas des mercenaires...

- Faut dire que ça réduit un peu les possibilités, en conclut Austin les bras croisés et l'air penseur. Je n'en connais pas des tonnes prêtes à tuer pour de l'argent.

- Comment peut-on être certains que ce n'est pas un homme?, défia Marcus du coin de l'œil.

Jeremiah railla quelques mots inintelligibles avant de revenir à lui, son sérieux étant à rude épreuve. Il devait trouver cela si simple et logique mais le jeune homme aux cheveux de jais n'avait pas tort : pourquoi leur aîné saurait le sexe de l'agresseur sans preuve physique ?

- Phillips a été retrouvé sous la fenêtre d'une chambre au deuxième étage. Il n'aurait jamais été attiré dans cette pièce si une paire de seins ne l'avait pas séduit. Il était rarement sur ses gardes, du type plutôt naïf, une femme aurait eu plus de chance de le cerner que n'importe quel malade.

Austin, sceptique quant à sa théorie, s'écroula de nouveau sur le sofa, les mains contre le crâne et les doigts massant ses tempes douloureuses. Il n'avait jamais été proche du trépassé, mais sa mort semblait être un avertissement pour le reste du groupe. La compétition dans le milieu de la drogue était loin d'être banale, il ne fallait jamais la prendre à la légère au risque de se positionner au milieu d'une guerre indifférente aux vies humaines. Repérant un filet de fumée s'échappant de son joint posé contre un bol de verre, il le récupéra entre son pouce et son index et pris une dernière bouffée pour s'évader de la conversation animant ses colocataires.