She was smiling

IV

J'avais déjà aimé avant lui, en tout cas c'était une certitude pour moi. Son nom importait peu mais c'était ce qu'on appelle aujourd'hui un "fils à papa " et qu'à l'époque j'appelais un " fils de bonne famille ". Evidemment. Pourquoi aurais-je daigné parler à quelqu'un qui n'a pas d'argent ? Sa pauvreté aurait pu me contaminer. Ridicule.

Je m'étais mise avec lui parce que nous allions bien ensemble, parce que c'était évident et parce que c'est un peu ce que l'on attendait de moi j'imagine. La fille riche avec le mec riche. Rien de bien surprenant. C'était évident, comme tout l'avait toujours été dans ma vie.

On avait vécu une "histoire" de presque 2 ans. C'est long quand on y pense. Mais je ne m'étais jamais sentie aussi seule. Il était bien plus égocentrique que moi et je faisais toujours tout pour être au top et ne pas lui faire honte. Je croyais l'aimer sincérement parce que c'est ce que j'avais vu chez mes parents. Ce que je pouvais être bête. Je ne l'aimais pas, je ne l'appréciais même pas, il était juste .. utile. Mais ça, j'ai mis des années à le comprendre.

Lui, il était différent. Je pensais le détester même si il me fascinait d'une certaine manière avec ses yeux qui ne me regardaient jamais réellement.

Quand il me demandait si je savais ce que c'était que d'aimer quelqu'un, je lui sortais ce fameux exemple de mon ex. Il riait, ses yeux se plissaient et quelques petites rides apparaissaient. Il regardait droit devant lui en riant et pourtant je me sentais comme une petite fille qui dit que plus tard elle va se marier avec un prince.

La petite fille que j'étais avait vu un amour en ce qui n'était qu'une relation de convenance, un arrangement même.

Il m'a expliqué, comme à une enfant, qu'aimer c'était bien plus que trouver quelqu'un de beau et riche et se mettre avec parce que ça fait bien.

Il m'a expliqué qu'aimer ce n'était pas qu'une question d'apparence mais surtout une question de correspondance. Je ne comprenais pas ce qu'il entendait par là et il m'a dit qu'un jour je comprendrai mais que ce n'était pas à lui de me l'expliquer.

Rétrospectivement je comprends ce qu'il voulait dire. Correspondre à quelqu'un ce n'est pas forcément avoir la même vision des choses, ce n'est pas penser tout les deux qu'on est contre la légalisation du Cannabis ou encore pour la peine de mort. Se correspondre c'est regarder la personne, lui parler et que tout soit naturel, un peu comme si on réfléchissait à voix haute avec nous même.

Je suis confuse et je m'en excuse mais ce que j'avais découvert avec lui, je ne pouvais pas l'expliquer. Pouvez-vous m'expliquer pourquoi la Terre est ronde et pas plate comme on le croyait avant ? Pouvez-vous m'expliquer pourquoi les choses que l'on trouve meilleures sont souvents néfastes pour nous ? Pouvez-vous m'expliquer pourquoi il m'est tombé dessus alors que j'étais heureuse dans mon mirage ?

Je ne sais pas si un jour je pourrais dire ce que je ressentais vraiment pour lui parce que je pense qu'il n'existe pas de mots assez forts pour décrire ce que je ressentais pour lui mais en même temps la peur qu'il provoquait chez moi.

Les personnes qui nous comprennent trop et qui nous font réfléchir sont plus effrayantes que n'importe quel monstre sous le lit.

Il était mon monstre sous le lit.