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06. Grey Hue

Ce qui avait pu caractériser Jimin durant la semaine qui suivait cette journée chaotique, était le titre de "larve". Il l'avait passée chez lui, dans son petit appartement à traîner entre les quatre pièces qui le composaient, une grosse couette sur le dos. Il était rentré directement après être sorti du café, et il n'avait pas bougé de la semaine. Il vivait d'eau du robinet et de boîtes de conserve qu'il avait retrouvées au fond d'un placard. Le contact avec l'extérieur avait complètement été coupé. Il avait laissé son portable se décharger, ne répondait pas quand on sonnait à la porte et ne prenait même pas la peine de descendre dans l'immeuble pour aller chercher son courrier. Non, il vivait en ermite.

Il avait préféré ignorer Taehyung après ce qu'il s'était passé et encore plus le rendez-vous qu'il était sensé avoir avec Yoongi après ce qu'il lui avait dit. Quand le serveur lui avait annoncé distinguer les couleurs du monde, ça avait anéanti Jimin. Il s'était retourné et avait quitté le café sans même répondre à la question que l'autre lui avait posée. Il était trop choqué pour ça et il savait totalement ce que cela signifiait. Yoongi avait déjà rencontré son âme-soeur. A quoi bon s'encombrer d'un rendez-vous avec une personne pour qui il avait des sentiments mais avec qui il n'avait aucune chance. Ça n'avait aucun sens, et pourtant Jimin ne pouvait s'empêcher de penser à Yoongi.

Il continuait d'espérer pour rien du tout et ça le blessait. Il repensait aux paroles qu'avaient eu Taehyung à son égard. Elles avaient été toutes aussi blessantes mais il aurait dû les écouter. Ca lui aurait évité bien des douleurs. Qu'il était bête. Évidemment qu'il ne pouvait pas aller à l'encontre de cette loi silencieuse qu'était celle des âme-soeurs. Elle rendait les gens indéniablement heureux, leur permettait de découvrir un monde en couleur avec une personne en tout point faite pour eux. Alors pourquoi Jimin la détestait elle autant. Simplement parce que lui ne trouvait cette personne faite pour lui et s'était épris d'une autre. 

Il ruminait ces pensées depuis le début de la semaine, seul, sur son canapé avec un paquet de chips toujours à proximité. Il ne regardait même pas la télé, non -de toute façon son abonnement avait été coupé puisqu'il avait oublié de le payer le mois dernier et ne regardait pas son courrier depuis la semaine dernière-, il se contentait de promener son regard dans tous les recoins de son salon qu'il connaissait déjà par coeur.

Plusieurs fois, son regard se dirigea sur la table basse, sur laquelle reposait son portable, vidé de sa batterie. A chaque fois il se mordillait la lèvre et détournait le visage, coupable. Il en avait marre de ruminer et de faire le mort mais il avait peur de retourner à la réalité. Et ce petit appareil était le premier pas vers cette réalité. Il était partagé entre le fait de reprendre contact avec l'extérieur ou bien rester terré dans son trou pour toujours. A l'évidence, la deuxième solution n'était pas envisageable mais il avait peur. Peur de se replonger dans la vie réelle, peur d'être blessé plus qu'il ne l'était déjà, peur de quitter le confort que lui offrait sa fuite. Mais d'un autre côté, il avait beaucoup trop envie de retrouver sa petite routine de vie.

A de nombreuses reprises, il se redressa brusquement, prêt à attraper le petit appareil et l'amener jusqu'à son chargeur mais à chaque fois il bloquait en réalisant ce que cela représentait. Il faisait les cent pas devant sa table basse, se rasseyait, sondait l'espace à la recherche d'une aide fortuite. De loin, son petit manège devait donner l'impression qu'il était fou. Et il se sentait fou face au combat qui opérait dans sa tête. Il triturait ses doigts, vieux tic de quand il éprouvait un stress conséquent.

"-Allez Jimin, tu peux le faire, t'es pas une couille molle."

Il en venait même à se parler à lui même, mais si cela pouvait l'encourager, il s'en fichait. Après tout, il était seul dans son appartement. Il ferma les yeux, compta inconsciemment dans sa tête pour penser à autre chose et se redressa rapidement pour attraper son portable. Il se frappa mentalement pour la stupidité dont il faisait preuve, ceci n'engageait à rien et il réagissait trop pour pas grand chose. En soupirant un grand coup, il alla chercher le chargeur qui s'étendait lâchement sur le sol de sa chambre et emmena tout ce beau monde dans la cuisine. Il brancha l'appareil au bout du fil et il s'alluma en affichant le logo de la marque.