Nous quittons enfin Salomon que nous voyons s'écrouler sur une chaise, complètement à bout de force.
-« Bon, allons maintenant chez le coiffeur » ! m'annonce le décrassé, le visage enluminé. Tu me conseilles quoi comme coupe ? Un rafraichissement ».
-« A vrai dire, pour être franc, je pense que tu devrais oublier ta coupe de cheveux de footballeur des années quatre- vingt. Tu devrais essayer une coupe courte ».
-« C'est bon, je te fais confiance » !
Nous sommes accueillis par un jeune coiffeur qui possède une voix d'eunuque assis sur une plaque chauffante.
-« Salut Jeanfil, ça boume ? lance mon compagnon. Je te présente Janot. Puis se tournant vers moi : « Janot, je te présente Jeanfil ASSEC, c'est un polonais » !
Excédé, le coiffeur :
-« Monsieur Jésus, je vous l'ai dit au moins cent cinquante fois : c'est pas « Jeanfil » mais « Jean-Philippe » !
-« Oh ça va ! Détends- toi du string ! Aujourd'hui c'est pas un jour comme les autres ! C'est le jour de la RESSURECTION du CHRIST ! Regarde mon nouveau look ! Tas vu mon nouveau look ? Mate ces paluches ! Et si tu voyais mes pieds.... !
Le coiffeur regarde, conquis, et me tend finalement une main que je presse, ayant l'impression d'écraser une poignée de figues molles :
-« Enchanté ! me dit-il et bienvenue » !
-« Enchanté » !
-« C'est pour une coupe » ?
-« Non, c'est pour une partie de tennis...... Connard » ! Bigardise t-il.
Je décide de prendre le relais :
-« En fait, il faudrait lui faire une coupe, plutôt moderne » !
-« Rasé sur le côté et un peu de volume sur le dessus » ?
-« Ouais, on peut essayer comme ça » !
-« Bon alors, allez vous assoir : je vais vous faire un petit shampooing aux œufs » !
-« Je préfèrerais que tu me le fasses à la tête » ! s'esclaffe t-il.
Jeanfil préfère ignorer sa vanne douteuse et le conduit au bac : en moins de deux heures Jessy se sera fait laver la tête plus qu'au cours de toute sa vie et même qu'après !
Le shampooing terminé, Jess va s'installer sur un fauteuil, devant le miroir.
Le coiffeur observe sa tignasse :
-« Ca va être coton à cause des nœuds » !
-« Déconne ? Me dit pas que tu as peur des nœuds » ?! rigole t-il encore.
Sans un mot, le coiffeur lui saisit la tête fermement, la penche et ramène toute la chevelure en avant.
La brosse bute sur les nœuds mais ça ne l'arrête pas. Il tire comme un malade, faisant hurler Jessy :
-« Il faut souffrir pour être beau » lui dit-il avec un air sadique.
Il taille, il brosse, il rase, retaille, rebrosse, rerase et au bout de dix minutes le crâne de Jess est pratiquement déplumé sur le devant et sur le côté :
-« Bon, maintenant je vais vous faire le derrière » !
-« Ah non ! Pas de ça chez nous » !
-« Je peux vous dire quelque chose » ?
-« Bien sûr ! Vas-y » !
-« Alors, ferme ta gueule, espèce de gros con » !
Un silence pesant s'installe dans le salon.
Jessy reste figé dans son fauteuil.
Jeanfil attaque l'arrière du crâne et au bout de dix minutes il branche le séchoir sur la frime de Jess qui s'affole :
-« Il va me faire bouillir le cervelet avec son pistolet à air chaud » brame mon compagnon.
Il se trémousse, éternue, vitupère. Il déclare que ce salon est une annexe des BAUMETTES ; un oubli de la GESTAPO. Il s'empourpre. Il expectore. Enfin, la séance s'achève.
Jessy est lotionné, talqué comme un derrière de nourrisson, parfumé, toiletté, rogné, superbe.
Le coiffeur se place derrière Jessy avec un petit miroir afin qu'il puisse vérifier sa nouvelle coiffure.
Jess retrouve le sourire :
-« Jean-Philippe, tu es au top » !
A suivre !
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Les Aventures croquignolesques du petit Janot de MARTIGUES
HumorDepuis plusieurs années, dans le cadre de mon travail j'ai effectué plusieurs missions en FRANCE et à l'Etranger. J'ai remarqué que beaucoup d'expatriés, séparés de leur famille, s'adonnent facilement à la boisson. La picole n'étant pas vraiment mo...